Média indépendant, en accès libre pour tous, sans publicité, financé par les dons de ses lecteurs

En brefAnimaux

« Attaques » d’orques vers Gibraltar : une panique sans consensus scientifique

Les scientifiques interrogés ne croient pas à une attaque délibérée des orques contre les humains.

Les orques sont-elles en train de fomenter un vaste complot pour couler les bateaux au sud-ouest des côtes espagnoles et au large du Portugal ? C’est en tout cas ce que laissent croire certains articles publiés ces derniers jours à propos « d’attaques » de navires par ces cétacés. L’affaire n’est pas nouvelle. Depuis 2020, le site orca iberica recense les « interactions » entre ces cétacés et les bateaux, nombreuses à l’ouest du détroit de Gibraltar.

Mais l’histoire a refait surface le 24 mai lorsque le bateau du skipper français Sébastien Destremau a été chahuté par des orques pendant une heure non loin des côtes de Cadix, au sud-ouest de l’Espagne. « C’est un gros bateau, de 15 mètres, 15 tonnes et ils jouaient avec, comme avec une coquille de noix ! » a-t-il déclaré à France 3.

Les « nouvelles dents de la mer » ?

Depuis, les articles ont fleuri avec un ton angoissant : « Un gang d’orques sème la terreur en Méditerranée [la localisation est fausse, il s’agit de l’Atlantique] en fonçant sur les bateaux pour les couler », titre le site DH sports. Le journal L’Indépendant parle d’attaques « d’une violence inouïe » ainsi que de « vengeance et imitation ». Libération commence son article en parlant « des nouvelles dents de la mer ». Konbini surenchérit, expliquant que « l’apaisement de la région est désormais entre les mains [sic] de la terrifiante White Gladis ».

Gladis, c’est le nom de l’orque qui aurait été blessée à la suite d’une collision avec une embarcation. Depuis, elle apprendrait aux autres orques à chahuter les navires. Dès lors, les journalistes s’interrogent : pourquoi s’en prennent-elles aux bateaux ? Cherchent-elles à se venger ? Tentent-elles de récupérer leur territoire, en proie à la surpêche et à la pollution sonore ?

Aucun consensus scientifique

Il n’existe aujourd’hui aucun consensus scientifique sur le sujet comme l’expliquait déjà Reporterre en décembre dernier. « Ce serait beau, une révolte des espèces non humaines, quand on voit à quelle vitesse on les dégomme sans aucun remords. Mais je n’y crois pas trop », dit le professeur en bioacoustique et spécialiste des cétacés Olivier Adam.

« Ils n’ont rien contre les humains, en revanche, les bateaux sont soit source d’amusement, ou alors il y a eu un accident, et depuis ce jour les orques s’en prennent aux bateaux », explique François Sarano, biologiste marin à FranceInfo.

Cétacés en danger

Les cétacés ne sont donc pas rancuniers, contrairement à ce que nos tendances anthropomorphiques voudraient nous faire croire. Aucune attaque mortelle d’orque en milieu sauvage n’a d’ailleurs jamais été recensée.

En revanche ces articles anxiogènes pourraient avoir des conséquences désastreuses sur leurs vies. Les marins, paniqués à l’idée d’une éventuelle rencontre avec une bande d’orques, s’équipent désormais d’explosifs extrêmement puissants qui pourraient blesser l’ouïe des animaux. « C’est grâce à l’écholocalisation qu’ils se déplacent et communiquent. Si l’on endommage leur ouïe, ils sont perdus », expliquait à Reporterre Paula Méndez Fernandez.

Les orques de cette région de l’Atlantique sont classées comme une espèce en danger critique d’extinction.

Alors que les alertes sur le front de l’environnement continuent en ce mois de septembre, nous avons un petit service à vous demander. Nous espérons que les derniers mois de 2023 comporteront de nombreuses avancées pour l’écologie. Quoi qu’il arrive, les journalistes de Reporterre seront là pour vous apporter des informations claires et indépendantes.

Les temps sont difficiles, et nous savons que tout le monde n’a pas la possibilité de payer pour de l’information. Mais nous sommes financés exclusivement par les dons de nos lectrices et lecteurs : nous dépendons de la générosité de celles et ceux qui peuvent se le permettre. Ce soutien vital signifie que des millions de personnes peuvent continuer à s’informer sur le péril environnemental, quelle que soit leur capacité à payer pour cela. Allez-vous nous soutenir cette année ?

Contrairement à beaucoup d’autres, Reporterre n’a pas de propriétaire milliardaire ni d’actionnaires : le média est à but non lucratif. De plus, nous ne diffusons aucune publicité. Ainsi, aucun intérêt financier ne peut influencer notre travail. Être libres de toute ingérence commerciale ou politique nous permet d’enquêter de façon indépendante. Personne ne modifie ce que nous publions, ou ne détourne notre attention de ce qui est le plus important.

Avec votre soutien, nous continuerons à rendre les articles de Reporterre ouverts et gratuits, pour que tout le monde puisse les lire. Ainsi, davantage de personnes peuvent prendre conscience de l’urgence environnementale qui pèse sur la population, et agir. Ensemble, nous pouvons exiger mieux des puissants, et lutter pour la démocratie.

Quel que soit le montant que vous donnez, votre soutien est essentiel pour nous permettre de continuer notre mission d’information pour les années à venir. Si vous le pouvez, choisissez un soutien mensuel, à partir de seulement 1€. Cela prend moins de deux minutes, et vous aurez chaque mois un impact fort en faveur d’un journalisme indépendant dédié à l’écologie. Merci.

Soutenir Reporterre

📨 S’abonner gratuitement aux lettres d’info

Abonnez-vous en moins d'une minute pour recevoir gratuitement par e-mail, au choix tous les jours ou toutes les semaines, une sélection des articles publiés par Reporterre.

S’abonner
Fermer Précedent Suivant

legende