Vacances en avion ? La planète a la gueule de bois

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Climat Quotidien TransportsExempté de TVA et de taxe sur le carburant, le transport aérien se porte bien, très bien même. Pourtant, le bonheur des transporteurs ne fait pas celui de la planète, rappelle l’auteur de cette tribune, qui encourage chacun à remettre en question son utilisation du mode de transport le plus polluant au monde.
Nathan Méténier vient de passer son baccalauréat et commence ses études à Sciences Po Grenoble.
C’est le temps de la reprise. L’esprit est encore sur une plage des Caraïbes, et le corps scintille des effets du soleil exotique. Au départ de Paris, il suffit de 2 h 20 pour aller à Porto, tout au plus 3 heures pour arriver à Marrakech. Et quand il faut aller plus loin ? Le temps d’une nuit et hop, en 12 heures, on se retrouve au Sri Lanka. Bref, prendre l’avion est devenu un jeu d’enfant.
Prendre l’avion est pratique et surtout tendance. Selon l’AFP, en 2016, le trafic aérien a fait un bond de 6,3 % portant à 3,7 milliards le nombre de voyageurs dans le monde cette année. « La connectivité a augmenté avec la création de 700 nouvelles lignes », précise Alexandre de Juniac, directeur de l’Association internationale du transport aérien. En parallèle, le prix des billets a accusé une baisse de 44 dollars en moyenne la même année. Désormais accessible à la classe moyenne, l’avion est plébiscité, toutes générations confondues. Le trafic aérien, et par la même le tourisme mondial, explose. Il en est de même pour des petits trajets traditionnellement effectués en voiture ou en train. Selon l’indicateur tendanciel du trafic aérien commercial du ministère de la Transition écologique et solidaire, les vols en métropole ont augmenté de 3,1 % en 2016. De fait, l’avion devient un des moyens de locomotion par excellence, même sur des petites distances.
On sait que l’avion est un mode de transport polluant. Mais mesure-t-on pleinement son impact environnemental ? À l’heure où l’on prend l’avion comme on prend le train, la planète suffoque. Un avion rejette en moyenne 360 grammes équivalents CO2 lors d’un déplacement d’un kilomètre, contre 150 grammes pour une voiture et 11 grammes pour un train, rappelle l’association Convergence, qui œuvre en faveur du développement durable. Si l’avion ne participe qu’à hauteur de 2 ou 3 % des émissions de CO2 globales, comme l’affirment ses défenseurs, il n’en demeure pas moins le mode de transport, de très loin, le plus polluant par kilomètre parcouru. Pour preuve, un aller-retour Paris-Bali représente 4,8 tonnes de CO2, un aller-retour Genève-Sri Lanka 2,8 tonnes. Or, il est admis que notre empreinte carbone individuelle doit se limiter à 1,7 tonne par an pour permettre de contenir le réchauffement climatique en deçà de 2 °C d’ici la fin du siècle.
L’enjeu est avant tout individuel
Depuis la convention internationale de 1944 à Chicago, les compagnies aériennes ne sont pas taxées sur le carburant. Non seulement le kérosène est exempt d’impôt, mais les passagers ne sont pas assujettis à la TVA. On découvre alors une belle niche fiscale ! Pas étonnant que les prix des billets soient si compétitifs par rapport à ceux du train. Le trafic aérien, en outre, échappe aux accords de Grenelle. Et l’a-t-on seulement évoqué lors de la COP21 ?
Une prise de conscience généralisée sur la nocivité de ce mode de transport est indispensable. Une légitimation de l’avion dans un usage quotidien risquerait, en effet, de peser lourd, à terme, sur notre empreinte carbone.
Certes, des recherches sur les carburants aux études sur le stockage de l’énergie en passant par l’invention de nombreux alliages, les performances des avions seront à n’en point douter optimisées à l’avenir.
Mais, pour l’heure, l’enjeu est avant tout individuel, car il appartient à chacun de limiter ses déplacements en avion afin de réduire son empreinte carbone. Partir dix jours en vitesse éclair, chaque été, à l’autre bout du monde n’est pas conciliable avec les exigences d’un développement durable responsable. Cette remise en question essentielle permettrait d’alerter nos dirigeants sur la nécessité d’un débat public. Bref, ayons tous la gueule de bois au retour de l’étranger !