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Luttes

En dix ans, plus de 1 700 activistes écolos ont été tués dans le monde

Des portraits de Berta Cáceres durant une manifestation en avril 2016. L'activiste écologiste a été tuée dans la nuit du 2 mars 2016, au Honduras.

Plus de 1 700 militants écologistes ont été tués entre 2012 et 2021, selon un nouveau rapport de Global Witness. Et seulement 0,9 % de ces crimes ont été résolus, alerte l’ONG.

Deux ou trois morts par semaine, un meurtre tous les deux jours environ pendant dix ans. Plus de 1 733 défenseurs de la terre et de l’environnement ont été tués entre 2012 et 2021, selon les chiffres du rapport 2022 de Global Witness. Assassinés par des tueurs à gages mandatés par des groupes criminels organisés ou leurs propres gouvernements. Tués par balles. Tabassés. Torturés parfois. Attaqués chez eux, devant leurs familles, ou endormis dans leur lit. Marchant sur un chemin ou conduisant leur voiture. Retrouvés abandonnés au bord d’une route, ou en morceaux dans une poubelle.

Les pays les plus meurtriers pour les militants écologistes sont le Brésil (342 meurtres), la Colombie (322), les Philippines (270), le Mexique (154) et le Honduras (117).

Comme l’écrit Vandana Shiva dans son introduction au rapport, « ces chiffres ne deviennent réels que lorsque l’on entend les noms de ceux qui sont morts. Marcelo Chaves Ferreira. Sidinei Floriano Da Silva. José Santos López. Chacun d’entre eux était une personne vivante, aimée par sa famille, ses amis, sa communauté. Jair Adán Roldán Morales. Efrén España. Eric Kibanja Bashekere sacrifié au nom du profit. Regilson Choc Cac. Ursa Bhima. Angel Rivas. Tous morts en défendant non seulement leurs propres territoires précieux, mais aussi la santé de la planète que nous partageons tous ». Cette année l’ONG publie donc aussi la liste intégrale (voir ci-dessous) des noms de ces activistes à l’avant-garde de la mobilisation qui voudrait protéger et préserver la nature nourricière.

De sombres records

C’est le 25 avril 2012, jour du meurtre de Chut Wutty, écologiste cambodgien qui enquêtait sur l’exploitation forestière illégale et travaillait avec Mike Davis, actuel directeur général de Global Witness, que l’ONG s’est lancée dans la publication annuelle de son rapport sur les assassinats des défenseurs de la terre et de l’environnement dans le monde. Global Witness compte les morts, enfin ceux qu’elle a réussi à repérer, car il y en a évidemment bien d’autres, trop pauvres et trop isolés pour que leurs vies, leurs combats et leurs morts soient connus.

Ces meurtres ont atteint le chiffre record de 227 en 2020, malgré la pandémie, et 200 en 2021. Avec plus de 40 % des meurtres contre les membres de peuples autochtones, qui ne représentent pourtant que 5 % de la population mondiale, la disproportion des agressions continue, au Mexique, en Colombie, au Nicaragua, au Pérou et aux Philippines. L’exploitation minière reste le secteur le plus meurtrier avec vingt-sept cas, la majorité des attaques ayant eu lieu au Mexique (15), aux Philippines (6), au Venezuela (4), au Nicaragua (1) et en Équateur (1).

94 % des crimes ne sont pas signalés

C’est toujours la même histoire, dit Global Witness : une entreprise avide d’exploiter, un système politique qui aliène les biens communs planétaires situés dans le pays au profit de quelques industriels et d’un réseau de connivences. Et ceux qui résistent, mains nues contre les bulldozers, ceux qui tentent de défendre leurs arbres, leur rivière, leur lac, leur terre, contre les agresseurs venus voler, polluer et accaparer, ceux qui se dressent contre les industriels corrupteurs et les politiciens achetés, ceux qui dérangent vraiment, grains de sable enrayant la machine, à ceux-là, les exploiteurs envoient leurs tueurs à gages.

