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Luttes

Dans les Alpes, la plus haute zad d’Europe

Le glacier de la Girose est à 3 400 mètres d’altitude. De nombreux militants soutiennent l'occupation des Soulèvements de la Terre.

Opposés à un chantier de téléphérique, des militants, scientifiques ou naturalistes occupent une partie du glacier de la Girose, dans les Hautes-Alpes.

« Nous n’avons pas besoin de monter toujours plus haut grappiller les derniers flocons. » Le 7 octobre, Les Soulèvements de la Terre ont débuté l’occupation d’un chantier de téléphérique sur le glacier de la Girose… à 3 400 mètres d’altitude. La zad ainsi créée devient la plus haute d’Europe.

Partis dans la nuit, les naturalistes, scientifiques et alpinistes passionnés ont grimpé 2 000 mètres de dénivelé. Leur cible : un rognon rocheux devant bientôt être perforé par un pylône. À cet endroit, deux semaines auparavant, des algécos et des engins de chantier avaient été déposés par un hélicoptère. En arrivant sur place, les militants ont réalisé que les algécos avaient disparu. Il ne restait plus qu’une seule pelleteuse, qui a été « décorée » avec des rochers.

« Nous avons dû monter cette occupation en urgence, car nous avons été pris de cours par le début des travaux. Officiellement, l’entreprise ne devait que poser des filets de protection de l’androsace du Dauphiné, une espèce [de plante] protégée et menacée par le projet », explique à Reporterre Sarah [*], l’une des activistes alpinistes.

La pelleteuse « décorée » avec des rochers. Twitter/Les Soulèvements de la Terre

Pilotés par la Sata Group, gestionnaire de l’Alpe d’Huez et des Deux-Alpes, les travaux préliminaires devaient reprendre le 9 octobre, au matin. Mais l’hélicoptère qui aurait dû déposer les ouvriers n’a fait qu’un tour dans le ciel, avant de repartir dans la vallée.

« Ce serait catastrophique »

L’objectif de l’entreprise est de doubler la fréquentation de ses stations à l’aube de 2030. L’enneigement ne cessant de diminuer avec le changement climatique, la Sata Group mise sur la neige artificielle et la création de nouvelles remontées mécaniques, toujours plus hautes, comme ici à La Grave-La Meije.

Les militants craignent également que ce troisième tronçon permette de relier la station toute proche des Deux-Alpes, créant ainsi un domaine skiable gigantesque. « Cette ambition de créer une mégastation est délétère pour ces milieux naturels. Ce serait catastrophique », estime Romain, père de famille et participant à cette zad.

Le campement installé sur le glacier de la Girose par les militants des Soulèvements de la Terre. Twitter/Les Soulèvements de la Terre

Pour Caillasse [*], qui a rejoint Les Soulèvements de la Terre après Sainte-Soline, ce troisième tronçon représente « un modèle économique dépassé, symbole de la mal adaptation qui est d’aller toujours plus haut et toujours plus fort pour compenser le recul du glacier, au lieu de changer de modèle économique ». Il estime qu’il faut entrer dans une logique de résilience : « L’idée n’est pas de priver les populations locales de toute activité, mais il faut acter qu’on ne construit plus rien de neuf. Il faut faire avec l’existant et arrêter d’artificialiser au bénéfice d’une minorité. »

« La fuite en avant de l’industrie touristique est tout sauf une solution. Il ne s’agit pas ici de défendre La Grave comme une exception, mais d’imaginer d’autres futurs désirables pour les montagnes et leurs divers habitantes », ont déclaré Les Soulèvements de la Terre dans un communiqué de presse. Ils préviennent que de nouveaux campements de résistance pourraient s’établir sur le site au printemps si l’abandon du projet n’est pas acté d’ici là.

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