Média indépendant, en accès libre pour tous, sans publicité, financé par les dons de ses lecteurs

Luttes

Répression des militants écolos : en Allemagne, les partis de gauche font l’autruche

Mercredi 31 mai, un bouquet de manifestations est prévu dans les grandes villes d’Allemagne en soutien à Letze generation.

Des manifestations sont prévues ce 31 mai en Allemagne, en soutien à Letzte Generation. L’opération policière subie par les militants climatiques était soutenue par la droite... mais aussi par le chancelier social-démocrate.

Berlin (Allemagne), correspondance

Après la répression, la réplique de l’organisation Letzte Generation (« dernière génération ») ne s’est pas faite attendre. Mercredi 31 mai, un bouquet de manifestations est prévu dans les grandes villes d’Allemagne en soutien à cette association engagée depuis 2021 dans une lutte musclée contre le réchauffement climatique.

Dans une lettre ouverte adressée au chancelier allemand le 27 mai — qui les a récemment qualifiés de « détraqués » — les militants ont prévenu Olaf Scholz des conséquences des descentes de police survenues mercredi 24 mai : « D’innombrables personnes se sont inscrites à des formations de sit-in pour la semaine prochaine. » Ils entendent en effet intensifier leurs actions de blocage de la circulation et poursuivre leurs protestations. Les militants sont connus pour leurs actions spectaculaires : grèves de la faim, collage de mains sur le bitume, jet de purée sur les vitres protégeant des tableaux, interruption du trafic aérien...

L’opération policière lancée par le Parquet de Munich a conduit à quinze perquisitions, le 24 mai, dans plusieurs länder. Sept activistes sont soupçonnés de « constitution d’organisation criminelle ». Des comptes bancaires et le site internet de l’association ont été bloqués. Parmi les éléments à charge, la police bavaroise évoque le financement et les collectes de dons de l’organisation, jugés opaques voire illégaux, ainsi que la participation présumée de deux membres de Letzte Generation au sabotage de l’oléoduc Trieste-Ingolstadt, qui passe par la Bavière. Par ailleurs, de nombreuses plaintes ont été déposées contre les militants à cause des blocages de routes qui exaspèrent certains citoyens.

Les partis de gauche approuvent majoritairement l’action policière

Les deux syndicats de la police allemande n’ont pas manqué de saluer les descentes. « La justice intervient, c’est le bon signal d’un État de droit qui se défend », a déclaré le chef du syndicat DPolG Rainer Wendt en évoquant « la population qui souffre mille fois par jour de la terreur de rue de ces sauveurs autoproclamés du climat ». Originaire du Land de Hesse, la ministre sociale-démocrate de l’Intérieur Nancy Faeser soutient, elle aussi, la police bavaroise en estimant que « la crise climatique ne peut se régler que de manière démocratique ».

Pendant que l’opposition conservatrice demande la surveillance du mouvement par les services de renseignement intérieur, les partis de la coalition gouvernementale (SPD, libéraux et écologistes) approuvent l’action policière ou la contestent timidement. Même les leaders de la gauche radicale, critiques sur la disproportion de l’action policière et les arrestations provisoires, ne claironnent pas leur soutien aux actions de blocage ou de sabotage. Rares sont les pointures politiques à être montées au créneau sur ce terrain électoralement sensible.

Letze Generation organise des formations aux actions de désobéissance. Ses membres multiplient les barrages routiers, notamment se collant les mains sur le bitume. Twitter / Letzer Generation

Fin avril, le ministre allemand de l’Économie Robert Habeck (Verts) exprimait ainsi sa compréhension pour les activistes de la « dernière génération », tout en critiquant leurs formes de protestation. « C’est une grande réussite historique de Fridays for Future [considérée comme berceau politique des militants de Letzte Generation] que d’avoir réussi à obtenir une majorité sociale pour la protection du climat », assurait-il lors d’un débat public à Kiel fin avril. Avant d’ajouter que la « radicalisation actuelle ne crée pas la majorité ».

Letzte Generation n’a pas l’intention de baisser les bras. Sur l’un de ses forums, certains membres estiment qu’il faut au contraire « profiter de la dynamique actuelle » pour accélérer. Le mouvement a d’ailleurs annoncé, sans donner de chiffres précis, que leurs rangs grossissaient depuis les descentes de police. Enfin, en moins d’une semaine, près de 500 000 euros ont été versés sur la cagnotte qu’ils viennent de créer pour payer les amendes infligées aux militants, en attendant que leurs comptes soient débloqués. L’association a donc plus que jamais les moyens d’agir.

Alors que les alertes sur le front de l’environnement continuent en ce mois d’octobre, nous avons un petit service à vous demander. Nous espérons que les derniers mois de 2023 comporteront de nombreuses avancées pour l’écologie. Quoi qu’il arrive, les journalistes de Reporterre seront là pour vous apporter des informations claires et indépendantes.

Les temps sont difficiles, et nous savons que tout le monde n’a pas la possibilité de payer pour de l’information. Mais nous sommes financés exclusivement par les dons de nos lectrices et lecteurs : nous dépendons de la générosité de celles et ceux qui peuvent se le permettre. Ce soutien vital signifie que des millions de personnes peuvent continuer à s’informer sur le péril environnemental, quelle que soit leur capacité à payer pour cela. Allez-vous nous soutenir cette année ?

Contrairement à beaucoup d’autres, Reporterre n’a pas de propriétaire milliardaire ni d’actionnaires : le média est à but non lucratif. De plus, nous ne diffusons aucune publicité. Ainsi, aucun intérêt financier ne peut influencer notre travail. Être libres de toute ingérence commerciale ou politique nous permet d’enquêter de façon indépendante. Personne ne modifie ce que nous publions, ou ne détourne notre attention de ce qui est le plus important.

Avec votre soutien, nous continuerons à rendre les articles de Reporterre ouverts et gratuits, pour que tout le monde puisse les lire. Ainsi, davantage de personnes peuvent prendre conscience de l’urgence environnementale qui pèse sur la population, et agir. Ensemble, nous pouvons exiger mieux des puissants, et lutter pour la démocratie.

Quel que soit le montant que vous donnez, votre soutien est essentiel pour nous permettre de continuer notre mission d’information pour les années à venir. Si vous le pouvez, choisissez un soutien mensuel, à partir de seulement 1€. Cela prend moins de deux minutes, et vous aurez chaque mois un impact fort en faveur d’un journalisme indépendant dédié à l’écologie. Merci.

Soutenir Reporterre

📨 S’abonner gratuitement aux lettres d’info

Abonnez-vous en moins d'une minute pour recevoir gratuitement par e-mail, au choix tous les jours ou toutes les semaines, une sélection des articles publiés par Reporterre.

S’abonner
Fermer Précedent Suivant

legende