Les communes toujours en retard dans leur transition écologique

Dans le massif central, le suivi des mesures prises par Clermont Auvergne Metropole a donné lieu à une évaluation largement négative. - CC BY-SA 4.0 / Fabien1309 / Wikimedia Commons
Dans le massif central, le suivi des mesures prises par Clermont Auvergne Metropole a donné lieu à une évaluation largement négative. - CC BY-SA 4.0 / Fabien1309 / Wikimedia Commons
Durée de lecture : 4 minutes
PolitiqueLes politiques locales de plus de cent agglomérations ont été évaluées par des collectifs. Leur étude montre un retard de mise en œuvre important dans la plupart des domaines décisifs à la transition écologique.
Pas assez de bio dans les cantines, du retard dans la rénovation énergétique, des efforts louables pour réduire la place de la voiture en ville et augmenter celle de la nature… Le Réseau Action Climat, le Collectif pour une transition citoyenne et Alternatiba publient lundi 12 juin une évaluation à mi-mandat des politiques écologiques d’une centaine de communes. Bilan : malgré de belles déclarations, beaucoup peuvent mieux faire.
Une soixantaine de collectifs locaux ont évalué les actions de 88 communes et 15 intercommunalités, du village à la grande ville, sur 32 actions dans le domaine des transports, de l’agriculture, l’alimentation, l’énergie, l’environnement, etc. Les résultats commune par commune sont disponibles ici.
Bio, rénovation et vélo à la traîne
Les chiffres obtenus montrent que la prise de conscience est là, avec beaucoup de villes et villages affichant de belles intentions, mais qu’il reste du chemin à faire. Ainsi, près de 60 % des communes évaluées ne proposent pas au moins 50 % de produits sous signe de qualité (dont 20 % de bio) dans les cantines alors que c’est une obligation légale ; à peine plus de la moitié des communes ont adopté un plan pour développer le vélo.
De même, un quart des communes n’ont pas encore, à mi-mandat, de plan de réduction de la consommation d’énergie ; 85 % d’entre elles ont rénové moins de 1 % des logements du territoire ; la moitié, aussi, n’ont toujours pas pris les mesures nécessaires pour limiter l’artificialisation du territoire et 90 % ne seront pas prêtes pour la collecte des biodéchets, prévue à partir de début 2024.
« La thématique la plus porteuse, et de loin, est la protection de la biodiversité »
« La thématique la plus porteuse, et de loin, est la protection de la biodiversité », note Clara Sannicolo, qui a coordonné l’étude pour le Réseau Action Climat (RAC). Par exemple, beaucoup protègent leur « trame verte et bleue », c’est-à-dire des passages entre différentes zones naturelles pour que faune et flore puissent circuler, et elles n’utilisent pas de pesticides pour gérer leurs espaces verts. Une obligation légale, pour une fois, bien respectée.
À l’inverse, le point noir souligné par l’ONG est que très peu de communes ont cherché à mettre en place des mesures pour stopper l’artificialisation des terres. Seules « 7,7 % des communes ont inscrit le gel de l’extension des surfaces commerciales périphériques dans leurs documents d’urbanisme », regrette le rapport.
Manque de transparence
L’échantillon n’est pas représentatif et tous les domaines d’action n’ont pas pu être évalués pour chaque commune. Obtenir des informations n’a pas toujours été facile pour les citoyens car il y a, dans beaucoup de cas, un « manque de transparence, de communication et d’information des habitantes et des habitants sur les actions et politiques des élus », note le rapport.
« Mais toutes les catégories de communes selon l’Insee, et toutes les régions de France métropolitaine hors Corse sont représentées », souligne tout de même Clara Sannicolo. Cet important travail de synthèse, réalisé grâce à des citoyens, permet de donner la tendance, qui n’est pas très bonne.
« Les grandes villes s’en sortent mieux parce qu’elles ont plus de moyens »
Le RAC avance plusieurs explications à cette difficulté à mettre en œuvre des politiques écologiques. Le contexte, d’abord, peut jouer. Les élections municipales ont eu lieu en pleine crise du Covid-19. « Pendant la première année et demie de mandat, il était difficile pour les élus de programmer des investissements avec une activité économique au ralenti, reconnaît Clara Sannicolo. Mais cela a aussi été un catalyseur dans certains cas, par exemple pour les politiques de développement du vélo. »
Un autre facteur essentiel sont « les moyens financiers, humains et techniques », poursuit la coordinatrice du rapport : « Les grandes villes s’en sortent mieux parce qu’elles ont plus de moyens. » L’ONG demande donc aux pouvoirs publics nationaux de donner les moyens aux territoires de mener leur transition écologique. Elle rappelle également « qu’il y a des mesures peu coûteuses, comme modifier les documents d’urbanisme ou instaurer les 30 km/h ».
Des engagements payants
Mais ces mesures ne sont pas toujours prises en raison d’un autre frein : « Elles peuvent être coûteuses politiquement », remarque Clara Sannicolo. La volonté politique est donc essentielle. « Les élus soulignent les tensions entre ambitions sociales et environnementales et attractivité économique du territoire (infrastructure, emploi, logement…) », détaille le rapport. « De leur côté, les collectifs citoyens mettent en garde contre le manque de vision et de volonté politique en matière de transition de la part de nombreux élus. Ils dénoncent des politiques publiques et des cadres de pensée obsolètes. »
Le chemin est donc encore long. Mais l’engagement des citoyens paye. « C’est là où les citoyens sont les plus actifs que l’on a les mairies qui font le plus d’actions écologiques », remarque aussi Clara Sannicolo.