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Alimentation

Encore de beaux jours pour le plastique au rayon des fruits et légumes

L’interdiction des emballages plastiques entrera en vigueur le 1er juillet. Mais elle ne concernera pas tous les fruits et légumes et les producteurs pourront continuer à écouler leurs stocks d’emballages pendant six mois.

Et de trois ! Le gouvernement vient de publier une nouvelle version du décret interdisant les emballages en plastique pour les fruits et légumes. Le premier texte entré en vigueur le 1er janvier 2022 avait été retoqué par le Conseil d’État en décembre dernier tandis qu’un second projet est toujours bloqué à Bruxelles.

Si le nouveau texte interdit à nouveau ces emballages à compter du 1er juillet prochain, il exempte de façon permanente vingt-neuf produits « présentant un risque de détérioration à la vente en vrac ». On continuera donc à trouver du plastique autour des fruits rouges comme les cerises, framboises, mûres ou groseilles ; les fruits mûrs à point « c’est-à-dire les fruits vendus au consommateur final à pleine maturité » et qui l’affichent sur leur emballage ; mais aussi des légumes plus courants comme la salade, la mâche ou les épinards.

Les fraises et cerises exemptées, les brocolis aussi...

Parmi ces légumes, certains ne semblent pas particulièrement fragiles. C’est le cas des endives, asperges, brocolis, champignons… « Près d’un tiers des champignons (32 %) et 15 à 20 % des endives sont déjà vendus en vrac », remarque Alice Elfassi, responsable des affaires juridiques de Zero Waste France. L’association ne cache pas sa déception quant au contenu de ce texte « qui va à l’encontre des attentes des citoyennes et citoyens et de l’urgence environnementale ». Pour elle, l’interdiction est en partie vidée de sa substance avec cette liste d’exceptions définitives qui vont donc faire « perdurer une surproduction de déchets plastiques inutiles sans date de fin ».

Zero Waste estime que les industriels de la plasturgie — qui avaient attaqué le premier décret devant le Conseil d’État — sont les grands vainqueurs. « Dès les travaux préparatoires pour ce décret, nous avons assisté à une levée de boucliers des lobbies. » L’Alliance Plasturgie et Composites du futur, qui rassemble les fabricants de plastique, n’a pas encore réagi à la publication du nouveau décret.

Des producteurs estiment être face à une impasse technique

Autre limite du texte : même s’il entrera en vigueur ce 1er juillet, il laisse six mois aux distributeurs et producteurs pour écouler leurs stocks d’emballages. Enfin, il tranche sur la question des élastiques en plastique ou caoutchouc souvent utilisés pour tenir les radis, les carottes ou encore les herbes aromatiques : ils pourront continuer à être utilisés. Il ne s’agit pas d’un emballage, selon le gouvernement.

De son côté, la filière des fruits et légumes, représentée par Interfel, assure qu’elle ne s’opposera pas à ce nouveau texte, moins restrictif pour les producteurs que les précédents. Pour Fabien Gaucher, responsable des affaires juridiques de l’interprofession, ce décret ne règle pour autant pas toutes les difficultés. Selon lui, beaucoup de producteurs se retrouvent dans une impasse technique, sans réelle alternative. Il cite l’exemple des raisins, qui vont devoir se passer de plastique. Or, c’est un fruit gorgé d’eau qui nécessite un emballage résistant à l’humidité, explique-t-il. Le film en plastique tel qu’il est utilisé aujourd’hui permet aussi, selon lui, « de voir le produit » et « d’éviter le grignotage » dans les rayons des magasins. Une barquette tout en carton ne répondrait pas à ces contraintes.

Enfin, une incertitude demeure sur la légalité de ce décret. « C’est une forme de passage en force », estime Fabien Gaucher. En effet, le gouvernement a décidé de publier un nouveau décret alors que le projet de texte précédent, qu’il avait notifié à la Commission européenne, est encore bloqué. Le gouvernement aurait-il dû notifier ce nouveau texte à la Commission ? Cette incertitude juridique pourrait bien provoquer des rebondissements.

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