L’humanité pèse trente mille milliards de tonnes

Si l’humanité disparaissait demain, elle laisserait derrière elle trente mille milliards de tonnes d’objets et constructions. La « technosphère » pèse ainsi environ 50 kg par mètre carré de la planète, selon le calcul étonnant réalisé par des scientifiques.
L’information est passée il y a quelques mois, mais sans attirer l’attention. Elle nous paraît si lourde de sens qu’on a voulu y revenir. Une équipe internationale réunie autour de trois géologues de l’université de Leicester, en Grande-Bretagne, a évalué fin 2016 la masse de la « technosphère », c’est-à-dire de toutes les structures que les humains ont construites pour se maintenir en vie : maisons, usines et centres commerciaux, ports et aéroports, routes, systèmes informatiques, monuments divers, décharges…
« Mesurer la technosphère est une façon d’appréhender les extraordinaires changements réalisés par l’homme, qui affectent la planète Terre. Contrairement à la biosphère, la technosphère a très peu de capacités à recycler ses propres matériaux, facteur qui pourrait affecter son évolution future, ou l’arrêter complètement », explique le professeur Zalasiewicz, l’un des trois principaux auteurs de l’étude, qui a consacré une grande partie de sa carrière à l’étude de l’anthropocène, et à l’influence sur la planète de substances créées par l’homme, par exemple les isotopes plastiques et radioactifs provenant des essais d’armes nucléaires.
« Une empreinte profonde laissée sur notre planète »
« Il n’y a pas que sa masse, observe le professeur Colin Waters, un autre chercheur, la technosphère comprend une énorme gamme d’objets matériels, de simples outils, pièces de monnaie, stylos à bille, livres et CD, ordinateurs et smartphones sophistiqués… Déposés dans des strates, ils deviendront les “technofossiles” qui aideront nos successeurs sur Terre à caractériser et à décrire l’anthropocène. »
L’étude suggère que si les technofossiles étaient classés comme des fossiles normaux par des paléontologues en fonction de leur forme et de leur texture, le nombre de types individuels actuellement sur la planète atteindrait probablement un milliard ou plus, dépassant ainsi largement le nombre d’espèces biologiques actuellement vivantes.
Le professeur Zalasiewicz ajoute : « La technosphère est peut-être géologiquement jeune, mais elle évolue avec une vitesse folle, et a déjà laissé une empreinte profonde sur notre planète. »