Le gouvernement impose à l’Assemblée de soutenir l’huile de palme importée par Total

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Dans la nuit de jeudi 18 octobre à vendredi, l’Assemblée nationale a maintenu un avantage fiscal pour les biocarburants à base d’huile de palme, le gouvernement étant défavorable à cet amendement adopté en commission.
Le ministre Gerald Darmanin a justifié son refus par « une question sociale » et le sort « de plus de 300 ouvriers » de la bioraffinerie Total de La Mède « qui si vous adoptez cet amendement n’auront plus de travail ».
Le ministre a aussi mis en avant le fait que la mesure serait « contraire aux règles de l’OMC » et tombe alors que le Parlement européen prévoit l’interdiction de l’huile de palme pour les biocarburants d’ici 2030.
Avant le rejet des amendements à main levée, des députés de tous bords ont insisté sur le bien-fondé de la disposition et critiqué les « largesses » du gouvernement envers Total.
Bruno Millienne (MoDem) a notamment dit avoir « un peu de mal à concevoir qu’on va donner finalement à Total la primeur par rapport à nos filières françaises », tandis que François-Michel Lambert, ex-LREM membre du nouveau groupe « Libertés et Territoires », a dénoncé « des largesses extraordinaires » pour l’entreprise, Lise Magnier (UDI-Agir) se disant « un peu interloquée ».
« Ce que je ne comprends pas c’est qu’au nom de Total (...) on sacrifie toute la filière betterave-sucre », a aussi déploré Jean-Louis Bricout (PS), tandis que Mathilde Panot (LFI) a déploré que l’économie prenne le pas « sur l’intérêt général humain ».

La position du gouvernement est par ailleurs contraire à ses propres engagements : dans le Plan climat annoncé par Nicolas Hulot en juillet 2017, l’axe 15 prévoyait « la fin de l’importation en France de produits contribuant à la déforestation ».
Le gouvernement enfreint aussi un Objectif d’Aichi sur la biodiversité, pourtant signé en 2010 et ratifié par la France : l’objectif 3 prévoit la disparition des incitations fiscales néfastes pour la diversité écologique.
Greenpeace a réagi à cette décision dans un communiqué : « Quelques semaines après la publication du dernier rapport du GIEC, qui pointe l’importance cruciale des forêts tropicales pour la préservation du climat, cette décision dépasse l’entendement. (...) Le bilan de presque un an de travail gouvernemental contre la déforestation importée en France se résume donc pour l’instant à la seule ouverture du site de la Mède qui va augmenter les importations françaises d’huile de palme de près de 64 %. Que l’Elysée, par la voix de Gérald Darmanin, invoque les intérêts du site de la Mède pour justifier le rejet de l’amendement prouve que ce n’est pas Emmanuel Macron qui gouverne la politique industrielle de ce pays, mais des grands groupes sans scrupules, comme Total. (...) Il devient désormais impossible d’accorder une quelconque crédibilité à la parole gouvernementale sur l’environnement. »
- Sources : Reporterre avec
. 20 minutes
. Greenpeace
- Photo : Forêt incendiée en Indonésie pour laisser place à des plantations d’huile de palme (Greenpeace, 2013).
- Lire aussi : Pour vendre des Rafale à la Malaisie, la France autorise l’huile de palme dans le carburant
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