Et l’impunité reste généralisée, plus de 94 % des crimes n’étant pas signalés et seulement 0,9 % étant résolus. Rares sont les condamnations.

La militante écologiste Joannah Stutchbury tente de défendre la forêt de Kiambu à Nairobi, au Kenya, contre un promoteur. Facebook/Joannah Stutchbury

En plus des meurtres, les activistes sont la cible de harcèlements de toutes sortes, fausses accusations, disparitions forcées, emprisonnement abusif et criminalisation. Les poursuites bâillons sont une des stratégies de plus en plus utilisées par les autorités pour entraver et délégitimer le travail des défenseurs aux yeux de leurs communautés. Le but de ce type de poursuites n’est pas de gagner, mais de créer un effet dissuasif et de les faire taire en les inondant de procédures judiciaires longues et coûteuses, et aussi de les obliger à transmettre à l’entreprise qui les attaque, des communications privées y compris de documents internes sur les campagnes de résistance en cours.

Le rapport de Global Witness appelle les gouvernements à voter des lois qui protègent efficacement les défenseurs de l’environnement et à responsabiliser pénalement les entreprises, afin de garantir une tolérance zéro en matière de violence contre les activistes.


Les défenseurs et défenseuses de l’environnement assassinés en 2021

Argentine
Elías Garay

Bolivie
Lino Peña Vaca

Brésil
Aldenir dos Santos Macedo
Alex Barros Santos da Silva
Amaral José Stoco Rodrigues
Amarildo Aparecido Rodrigues
Ângelo Venicius Henrique Mozer
Antônio Gonçalves Diniz
Eliseu Pedroso
F.S.S.
Fernando dos Santos Araújo
Getúlio Coutinho dos Santos
Isac Tembé
Jerlei
João de Deus Moreira Rodrigues
José do Carmo Corrêa Júnior
José Francisco de Souza Araújo
José Vane Guajajara
Kevin Fernando Holanda de Souza
Marcelo Chaves Ferreira
Maria da Luz Benício de Sousa
Maria José Rodrigues
Rafael Gasparini Tedesco
Reginaldo Alves Barros
Roberto Muniz Campista
Roberto Pereira da Silva Pandolfe
Sidinei Floriano Da Silva
Wagner Romão da Silva

Chili
Jordan Liempi Machacan
Colombia Ángel Miro Cartagena
Argenis Yatacué
Aura Esther García Peñalver
Cristian Torres Cifuentes
Danilo Torres
Dilio Bailarín
Edwin Antonio Indaburo
Efrén España
Fermiliano Meneses Hoyos
Fredy Pestana Herrera
Gonzalo Cardona Molina
Ilia Pilcué Yule
Jaime Enrique Basilio Basilio
Jair Adán Roldán Morales
Jhon Alberto Pascal
Jhon Edward Martinez
John Albeiro Paí Pascal
José Riascos
José Santos López
Juana Panesso Dumasá
Luis Alfonso Narváez Escobar
Marcelino Yatacué Ipia
Marcos Fidel Camayo Guetio
Nazaria Calambás Tunubalá
Noel Corsini Zúñiga
Rafael Domicó Carupia
Remberto Arrieta Bohórquez
Rogelio López Figueroa
Sandra Liliana Peña Chocué
Víctor Orlando Mosquera
Wilson de Jesús López
Yarley Margarito Salas
Yordan Eduardo Guetio

Republique Démocratique du Congo
Alexis Kamate Mundunaenda
Emery Bizimana Karabaranga
Eric Kibanja Bashekere
Etienne Mutazimiza Kanyaruchinya
Innocent Paluku Budoyi
Prince Nzabonimpa Ntamakiriro
Reagan Maneno Kataghalirwa
Surumwe Burhani Abdou

Équateur
Andrés Durazno
Nange Yeti
Víctor Enrique Guaillas Gutama

Gabon
Jean François Ndong Abaume

Guatemala
Alberto Tec Caal
Emilio Aguilar Jiménez
Ramón Jiménez
Regilson Choc Cac

