Casserolades : « On va continuer à faire du bruit ! »

À Paris, le 1ᵉʳ mai 2023. - © NnoMan Cadoret / Reporterre
À Paris, le 1ᵉʳ mai 2023. - © NnoMan Cadoret / Reporterre
Les casseroles, nouvelles reines de la lutte ? Dans le cortège parisien du 1ᵉʳ mai, la tactique du chahut tintamarresque qui s’est répandue partout en France plaît énormément aux manifestants.
Paris (Île-de-France), reportage
Le 1ᵉʳ mai, à l’occasion de la journée internationale de lutte pour les droits des travailleurs et de la 13ᵉ mobilisation intersyndicale contre la réforme des retraites, 550 000 personnes ont manifesté à Paris selon la CGT.
Dans la foule, quelques pancartes faisaient référence aux « casserolades » organisées partout en France : depuis 15 jours, à l’aide de cet ustensile de cuisine, des manifestants perturbent les déplacements du gouvernement.
Sept personnes rencontrées par Reporterre ce 1ᵉʳ mai expliquent en quoi ce modus operandi leur paraît fécond pour aller « jusqu’au retrait » de la réforme… et aussi pour toutes les luttes à venir.
- Mojo, 30 ans, militant chez Extinction Rebellion :
« Quand on voit que le gouvernement qualifie les casseroles de “dispositifs sonores portatifs”, et qu’il a essayé de les interdire, c’est grotesque : ils judiciarisent une chose qui les tourne en dérision. L’humour, combiné avec d’autres modes d’action, est un bon moyen d’atteindre les gens. »

- Marie, 30 ans, militante chez Nous Toutes Paris Nord :
« Aujourd’hui, ce sont des casserolades qui sont organisées, mais demain cela pourrait être autre chose : on va continuer à faire du bruit ! »
- Tom, 32 ans, militant chez Greenpeace :

« Chez Greenpeace, on a invité les militants à participer à ces casserolades, par exemple lors de déplacements de Christophe Béchu et d’Agnès Pannier Runacher, ministres de la Transition écologique et énergétique. Ajoutées aux manifs et à tout notre travail juridique et scientifique, ces actions permettent de nous faire entendre, et on voit bien que cela gêne le gouvernement : ils annoncent de plus en plus tard leurs déplacements, voire les annulent. Ce moyen de lutte supplémentaire est utile, et ce pour tous les combats à venir. »
- Aurélie, 46 ans, membre des Soulèvements de la Terre :
« Au regard de l’arrogance et du mépris d’Emmanuel Macron, il faut multiplier les moyens pour nous faire entendre. Je suis donc présente à cette manif du 1ᵉʳ mai, mais j’ai aussi participé à des casserolades. J’ai aussi commandé des crécelles ! On sent que ce type d’actions et la créativité des manifestants peuvent faire peur au gouvernement. »

- Nathalie, 54 ans, membre des Soulèvements de la Terre :
« Je suis membre des Soulèvements de la Terre depuis peu : je milite depuis longtemps, mais cette réforme des retraites m’a tellement écœurée que je suis entrée en désobéissance civile. On voit bien aujourd’hui les limites des grèves et des manifs traditionnelles ; a contrario, les perturbations des déplacements ministériels fonctionnent. J’étais par exemple présente à la casserolade du 24 avril à la gare de Lyon, à Paris, pour accueillir le train du ministre de l’éducation Pap Ndiaye. Il y avait énormément de monde et il a dû être exfiltré par tunnel, c’était géant ! Il faut leur montrer qu’on sera là à chaque fois, qu’on ne va pas les lâcher — il y a quelque chose à jouer pour les JO 2024… —, et ce pas que pour les retraites ! En les prenant à partie en public, on montre qu’ils n’ont aucun répondant. »
- Philippe, 51 ans, membre d’Attac :

« Je suis impressionné de l’effet des casserolades : la Macronie a l’air de particulièrement les détester. C’est à se demander si ça n’est pas plus efficace que les manifestations. La carte des casserolades lancée par Attac a super bien fonctionné, on a été totalement dépassés ! En même temps, ces concerts de casseroles, c’est vieux comme le monde, populaire, rigolo, et cela permet de s’auto-organiser. »
- Lucie, 24 ans, porte-parole d’Alternatiba Paris :

« Ces casserolades sont dans l’esprit de créativité que l’on porte chez Alternatiba Paris. Ces derniers mois, lors des manifestations, on a réussi à montrer que le climat et les retraites sont des sujets liés. Et, à présent, toutes ces actions malicieuses et joyeuses permettent d’intégrer un maximum de personnes. Elles permettent aussi à la population d’imposer l’agenda politique : l’exécutif a dû reporter le projet de loi immigration, Macron a renoncé à aller sur la pelouse du Stade de France lors de la finale de la Coupe de France… Cela donne beaucoup d’espoir. »