Média indépendant, en accès libre pour tous, sans publicité, financé par les dons de ses lecteurs

TribuneLibertés

Journal indépendant à Marseille, Le Ravi a besoin d’aide

Le Ravi, le journal satirique marseillais qui enquête en Paca, doit réunir très vite 500 nouveaux abonnés afin d’éviter le dépôt de bilan et ainsi poursuivre son aventure éditoriale.

Michel Gairaud est le rédacteur en chef du Ravi, un journal mensuel satirique fondé en 2003 en Provence-Alpes-Côte d’Azur (Paca).


Il était une fois en Paca, rebaptisée Région Sud par la magie du marketing transformant même les territoires en marchandises, Le Ravi peuplé d’irréductibles journalistes qui résistent encore et toujours. Ce mensuel indépendant, désormais adossé à un site animé quotidiennement, doit réunir 500 nouveaux abonnés pour fêter en juin prochain ses 18 ans. Autant d’années où il a relevé un pari fou : faire vivre une presse pas pareille régionale, plaçant l’urgence sociale et écologique au cœur de sa ligne éditoriale, documentant avec sérieux le fonctionnement — et les dysfonctionnements — de la vie démocratique locale. Mais sans jamais se prendre au sérieux ! En privilégiant le dessin de presse, en publiant des reportages dessinés, en défendant, d’un seul trait, l’enquête et la satire.

Et en Paca et à Marseille, les enjeux sont toujours démultipliés ! C’est là que le Front national (FN) a conquis ses premières mairies dans les années 90. C’est ici que les sondages — heureusement toujours aussi peu certains pour prédire l’avenir — annoncent l’élection de Thierry Mariani, le chef de file de l’extrême droite, labélisé Rassemblement national (RN), lors des prochaines régionales.

La misère, les inégalités sociales, ne sont pas moins pénibles au soleil du Sud-Est. Par l’incurie politique des élus locaux, des immeubles insalubres s’effondrent sur leurs habitants. Dans les calanques, au cœur d’un parc national, l’industrie se déleste toujours de ses rejets liquides. Les effets du dérèglement climatique, de l’urbanisation frénétique et du culte de la bagnole multiplient canicules, alertes à l’ozone, inondations dévastatrices.

Aucun droit à l’erreur

Mais en Paca, la résiliente, il n’y a pas que Le Ravi qui résiste. À Marseille, où les plus pauvres étaient une fois de plus laissés à l’abandon par les pouvoirs publics lors du premier confinement, des collectifs et des acteurs de terrain ont su s’auto-organiser pour répondre à l’urgence face à la crise sanitaire.

Aux frontières, dans les Alpes-Maritimes et les Hautes-Alpes, des citoyens viennent en aide aux femmes et aux hommes qui cherchent refuge dans notre pays alors que d’autres se noient en Méditerranée. Partout, loin des radars des mass media sur les autoroutes de l’information, des luttes s’organisent pour sauver les terres fertiles, les solidarités, préserver des droits et en conquérir de nouveaux. Autant de faits, autant d’enjeux, que Le Ravi chronique en empruntant des chemins de traverse.

Mais il n’y arrivera pas sans vous ! Édité par une association, la Tchatche, le journal finance son indépendance en panachant ses ressources. Elles proviennent des ventes du journal — l’élément essentiel — en forte hausse depuis le lancement de leravi.org, de dons, de quelques annonces à caractère non commercial comme celles du Mucem, le musée national de Marseille. Elles sont complétées par les revenus liés à des projets d’éducation aux médias auprès des jeunes mais aussi d’éducation populaire pour tous les âges. Ces projets se déroulent dans les quartiers populaires où les journalistes du Ravi partagent leur savoir-faire et s’instruisent de l’expertise des habitants en relayant leur parole. Autant d’actions et de ressources entravées par le Covid-19.

Nos économistes orthodoxes s’en réjouissent : la crise économique qui s’ouvre avec la sortie progressive de la crise sanitaire va éliminer les entreprises les plus fragiles, les moins « performantes », celles en réalité qui ne sont pas richement dotées en capitaux. Le Ravi, petit canard non formaté, qui doit aussi faire face à des procès bâillons, n’a pas droit à l’erreur. Ni au moindre trou de trésorerie. D’où son appel, pressant, afin de réunir 500 nouveaux abonnés dans les prochaines semaines pour ne pas déposer le bilan.

Vers une issue positive ?

Le Ravi, persuadé que le droit d’être informé est un bien commun irréductible aux prétendues lois du marché, revendique ouvertement des aides publiques. Mais elles se font rares. Ce jour, alors qu’elles sont alertées sur les risques de disparition du titre, avec ses six salariés et sa douzaine de dessinateurs, les collectivités locales ne s’en émeuvent guère. Une demande de soutien aux médias associatifs auprès du département des Bouches-du-Rhône est échouée au cabinet de Martine Vassal (LR). Connaîtra-t-elle in extremis, comme les années précédentes, une issue positive (6 % du budget en 2020) ?

À la Région, Christian Estrosi et Renaud Muselier (LR) ont supprimé depuis longtemps toutes leurs aides aux actions éducatives de la Tchatche. À Marseille, la nouvelle majorité plurielle du Printemps marseillais (gauche, écolo) a promis une rupture pour une « ville plus démocratique », mais prend son temps pour « arbitrer » les appels à l’aide du Ravi (5 % du budget en 2020).

De fait, seuls les abonnés — ou les donateurs, selon l’exemple stimulant de Reporterre — garantissent l’indépendance d’un journal libre. Près de 250 nouveaux lecteurs ont déjà entendu l’appel du mensuel qui ne baisse jamais les bras, comme le santon de la crèche provençale ayant inspiré son nom, cet idiot pas si bête gardant toujours le sourire et ne pouvant pas s’empêcher de mettre les pieds dans le plat. 250, la moitié de l’objectif ! Il était une fois Le Ravi, peuplé d’irréductibles journalistes, qui va poursuivre avec vous une aventure éditoriale singulière.

Pour soutenir Le Ravi et s’abonner, c’est ici.

📨 S’abonner gratuitement aux lettres d’info

Abonnez-vous en moins d'une minute pour recevoir gratuitement par e-mail, au choix tous les jours ou toutes les semaines, une sélection des articles publiés par Reporterre.

S’abonner
Fermer Précedent Suivant

legende