Honduras
Celenia Bonilla
David Fernando Padilla
Juan Carlos Cerros Escalante
Juan Manuel Moncada
Martín Abad Pandy
Nelson García
Óscar Javier Pérez
Víctor Martínez

Inde
Kawasi Waga
Daljeet Singh
Gurvinder Singh
Lavepreet Singh
Maynal Haque
Nakshatra Singh
Saddam Husaain
Sheikh Farid
Stan Swamy
T Shridhar
Uika Pandu
Ursa Bhima
Venkatesh S
Vipin Agarwal

Kenya
Joannah Stutchbury

Mexique
Alejandro García Zagal
Artemio Arballo Canizalez
Benjamín Pórtela Peralta
Braulio Pérez Sol
Carlos Marqués Oyorzábal
David Díaz Valdez
Donato Bautista Avendaño
Fabián Sombra Miranda
Fabián Valencia Romero
Federico de Jesús Gutiérrez
Fidel Heras Cruz
Flor de Jesús Hernández
Gerardo Mendoza Reyes
Gustavo Acosta Hurtado
Heladio Molina Zavala
Irma Galindo Barrios
Isaías Elacio Palma
Isidoro Hernández
Jacinto Hernández Quiroz
Jaime Jiménez Ruiz
Jesús Solórzano Díaz
Jordán Terjiño Luna
José Ascensión Carrillo Vázquez
José de Jesús Robledo Cruz
José de Jesús Sánchez García
José Santos Isaac Chávez
Juan Justino Galaviz Cruz
Lea Juárez Valenzuela
Leobardo Hernández Regino
Leocadio Galaviz Cruz
Luis Urbano Domínguez Mendoza
Manuel Cartas Pérez
Manuel Hidalgo Vázquez
Marcelino Álvarez González
Marco Antonio Arcos Fuentes
Marco Antonio Jiménez de la Torre
Marcos Quiroz Riaño
María de Jesús Gómez Vega
Martín Hurtado Flores
Mayolo Quiroz Barrios
Miguel Bautista Avendaño
Narciso López Vasquez
Noé Robles Cruz
Oliverio Martínez Merino
Pedro Lunez Pérez
Ramiro Rodríguez Santiz
Ramiro Ventura Apolonio
Raymundo Robles Riaño
Rodrigo Morales Vázquez
Rolando Pérez González
Simón Pedro Pérez López
Tomás Rojo Valencia
Vicente Suástegui Muñoz
Víctor Manuel Vázquez de la Torre

Nicaragua
Albert Jairo Hernández Palacio
Armando Pérez Medina
Armando Suarez Matamoros
Bonifacio Dixon Francis
Borlan Gutiérrez Empra
Dolvin Acosta
J.L.P. or J.R.B
Jaoska Jarquín Gutiérrez
Kedelin Jarquín Gutiérrez
Martiniano Julián Macario Samuel
Morgan Pantin
Ody James Waldan Salgado
Romel Simon Kely
Sixto Gutiérrez Empra
Víctor Manuel Matamoros Morales

Pérou
Estela Casanto Mauricio
Herasmo García Grau
Lucio Pascual Yumanga
Luis Tapia Meza
Mario Marco López Huanca
Santiago Meléndez Dávila
Yenes Ríos Bonsano

Philippines
Abner Esto
Ana Marie Lemita-Evangelista
Angel Rivas
Antonio « Cano » Arellano
Ariel Evangelista
Edward Esto
Emanuel Asuncion
John Heredia
Joseph Canlas
Juan Macababbad
Julie Catamin
Lenie Rivas
Mark Lee Bacasno
Melvin Dasigao
Puroy Dela Cruz
Randy Dela Cruz
Romeo Loyola Torres
Steve Abua
Willy Rodriguez

Venezuela
Carmen Lusdary Rondón
Miguel Antonio Rivas Morales
Nelson Martín Pérez Rodríguez
Wilmer José Castro

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