Pesticides : le gouvernement sommé de mieux évaluer les effets

- PublicDomainPictures/CC0/Jean Beaufort
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Comment bannir d’un seul coup tous les pesticides dangereux ? En durcissant considérablement les conditions de leur autorisation. Mercredi 5 octobre, une trentaine d’organisations ont lancé un recours — qui pourrait finir devant le Conseil d’État — avec un objectif : revoir les méthodes d’homologation des pesticides, qui selon elles, ne prennent pas du tout en compte « les effets à long terme des produits dans leur intégralité ».
Un produit phyto, comme l’herbicide Roundup de Monsanto, est composé d’une substance active principale — le glyphosate dans notre cas —, mais également de nombreux coformulants censés augmenter l’efficacité ou la stabilité du produit final.
Or, ces ingrédients sont rarement pris en compte dans les analyses de toxicité précédant l’autorisation d’un pesticide. Autrement dit, les autorités sanitaires regardent la dangerosité de telle ou telle substance active, sans s’intéresser aux potentiels effets indésirables des coformulants. Et ce, alors même que de nombreuses études scientifiques mettent l’accent sur leur potentielle nocivité. Les effets cocktail — un mélange de molécules peut être plus toxique qu’une seule molécule — sont également mal et peu étudiés.
« La réglementation européenne est pourtant claire, a insisté Andy Battentier, directeur de campagne de la coalition d’associations Secrets toxiques, à l’origine du recours. Un pesticide ne peut être autorisé que s’il n’a pas d’effet immédiat ou différé sur la santé humaine et l’environnement, compte tenu des effets synergiques ou cumulés connus. »
Un délai de deux mois
Pour appliquer cette règle, il faudrait donc que les firmes agrochimiques étudient les conséquences sur le temps long de leurs produits commerciaux, en condition réelle — et non pas uniquement en laboratoire ou via des simulations informatiques. Ce qu’ils ne font pas, a soutenu Guillaume Tumerelle, avocat de la campagne : « L’État français a mal transposé le règlement européen, et n’a pas prévu que les industriels produisent des analyses de toxicité à long terme des produits dans leur formulation complète. »
La procédure lancée le 5 octobre a pris la forme d’une demande préalable adressée à la Première ministre — une sorte de recours à l’amiable. Mais « en l’absence de réponse satisfaisante de la part de l’exécutif sous deux mois, les signataires de la demande préalable porteront un recours devant le Conseil d’État », ont précisé les organisations.
« Notre objectif, c’est bien de protéger les vies humaines et le vivant, a rappelé la députée communiste Elsa Faucillon, cosignataire du recours — ainsi qu’une vingtaine d’autres parlementaires. Nous demandons juste que la réglementation soit appliquée et le droit respecté. Et que les produits dangereux soient interdits. » Si le recours aboutit, les organisations espèrent un changement radical : selon elles, de nombreux pesticides aujourd’hui commercialisés pourraient être ainsi interdits.