Média indépendant, en accès libre pour tous, sans publicité, financé par les dons de ses lecteurs

Luttes

Amende clémente pour les saboteurs de trottinettes

La sanction est clémente, selon leur avocat : trois militants d’Extinction Rebellion ont écopé d’une amende de 4 200 euros pour le sabotage de 22 trottinettes en libre-service à Lyon.

Lyon, correspondance

Une sirène de police rompt le silence entre les tours de la Part-Dieu. Il est presque 1 heure du matin. Les rues du quartier d’affaires de Lyon sont désertes cette nuit de juillet 2021. Dans les phares des policiers se détachent les silhouettes de trois militants d’Extinction Rebellion. Dans leurs poches, des tournevis et une pince coupante avec lesquels ils ont saboté entre 250 à 300 trottinettes en libre-service des prestataires Tier et Dott.

Les jeunes activistes souhaitaient dénoncer le « caractère anti-écologique et antisocial » des trottinettes en free-floating. Selon les travaux de la chercheuse en mobilité Anne de Bortoli, les trottinettes en libre-service à Paris émettaient en 2019 environ 109 grammes de CO2 au kilomètre. Soit deux fois moins qu’une voiture, mais deux fois plus que les vélos en libre-service et dix plus que le RER ou le métro. La moitié de ses émissions proviennent de leur conception. L’extraction des minerais nécessaires à la fabrication de leurs batteries au lithium fait payer un lourd tribut aux territoires qui en possèdent les gisements.

« Ce qui casse aussi le budget carbone de ces trottinettes, ce sont les camionnettes qui tournent pour les recharger », explique Mathias [*], l’un des prévenus. En effet, la collecte, la recharge puis le redéploiement des trottinettes compteraient pour 43 % de leurs conséquences environnementales. Et ces trottinettes ne participent qu’à la marge au report modal vers les mobilités dites « douces ». Autrement dit, elles remplacent la marche, le vélo et les transports en commun, plus que ne poussent les gens à se passer de leur voiture.

« La justice a compris la motivation des jeunes »

Les militants ont saboté les boîtiers IOT des trottinettes, qui permettent leur géolocalisation et dont la dégradation oblige un passage à l’atelier. La manœuvre qui ne dure qu’une poignée de minutes consiste à dévisser le boîtier, puis à en couper les fils. Câbles sectionnés, boîtier à changer, frais de main-d’œuvre et de recherche des trottinettes, coût d’immobilisation… Seul à intenter une action en justice, Tier a estimé le préjudice financier à 18 000 euros de réparation pour ses vingt-deux trottinettes dégradées attribuées aux trois militants interpellés. « C’était une action politique en faveur du climat, ils ne ciblaient pas à détruire, mais à dégrader pour qu’elles ne soient pas utilisables temporairement, a défendu à la barre l’avocat des militants, Me Raffin. Les vingt-deux trottinettes ont été laissées sur place. Pas jetées dans la Saône ou volées. »

Ses clients ont été reconnus coupables par le tribunal judiciaire de Lyon de dégradation et détérioration de bien d’autrui commises en réunion, et condamné à des stages de citoyenneté. Au terme d’une seconde audience dédiée à l’indemnisation des victimes, les militants ont été condamnés lundi 26 septembre à verser 4 200 euros au prestataire allemand, dont ses frais d’avocats. Une surcharge financière qui n’est pas automatique, souligne Me Raffin, qui y devine la volonté « de marquer le coup sur le côté volontaire des dégradations ». L’auxiliaire de justice savoure néanmoins une peine clémente pour ses clients : « On ne peut pas encourager du désordre, mais je suis satisfait qu’ils n’aient qu’un montant très faible à payer. La juridiction a suivi notre raisonnement. On veut bien être condamné à rembourser la pièce dégradée et la main-d’œuvre. Elle n’a pas pris en compte ce qui coûtait le plus cher : l’indemnité d’immobilisation. Ça reste très raisonnable. La juridiction comprend la motivation des jeunes, mais ne laisse pas carte blanche. »

Alors que les alertes sur le front de l’environnement continuent en ce mois de septembre, nous avons un petit service à vous demander. Nous espérons que les derniers mois de 2023 comporteront de nombreuses avancées pour l’écologie. Quoi qu’il arrive, les journalistes de Reporterre seront là pour vous apporter des informations claires et indépendantes.

Les temps sont difficiles, et nous savons que tout le monde n’a pas la possibilité de payer pour de l’information. Mais nous sommes financés exclusivement par les dons de nos lectrices et lecteurs : nous dépendons de la générosité de celles et ceux qui peuvent se le permettre. Ce soutien vital signifie que des millions de personnes peuvent continuer à s’informer sur le péril environnemental, quelle que soit leur capacité à payer pour cela. Allez-vous nous soutenir cette année ?

Contrairement à beaucoup d’autres, Reporterre n’a pas de propriétaire milliardaire ni d’actionnaires : le média est à but non lucratif. De plus, nous ne diffusons aucune publicité. Ainsi, aucun intérêt financier ne peut influencer notre travail. Être libres de toute ingérence commerciale ou politique nous permet d’enquêter de façon indépendante. Personne ne modifie ce que nous publions, ou ne détourne notre attention de ce qui est le plus important.

Avec votre soutien, nous continuerons à rendre les articles de Reporterre ouverts et gratuits, pour que tout le monde puisse les lire. Ainsi, davantage de personnes peuvent prendre conscience de l’urgence environnementale qui pèse sur la population, et agir. Ensemble, nous pouvons exiger mieux des puissants, et lutter pour la démocratie.

Quel que soit le montant que vous donnez, votre soutien est essentiel pour nous permettre de continuer notre mission d’information pour les années à venir. Si vous le pouvez, choisissez un soutien mensuel, à partir de seulement 1€. Cela prend moins de deux minutes, et vous aurez chaque mois un impact fort en faveur d’un journalisme indépendant dédié à l’écologie. Merci.

Soutenir Reporterre

📨 S’abonner gratuitement aux lettres d’info

Abonnez-vous en moins d'une minute pour recevoir gratuitement par e-mail, au choix tous les jours ou toutes les semaines, une sélection des articles publiés par Reporterre.

S’abonner
Fermer Précedent Suivant

legende