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La nouvelle dirigeante britannique, Liz Truss, est l’amie du pétrole

La Première ministre Liz Truss quitte le 10, Downing Street à Londres, le 7 septembre 2022.

La néolibérale Liz Truss a nommé un climatosceptique au ministère de l’Énergie et devrait valider une centaine de licences de forage en mer du Nord. Des signaux forts, qui inquiètent les associations écologistes outre-Manche.

Londres (Angleterre), correspondance

Le 17 août, Liz Truss, qui allait devenir Première ministre britannique le 5 septembre, était en campagne électorale. Elle faisait une promesse aux Britanniques : « Je suis déterminée à redoubler d’efforts pour atteindre l’objectif de zéro émission nette d’ici 2050 », écrivait-elle. Mais « d’une manière conservatrice qui aide les ménages et les entreprises ».

Au Royaume-Uni, les trois quarts des personnes interrogées se disent « préoccupés » par le changement climatique, selon un sondage datant du 2 août. Un sentiment d’urgence alimenté par une canicule record au mois de juillet, certaines régions du sud, dont Londres, ayant dépassé les 40 °C pour la première fois.

L’arrivée de Liz Truss au 10, Downing Street ne risque pas d’apaiser leurs craintes. Cette semaine, selon les informations du Times, la cheffe des tories, qui a travaillé comme commerciale pour la compagnie pétrolière Shell entre 1996 et 2000, devrait valider plus d’une centaine de licences de forage, permettant aux géants des énergies fossiles d’extraire gaz et pétrole des profondeurs de la mer du Nord. Le but est de canaliser l’inflation galopante — le taux doit atteindre les 13 % en octobre, du jamais-vu depuis quarante ans dans le pays — et de baisser les prix des factures d’électricité, a justifié la dirigeante mercredi 7 septembre.

Si elle est prise, cette décision fera fi des avertissements de l’Agence internationale de l’énergie, qui prévenait l’an dernier qu’aucun nouveau gisement ne doit être développé afin de limiter le réchauffement climatique à 1,5 °C. De plus, ce serait un « cadeau à des compagnies gagnant déjà des milliards », s’indignent les ONG environnementales, dont Greenpeace. D’autant que Liz Truss refuse catégoriquement de taxer les profits de ces compagnies. Un positionnement influencé par la proximité du Parti conservateur avec l’industrie pétrolière, a dénoncé l’opposition : les tories ont « reçu plus de 1 million de livres de dons de cette industrie depuis les dernières élections [en 2019] », selon la députée travailliste Zarah Sultana.

« Indifférente à la question de l’environnement »

Jeudi 8 septembre, The Independent a révélé que la campagne de Liz Truss a été financée à hauteur de 100 000 livres (environ 115 000 euros) par l’épouse d’un ancien haut dirigeant de la multinationale pétrolière BP. Cela fait aussi des années que la nouvelle locataire de Downing Street maintient d’étroites relations avec l’Institut des affaires économiques et le groupe 55 Tufton Street, deux très puissants groupes de réflexion, qui font du lobbying contre l’application de politiques environnementales au sein du gouvernement.

Liz Truss n’hésite pas non plus à afficher son soutien à l’organisation Countryside Alliance, amatrice de la chasse au renard et du tir à la grouse. La nomination, mercredi, du climatosceptique Jacob Rees-Mogg à la tête du ministère de l’Énergie et des Questions climatiques, a été, pour les écologistes, l’énième preuve que la crise climatique ne sera pas prise au sérieux. Comme la cheffe des conservateurs, son ministre est pro-énergies fossiles et pro-gaz de schiste. La fracturation hydraulique, consistant à creuser dans les entrailles de la Terre pour aller chercher du gaz, est pourtant une technique controversée, polluant les eaux souterraines et pouvant causer des tremblements de terre.

« Le gaz produit moitié moins d’émissions que le charbon, c’est une bonne énergie pour passer au zéro émission nette », s’est défendue Liz Truss le 4 septembre sur la BBC. Elle souhaite lancer des projets « là où les communautés sont d’accord » au plus vite. Avant d’assurer qu’elle augmenterait en parallèle la part des énergies renouvelables. Un engagement mis en contradiction par ses actions passées : entre 2014 et 2016, alors ministre de l’Environnement, Liz Truss a notamment réduit les subventions accordées aux fermes solaires et aux parcs éoliens, les qualifiant de « fléau pour le paysage ». Ce passif laisse à penser, comme l’expliquait mercredi un ancien collaborateur de la Première ministre citée dans Politico, que la dirigeante conservatrice « sera largement indifférente à la question de l’environnement ».

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