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Présidentielle

Le rapport du Giec ? Les candidats à la présidence s’en fichent

Le prochain président de la République aura un rôle majeur : il reste seulement trois ans pour espérer limiter le réchauffement climatique à 1,5 °C, révèle le Giec. Pourtant, la plupart des candidats sont indifférents à la publication de son dernier rapport.

À seulement six jours de l’élection présidentielle, c’est un rapport choc qui devrait bousculer la campagne. Hélas, une fois de plus, il reste dans l’ombre.

Le troisième volet du dernier rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec) a été publié lundi 4 avril, et fait un constat alarmant : il nous reste moins de trois ans pour inverser la courbe des émissions de gaz à effet de serre, et espérer limiter le réchauffement climatique à 1,5 °C en 2050 — l’objectif de l’Accord de Paris, signé en 2015.

Passée cette échéance de 2025, les émissions devront obligatoirement diminuer d’au moins 43 % d’ici 2030, sans quoi le seuil de 1,5 °C sera atteint, laissant ensuite craindre le risque d’un emballement climatique.

Trois ans. Cela signifie donc que le prochain quinquennat sera décisif pour l’avenir du climat et de l’humanité. Pourtant, parmi les douze candidats à l’élection présidentielle, seule la moitié a réagi à la publication de ce rapport — qui compile l’intégralité des connaissances scientifiques sur le changement climatique.

Une poignée de réactions politiques

« Ouvrons les yeux. Agissons. Nous avons trois ans pour garder une planète vivable. Nous ne pouvons perdre cinq ans de plus », a twitté le candidat d’Europe Écologie–Les Verts, Yannick Jadot. Invité sur le plateau du 20 heures de TF1 le 4 avril, il a évoqué en direct la publication du rapport, avant de dérouler sa proposition d’instaurer une « règle d’or climatique » (pas d’argent public pour les « projets climaticides »).

Au même moment, invitée sur France 2, la candidate socialiste Anne Hidalgo a mentionné le rapport du Giec après avoir décliné son programme pour les jeunes. « Penser à l’avenir de la jeunesse, c’est aussi s’engager résolument sur la question énergétique (…), c’est à la fois leur situation et la question climatique qu’il faut traiter de façon déterminée », a-t-elle affirmé.

« La planète brûle et nous n’éteindrons pas l’incendie avec des sauts d’eau (sic), a déclaré de son côté le communiste Fabien Roussel, sur Twitter. Sortir des énergies fossiles avec un mix nucléaire/renouvelable, investir dans le logement, les transports publics, l’alimentation, y mettre 6 % du PIB, c’est ça l’urgence ! »

Interrogé sur la sortie du rapport sur Sud Radio, Jean-Luc Mélenchon (La France insoumise) a réaffirmé qu’il voulait « faire monter en puissance les énergies alternatives et arrêter au fur et à mesure les centrales nucléaires ».

Parmi les autres candidats de gauche, à l’heure où nous écrivons ces lignes (mardi 5 avril, à 9 heures), ni Philippe Poutou (Nouveau Parti anticapitaliste) ni Nathalie Arthaud (Lutte ouvrière) n’avaient réagi à la publication de ce rapport.

Davantage de visibilité dans les médias

Même constat de l’autre côté de l’échiquier politique. Le président-candidat Emmanuel Macron, qui se vante dans son programme que « jamais autant n’a été fait pour l’environnement » depuis 2017, n’a pourtant pas eu un seul mot pour qualifier ce nouveau rapport. Pareil pour les autres candidats de droite : que ce soit Valérie Pécresse (Les Républicains), Jean Lassalle (Résistons !) ou Nicolas Dupont-Aignan (Debout la France) : pas un ne s’est exprimé publiquement sur le sujet.

À l’extrême droite, Éric Zemmour (Reconquête) a été forcé de réagir à la publication, le 4 avril, interrogé par les journalistes du 20 heures de TF1 sur cette question. Le candidat a répondu que les principales mesures à mener pour lutter contre les émissions de gaz à effet de serre étaient la relocalisation de l’industrie, la relance du nucléaire et l’arrêt des éoliennes. Le développement des énergies renouvelables est pourtant une des solutions mises en avant par le Giec lui-même pour limiter le changement climatique.

Le 5 avril, interrogée par une auditrice sur France Inter, Marine Le Pen (Rassemblement national) a affirmé qu’elle avait bien lu le rapport. « Je suis absolument d’accord sur la stratégie qui consiste à baisser les émissions carbone, mais je n’ai pas les mêmes moyens que le Giec, a-t-elle précisé. Moi, je crois que c’est grâce au nucléaire et à l’hydrogène que nous réussirons à décarboner totalement notre énergie. »

Si les médias ont donné plus de visibilité à ce troisième volet du rapport qu’aux précédents — les journaux télévisés de TF1 n’avaient même pas évoqué la sortie du deuxième volet, par exemple — rien n’a changé du côté des politiques. Le climat et la biodiversité sont toujours des sujets marginaux pour la plupart des candidats. Ce qui ne laisse rien augurer de bon pour les trois années décisives à venir.

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