Contre l’autoroute Toulouse-Castres, Extinction Rebellion occupe une maison

Une soixantaine de personnes a participé à l'occupation d'une maison appartenant au concessionnaire de la future autoroute, le 4 février 2023. - © Anouk Passelac/Reporterre
Une soixantaine de personnes a participé à l'occupation d'une maison appartenant au concessionnaire de la future autoroute, le 4 février 2023. - © Anouk Passelac/Reporterre
Durée de lecture : 4 minutes
Pour lutter contre l’autoroute Toulouse-Castres, des militants d’Extinction Rebellion ont occupé le 4 février une maison appartenant au concessionnaire. 31 personnes ont été interpellées.
Saint-Germain-des-Prés (Tarn), reportage
Samedi 4 février au petit matin, emmitouflé dans leurs manteau et bonnet, un groupe de personnes s’est engouffré discrètement dans une maison de Saint-Germain-des-Prés, dans le Tarn. Le pavillon est situé tout près de la RN 126 qui relie Castres à Toulouse. Il se situe aussi sur le tracé du projet contesté d’autoroute reliant ces deux villes.
C’est pour cette raison que le collectif Extinction Rebellion (XR) l’a pris pour cible. Les anciens occupants du logement ont été expropriés par Atosca, concessionnaire de l’éventuelle A69. Pour protester contre l’A69, mais aussi « bloquer et interrompre » son chantier, les militants écologistes ont décidé de squatter les lieux le plus longtemps possible. Une soixantaine de personnes a participé à l’opération.
Au bout de quelques heures, les gendarmes ont délogé les occupants. Trente-et-une personnes ont été interpellées et leur identité contrôlée. Le nouveau propriétaire des lieux, Atosca, a déposé plainte pour violation de domicile.

Depuis plusieurs mois, Extinction Rebellion a rallié l’opposition à ce projet d’autoroute vieux de quarante ans et jugé « anachronique » par l’autorité environnementale. L’antenne toulousaine du mouvement de désobéissance civile veut concentrer ses efforts sur le projet de l’A69. « Il est emblématique de la destruction du vivant, des sols, de la hausse des émissions de CO2 », selon Pierre [*], un militant.
« La mobilisation s’élargit »
XR rappelle dans son communiqué que « le projet de l’A69 est un non-sens écologique et social : 366 hectares de terres agricoles, de zones humides, de zones boisées saccagées, un trajet au prix de 17 euros, tout ça pour passer à côté d’une route nationale [la RN126] qui existe et ayant fait l’objet d’une proposition d’aménagement ».
Après le sabotage en décembre de plusieurs engins de chantier destinés aux travaux de l’autoroute par le collectif La Buse, les actions d’Extinction Rebellion donnent au mouvement une tournure plus musclée. Elles viennent s’ajouter aux mobilisations du collectif La Voie est libre (LVEL), de France Nature Environnement (FNE), de la Confédération paysanne et d’anciennes associations comme le Pact. Depuis plus d’un an, LVEL organise des événements festifs et familiaux pour décrier un « projet inutile » et demander à la place l’aménagement de la RN 126.

Les militants de LVEL se réjouissent des initiatives de XR. « La mobilisation s’élargit, ça crée une nouvelle dynamique », se félicite Geoffrey. Ce dernier se trouvait parmi les quelques Tarnais venus soutenir et applaudir les participants au squat, alors que la gendarmerie les délogeait. « Tant qu’on sera là, l’A69 ne passera pas ! » scandaient une partie des participants avant de quitter les lieux sous bonne escorte.

Ce nouveau souffle est le bienvenu alors que le calendrier du chantier s’accélère — le démarrage des travaux est prévu début mars — et que les incidents se multiplient. FNE a récemment déposé plainte contre Atosca, car l’entreprise n’a pas attendu l’autorisation environnementale pour intervenir sur des arbres destinés à être abattus.
« Tentatives d’intimidations »
LVEL dénonce également des « tentatives d’intimidations » : jeudi 2 février, deux agriculteurs ont été convoqués en gendarmerie pour avoir éconduit de leur propriété un employé du concessionnaire. Le lendemain, des militants posant des panneaux contre l’A69 ont été contrôlés « arbitrairement » par les autorités. « On trinque alors que c’est Atosca qui est hors-la-loi : c’est deux poids deux mesures », dénonce Geoffrey.
Face à ces péripéties, l’action de samedi veut envoyer un signal fort aux porteurs du projet : « Les citoyens et citoyennes n’hésiteront pas une seule seconde à intensifier la lutte », prévient Extinction Rebellion dans son communiqué.
Le mouvement s’oriente-t-il vers une zone à défendre (zad) ? Difficile de le dire. Les courants divergent entre militants pacifistes et activistes plus engagés et l’horizontalité des mouvements ne donne pas de cap précis à tenir. « Il y a une colère qui monte face au passage en force d’Atosca », conclut Geoffrey.