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« Le nucléaire me fait très peur » : ces militants qui s’opposent aux nouveaux réacteurs

À Tours, le 16 février 2023.

Les opposants au nucléaire ont manifesté à Tours le 16 février. Entre un débat public qui tourne à la mauvaise farce et le défi de la transmission entre les générations, le mouvement se pose la question de ses modes d’action.

Tours (Indre-et-Loire), reportage

« Ça prend du temps de passer de la prise de conscience à l’engagement. » À 37 ans, Claire s’est investie « petit à petit » dans la lutte antinucléaire jusqu’à participer à son premier rassemblement jeudi, à Tours. « J’ai une formation d’ingénierie, donc j’ai été formée pour croire que le nucléaire était la bonne solution », raconte-t-elle.

Des rencontres sur la lutte féministe à Bure — où un centre d’enfouissement des déchets radioactifs est en projet — puis une projection du film du Comité Centrales, Notre Terre mourra proprement, l’ont conduite vers le réseau Sortir du nucléaire (SDN) Touraine, présent jeudi.

Des associations et collectifs venus de partout en France ont manifesté dans les rues de Tours contre la relance du nucléaire civil et militaire. © Fanny Lancelin / Reporterre

À l’origine, la date de la mobilisation devait coïncider avec la réunion de la Commission nationale du débat public (CNDP), organisée dans le cadre de la concertation sur la construction de six nouveaux réacteurs EPR.

Un débat ignoré par le gouvernement qui, sans attendre les résultats des échanges, a lancé un projet de loi pour accélérer les procédures liées aux nouvelles installations. Un véritable camouflet pour la CNDP qui a décidé d’annuler la réunion à Tours et de réorienter son débat. Les militants venus de partout en France ont toutefois décidé de maintenir leur manifestation dans les rues de Tours.

« Le nucléaire me fait très peur »

Sur place, Julien, 21 ans, ne nourrissait « aucun espoir » quant à ce débat public. Son engagement, il le vit depuis quelques mois à La Hague, au sein du collectif Piscine Nucléaire Stop : « Le nucléaire me fait très peur, à cause du risque d’accident, de la pollution de l’eau et visuelle. Chez nous, où que tu regardes, tu vois un grand site de retraitement des déchets s’étendre et l’EPR de Flamanville. Alors, accepter une structure nucléaire supplémentaire, ce n’est vraiment pas possible ! »

Il participe à l’organisation de réunions d’information et à la préparation d’un grand carnaval antinucléaire le vendredi 3 mars. « C’est important de créer des moments de vie autour de tout ça. »

Le nucléaire, comme la lutte de ceux qui s’y opposent, pose la question du lien entre les générations. © Fanny Lancelin / Reporterre

La forme que doivent prendre les actions pour susciter les engagements est aujourd’hui une question cruciale. « Je pense que les jeunes militants ne se font aucune illusion sur le gouvernement ou les institutions, souligne Claire. C’est sûrement pour ça que les luttes d’occupation comme sur la zad de Notre-Dame-des-Landes ou contre les mégabassines attirent davantage. »

Pour Mathilde, 25 ans, toute jeune chargée de campagne du Réseau SDN, le recrutement passe par des formations pour lever les freins liés à un sujet qui peut paraître trop technique mais aussi « pour discuter en profondeur des différentes approches possibles : éthique, philosophique, scientifique… » Elles peuvent être dispensées « sur des festivals, au sein d’associations de jeunes écologistes ou auprès d’élus ».

Transmission

Sa collègue coordinatrice du Réseau, Camila, 30 ans, insiste aussi sur l’importance du lien entre les générations : « Comment le bagage des anciens peut-il être transmis aux jeunes ? » Des tentatives existent déjà : le Comité Centrales — dont le film retrace les luttes victorieuses des années 1970 à nos jours — entame une nouvelle collecte de témoignages et incite les « vieux fourneaux » à déposer les traces de leur combat dans des services d’archives publiques.

En mars, le collectif Stop Bure en Retz et un ensemble de collectifs organisent un « Vélo-Castor » en Loire pour sensibiliser au transport de matières radioactives, dont une journée — le samedi 18 mars — sera consacrée au lien entre luttes passées et à venir.

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