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Aux Etats-Unis, les Républicains mènent une offensive générale contre le droit de manifester

Depuis l’élection de Donald Trump, les élus républicains s’attaquent au droit de manifester, visant notamment les opposants aux projets d’oléoducs. Reporterre dresse un inventaire de ces projets de loi, dont l’une prévoit même l’impunité des conducteurs renversant des manifestants.

L’attaque contre un droit garanti par le premier amendement de la Constitution états-unienne est sans précédent. Mais depuis l’élection de Donald Trump, des législateurs Républicains ont introduit ou voté, dans au moins 18 États, des lois qui répriment les manifestations de masse. De la Virginie à l’État de Washington, les élus ont présenté des projets de loi pour accroître les sanctions contre les manifestants qui bloqueraient des autoroutes, pour interdire l’utilisation de masques pendant les manifestations, et pour indemniser les conducteurs qui blesseraient, avec leurs voitures, des manifestants marchant sur une route. Et même pour saisir les biens de manifestants qui auraient participé à une manifestation où des violences contre des biens se seraient produites.

Il y a eu, aux États-Unis, ces dernières années, une recrudescence de manifestations, qu’il s’agisse de défendre les droits des Noirs illégalement tués par des policiers (Black Lives Matter) ou de s’opposer à des projets d’oléoducs, comme le Keystone ou, récemment, le Dakota Access, où M. Trump vient de faire démanteler avec violence le campement des militants.

Facturer aux manifestants arrêtés le coût du service d’ordre policier 

Les élus républicains qui cherchent à faire passer ces lois liberticides font semblant d’ignorer la nuance entre manifestation pacifique et émeute, prétendant ne vouloir réglementer que les secondes. Le mot émeute étant très proche du mot terrorisme, l’assimilation est claire.

Certains élus présentent ces projets de loi comme nécessaires pour contrer les actions des manifestants « payés » ou « professionnels ». D’autres disent que les mesures sont nécessaires pour assurer la sécurité publique sur les routes. Certains projets de loi, dans des Etats comme l’Oklahoma et le Dakota du Sud, sont destinés à décourager les protestations liées aux oléoducs.

En foncé, les États républicains ayant, au 24 février, annoncé ou déjà voté des lois limitant le droit de manifester.

Dans le Colorado, le projet de loi renforcerait les condamnations de saboteurs d’équipements pétroliers, ou de manifestants qui ferment des pipelines. En Floride, le sénateur Républicain George Gainer voudrait, dans certaines conditions, permettre aux automobilistes de renverser les manifestants pour les empêcher de bloquer les rues. En Georgie, une loi est déjà passée, poussée par six sénateurs, qui renforce les peines contre ceux qui bloquent les routes, rues ou tout passage public. Dans l’Iowa, neuf sénateurs Républicains aimeraient infliger cinq ans de prison aux manifestants qui bloquent le passage. Dans l’Indiana, le projet accorderait à la police le droit d’user de « tout moyen nécessaire » contre les manifestants, mais il a été allégé et ne prévoit plus que des amendes. Dans le Michigan, une loi votée à la fin de l’année dernière augmente le pouvoir de réprimer les manifestations. Dans le Minnesota, le projet de loi prévoit de lourdes amendes et rend possible de facturer aux manifestants arrêtés le coût du service d’ordre policier. Dans le Missouri, le projet est d’interdire aux manifestants le port de masques ou autres déguisements. Dans le Mississippi, la loi en cours de discussion prévoit 10.000 $ d’amende et des peines de cinq ans de prison pour toute personne obstruant la circulation.

Condamnations très lourdes pour tout acte considéré comme du « terrorisme économique » 

En Caroline du Nord, il suffira de chahuter un personnage officiel de l’État pour être poursuivi pénalement. Dans le Nord Dakota, les protestations contre le pipeline Dakota Access ont suscité plusieurs projets en cours d’examen. Dans l’Oklahoma, les sénateurs envisagent une loi qui augmente les pénalités envers ceux qui font intrusion sur des propriétés privées (mines ou sites pétroliers ou d’extraction de schiste, par exemple). Dans l’Oregon, l’idée est d’obliger les universités et les écoles à expulser les étudiants qui auraient participé à des manifestations. Dans le Dakota du Sud, une loi a été récemment votée qui prévoit de lourdes pénalités pour violation de propriété privée, en prévision de la future résistance au cas où le pipeline Keystone XL reprendrait. Dans le Tennessee, il s’agit de protéger les conducteurs qui blesseraient des manifestants, une sorte de permis de foncer dans la foule. En Virginie, la loi en examen, qui aurait augmenté les condamnations de militants refusant de se disperser, vient d’être bloquée. Dans l’État de Washington, les législateurs étudient une loi qui imposerait des condamnations très lourdes pour tout acte considéré comme du « terrorisme économique ».

Dans l’Arizona, où le sénateur Républicain John Kavanagh prétendait saisir les biens des manifestants en arguant que la plupart d’entre eux ne sont que « des agents provocateurs à temps plein et quasi professionnel payés pour créer un désordre public », les manifestations (encore admises) ont conduit le président Républicain de la Chambre des représentants de l’État, J.D. Mesnard, à retirer la proposition de loi. Il a déclaré « qu’on n’a peut-être pas besoin de nouvelle loi pour éviter les violences dans les manifestations », et que, puisque les citoyens pensent que cette loi (SB1142) est une atteinte au droit de manifester pacifiquement, cela rend la législation politiquement inacceptable.

Pour se consoler, le parlement de l’Arizona a approuvé un ensemble de mesures qui rendent plus difficile, pour les citoyens, de proposer leurs propres lois par le biais du processus d’initiative et qui facilite, pour les législateurs, la possibilité d’abroger ou de modifier ces lois voulues par les électeurs.

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