La mobilisation décolle contre l’extension de l’aéroport de Lille

Les manifestants se sont réunis devant la mairie de Lesquin pour protester contre le projet de modernisation et d'extension de l'aéroport de Lille, le 5 février 2022. - © Baptiste Langlois/Reporterre
Les manifestants se sont réunis devant la mairie de Lesquin pour protester contre le projet de modernisation et d'extension de l'aéroport de Lille, le 5 février 2022. - © Baptiste Langlois/Reporterre
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Transports Grands projets inutilesUne centaine de personnes se sont rassemblées le 5 février à Lille contre la modernisation et l’extension de l’aéroport. Élus, riverains et écologistes encouragent les habitants à participer à l’enquête publique pour peser contre ce projet « mortifère ».
Lesquin (Nord), reportage
Derrière la banderole, une voix s’élève : « Est-ce que vous voulez plus d’avions ? » « Non ! » répond la foule. « Plus de pollution ? » « Non ! » « Plus de tranquillité ? » « Oui ! »
Le bref échange résume la mobilisation qui a réuni samedi 5 février, à partir de 14 h 30, une petite centaine de personnes devant la mairie de Lesquin. La commune de 9 000 habitants, à 10 kilomètres au sud de Lille (Nord), n’a pas été choisie au hasard par les organisateurs du rassemblement, l’association Nada (Non à l’agrandissement de l’aéroport de Lille-Lesquin), soutenue par Extinction Rebellion, ANV-COP21 Lille, Les Amis de la Terre, Alternatiba et plusieurs collectifs de riverains. Le nom de la ville est adossé à celui de l’aéroport de la métropole lilloise. « C’est aussi une des communes où un permis de construire a été déposé, c’est symbolique », précise Antoine Pattyn, membre de Nada.
Une aérogare deux fois plus grande
Comme de nombreux riverains, il lutte depuis un an et demi contre le projet d’extension et de modernisation de l’aéroport de Lille. Budgété à 100 millions d’euros par la société gestionnaire — Eiffage et Aéroport Marseille Provence —, concessionnaire de l’aéroport depuis le 1er janvier 2020, le projet doit doubler la surface de l’aérogare, afin de la faire passer de 18 000 à 34 000 m2. L’ambition est d’accueillir jusqu’à 3,9 millions de passagers en 2039, contre 2,2 millions en 2019, dernière année où la fréquentation n’a pas été bouleversée par le Covid-19.
Au regard de la pandémie et de l’urgence climatique, « on modifie nos mobilités, on change nos habitudes. L’avion pollue plus que les autres modes de transport », dit Antoine Pattyn, qui « remet totalement en question l’intérêt d’un agrandissement de l’aéroport. On crée de la demande en développant les infrastructures, pour ensuite nous dire qu’il y a justement de la demande » et ainsi justifier le bien-fondé d’un tel projet.

Sous un soleil timide et un vent frais, le maire de Lesquin, Jean-Marc Ambroziewicz, s’est dit surpris de voir le rassemblement organisé sous son porche. Il rappelle que la municipalité s’est prononcée pour « une modernisation de l’aéroport, mais contre un agrandissement ». Comme Lesquin, le conseil municipal de Lille, ainsi que de nombreuses communes de la métropole, ont émis, vendredi, un avis défavorable au projet. En novembre dernier, un rapport de l’Autorité environnementale indiquait, entre autres, que « la partie [du projet] consacrée à l’évaluation des émissions de gaz à effet de serre présente un excès d’optimisme du fait des hypothèses non réalistes sur lesquelles elle repose ». Le conseiller régional écologiste Yannick Brohard, qui a pris la parole lors du rassemblement, a dénoncé « un projet mortifère et d’un autre temps ».
« On essaye de nous faire avaler des couleuvres »
Le rendez-vous de samedi était aussi l’occasion d’inciter les habitants à participer à l’enquête publique lancée le 10 janvier, et qui s’achève le 14 février. « Allez déposer un avis ou des contre-propositions sur le registre en ligne », lance Antoine Passini, membre d’un collectif de riverains voisins de l’aéroport, qui a passé avec d’autres personnes en revue les 8 000 pages du dossier numérique de l’enquête. « On essaye de nous faire avaler des couleuvres », peste-t-il. Pollution de l’air, des nappes phréatiques, nuisances sonores, augmentation du trafic routier — avec une autoroute A1 déjà engorgée — et aérien : la liste des inquiétudes est longue pour les opposants.
Chantal, riveraine de Lesquin, subit déjà « des nuisances sonores, jusqu’à 22 heures, 22 h 30. Je ne vois pas comment la situation s’améliorerait avec plus d’avions dans les airs ». Sur sa terrasse, à Seclin, autre ville voisine de l’aéroport, Patrick est « obligé de [s’]arrêter de parler quand un avion passe. Et puis il y a une crèche, une école à côté... Ce projet est hors du temps. Si on ne fait rien maintenant, on est foutu ».