En Inde, le climat déréglé provoque une forte inflation alimentaire

Le prix de la tomate a notamment quadruplé en Inde, et les exportations de riz non basmati ont été stoppées. (Photo d'illustration) - Pexels/CC/Yogendra Singh
Le prix de la tomate a notamment quadruplé en Inde, et les exportations de riz non basmati ont été stoppées. (Photo d'illustration) - Pexels/CC/Yogendra Singh
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Monde Agriculture ÉconomieUn mois d’août extrêmement sec, des inondations locales affaiblissant les récoltes de riz… En Inde, le prix de certains aliments a explosé. De quoi conduire le pays à réduire ses exportations.
Bangalore (Inde), correspondance
C’est un coup dur pour les agriculteurs et les consommateurs indiens. « En raison des inondations du mois de mars, mon blé a pourri et la production a chuté de 20 %, s’inquiète auprès de Reporterre Anand Kumar Singh, un agriculteur de l’État pauvre du Bihar, dans le nord-est de l’Inde. Et maintenant, à cause de pluies minimales ou inexistantes en juillet et en août, nous ne pouvons pas semer les plants de riz. Notre récolte va baisser de 30 %... » La situation de cet agriculteur, qui gère une ferme avec des travailleurs saisonniers, est celle de beaucoup de fermiers en Inde.
Confronté à des précipitations erratiques et imprévisibles cet été, le rythme des récoltes a été bouleversé. En juillet, seuls 23 millions d’hectares de riz, l’indispensable céréale pour nourrir le pays, ont été exploités au lieu de 40 millions en moyenne.
La période de mousson, de juin à août selon les latitudes, fournit les trois quarts des précipitations du pays. Cette année, elles sont 7 % moins importantes que la normale. Une moyenne qui cache, au cas par cas, des situations encore plus problématiques. Dans le nord-est de l’Inde, où Anand Kumar Singh est installé, il est tombé en réalité 8 % de plus, ce qui a empêché de planter. Dans le sud du pays, le déficit de précipitation est au contraire de 15 %.
Des prix qui explosent de 37 %
Ce mois d’août vient d’entrer dans l’histoire comme le plus sec enregistré depuis le début des mesures météorologiques en Inde, en 1901. Les experts pointent le rôle d’El Niño, ce réchauffement climatique de l’océan Pacifique qui affecte entre autres le sous-continent indien. « Son développement perturbe les vents, avec un impact négatif sur les précipitations de mousson observées en Inde », explique Mrutyunjay Mohapatra, directeur du Service météorologique indien (IMD).
En conséquence, les prix des céréales et des légumes explosent dans le pays, avec une hausse de 37 % par rapport à l’année précédente. Symbole de cette inflation alimentaire, la tomate, indispensable dans la cuisine pour beaucoup d’Indiens, voit son prix au kilo frôler les 150 roupies (environ 1,7 euro), soit quatre fois la norme. Des fast-foods tels que McDonald’s ou Subway ont dû retirer le fruit rouge de leurs sandwichs.
Du petit consommateur aux agriculteurs (45 % de la population active en Inde), la population indienne est sévèrement touchée. Alors qu’approchent les élections générales de 2024, le réchauffement climatique s’invite dans la campagne. Le gouvernement indien a très fortement restreint les exportations de riz blanc non basmati. Les taxes à l’exportation sur l’oignon, autre légume indispensable dans les currys indiens, ont été augmentées de 40 %.
Ces mesures qui visent à calmer l’inflation sur le marché intérieur provoquent des inquiétudes inverses sur les marchés internationaux. D’autant que l’Inde a déjà banni les exportations de blé en mai 2022. « Depuis que l’interdiction a été annoncée à la fin du mois dernier, les prix du riz thaïlandais ont augmenté de 20 % », a précisé à la BBC Joseph W. Glauber, chercheur à l’Institut international de recherche sur les politiques alimentaires (Ifpri). Des craintes qui seront sûrement abordées lors du sommet du G20 qui s’ouvre à New Delhi le 9 septembre.