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Politique

L’élu Vert Hakim Bouaksa agressé lors d’un « banquet » pro Zemmour

Le 11 juin, Hakim Bouaksa a été violemment passé à tabac alors qu’il participait à un rassemblement contre la tenue d’un «banquet patriotique».

Conseiller municipal Vert près de Toulon, Hakim Bouaksa a été violemment agressé alors qu’il manifestait contre un rassemblement du parti d’Éric Zemmour. Il dénonce les violences d’extrême droite contre les élus.

Marseille, correspondance

Minerve autour du cou, bras gauche en écharpe et lèvre fendue, quatre jours après son agression, Hakim Bouaksa, conseiller municipal Europe Écologie-Les Verts à la mairie de la Seyne-sur-Mer tient à témoigner. Le 11 juin, il a été violemment passé à tabac alors qu’il participait à un rassemblement contre la tenue d’un « banquet patriotique » organisé dans un camping-restaurant par des militants locaux de Reconquête, le parti d’Éric Zemmour. Bilan : fracture du bras, entorse cervicale, une dent cassée et des hématomes sur le dos, soit trente jours d’incapacité totale de travail (ITT). « Avant, les racistes se faisaient petits, désormais ils manifestent à visage découvert. Il y a une montée du complotisme d’extrême droite qui fait que les élus deviennent des cibles, » soupire le jeune conseiller municipal.

Pour que sa ville ne soit pas « associée à un parti que l’on juge antirépublicain », lui et une trentaine de militants politiques ou syndicaux avaient décidé de manifester à l’entrée du site où était prévue la réunion du parti d’extrême droite. « C’était clairement un rassemblement pacifique, il y avait des personnes âgées, des mères de famille, des enfants », dit-il, comme une réponse à Marc-Antoine Lansade. Le responsable régional Reconquête, interrogé par France 3 Région, avait accusé les militants de gauche de violence et fait dans la surenchère : « Quand vous faites de la provocation, quand vous venez en découdre, ayez les moyens de votre provocation. » Hakim Bouaksa préfère en rire : « Les seules armes qu’on avait, c’étaient des drapeaux et des slogans. »

Sur des images diffusées sur les réseaux sociaux, on aperçoit plusieurs personnes agiter des drapeaux autour de voitures qui rentraient dans le camping sous des chants « Bienvenus aux fachos ». Au bout d’une bonne demi-heure, les esprits se sont échauffés. Le patron du restaurant est sorti en compagnie de trois autres personnes. Des insultes ont fusé : « Islamogauchistes ! » ; « Sales gauchos ! » « C’est là qu’un des hommes présents m’a mis deux coups de poing au visage. Je suis tombé et j’ai reçu des dizaines de coups de pied », raconte Hakim Bouaksa. Quatre policiers, présents sur les lieux, sont parvenus à interrompre le tabassage mais n’ont procédé à aucune arrestation. « Ils nous ont dit être en sous-effectif, ils m’ont invité à déposer plainte au commissariat, ce que j’ai fait. » L’élu a porté plainte pour « violences en réunion sur personne chargée d’une mission de service public ».

Les agresseurs étaient-ils des participants du « banquet patriotique » ? Difficile à dire. Contacté par Reporterre, le patron du camping-restaurant n’a pas souhaité s’exprimer. « Selon moi, ils n’étaient pas directement des militants de Zemmour, mais au moins des sympathisants, » dit Hakim Bouaksa.

L’écologie contre l’extrême droite

Depuis, les messages de soutien affluent. Marine Tondelier, Sandrine Rousseau, Julien Bayou (tous EELV) ou Manuel Bompard (La France insoumise) ont fait part de leur soutien. Nathalie Bicais, maire républicaine de la Seyne-Sur-Mer a également téléphoné à l’élu pour condamner les violences et lui assurer son soutien.

Actuellement dirigée par une maire de droite, la Seyne-sur-Mer était, jusqu’en 2020, la dernière ville du Var encore dirigée par une municipalité de gauche. « La question du racisme ne s’est jamais vraiment posée ici », dit Hakim Bouaksa. La violence liée à l’extrême droite est une nouveauté dans cette cité portuaire populaire. Après la démission du maire de Saint-Brévin-les-Pins suite à l’incendie de son domicile par des opposants à un centre d’accueil pour demandeurs d’asile et le défilé de 500 militants du GUD à Paris fin mai, l’agression résonne dans un contexte de résurgence de la violence d’extrême droite.

Hakim Bouaksa, qui dit avoir voulu s’engager politiquement après le choc du 21 avril 2002, souligne que « la lutte contre l’extrême droite a toujours été le sens de [s]on engagement politique ». « EELV est un parti antiraciste qui lutte contre les inégalités et prône l’écologie au service de la justice sociale, » complète-t-il.

Quelle suite va-t-il donner à ces événements ? « Je ne veux pas qu’il y ait de vengeance, je laisse la justice de mon pays s’en occuper » dit-il avant de conclure : « Cette agression ne m’arrêtera pas. Le seul résultat, c’est que mon combat contre le racisme en sortira grandi ».

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