Les records de températures s’accumulent, sur terre comme en mer

Le monde vient de connaître son début juin le plus chaud jamais enregistré. Ici à Calcutta, ville de l'Est de l'Inde. - © Sudipta Das / NurPhoto via AFP
Le monde vient de connaître son début juin le plus chaud jamais enregistré. Ici à Calcutta, ville de l'Est de l'Inde. - © Sudipta Das / NurPhoto via AFP
Durée de lecture : 6 minutes
Climat MondeDe la Chine au Mexique en passant par l’Inde et l’Algérie, les records de températures tombent les uns après les autres en ce mois de juin. Même les océans surchauffent.
Le monde est entré dans la fournaise. Les observations de ces dernières semaines ne laissent plus de place au doute : la planète se réchauffe. En cette mi-juin, l’enchaînement des records de chaleur est frappant, tout comme le fait qu’aucun continent ne soit épargné — y compris les zones sous-marines.
« Le monde vient de connaître son début juin le plus chaud jamais enregistré, après un mois de mai qui était seulement 0,1 °C plus frais que le record », expliquait Samantha Burgess, directrice adjointe du Copernicus Climate Change service (C3S), le 15 juin dernier. Un rapport du service européen montre que la température moyenne mondiale a dépassé de plus de 1,5 °C la température préindustrielle pendant quelques jours de juin. Le phénomène El Niño – qui a officiellement commencé selon l’Agence américaine d’observation océanique et atmosphérique (NOAA) – participe à cette situation hors norme.
« Une chaleur folle » même à haute altitude
En Inde, la canicule s’est installée depuis le 15 juin dans deux États les plus peuplés du pays. Elle a déjà tué près de cent personnes dans l’Uttar Pradesh et le Bihar. Le 18 juin, la température a atteint 42,2 °C dans la ville de Ballia, dépassant de 4,7 °C la normale saisonnière. Une chaleur amplifiée par un taux d’humidité de 25 %. « Cela ne s’est jamais produit à Ballia, rapporte un habitant de cette ville d’Uttar Pradesh auprès de Associated Press. Je n’ai jamais vu autant de gens mourir à cause de la chaleur. Les gens ont peur de sortir. Les routes et les marchés sont en grande partie déserts. »
Le climatologue Maximiliano Herrera, qui publie chaque jour sur son compte Twitter les records de températures à travers le monde, ne chôme pas. Le 19 juin, il alerte sur une vague de chaleur en Asie Centrale. La carte qu’il publie, constellée de rouge foncé, fait froid dans le dos : ce jour-là, il a fait 48,7 °C en Iran, avec « une chaleur folle à haute altitude ». Ainsi, 46,7 °C ont été relevés à Tabas, ville située à 710 mètres et, deux jours plus tôt, 46,4 °C à Khor, à 921 mètres d’altitude.

L’altitude ne change pas la donne non plus en Mongolie, où les 40 °C pourraient être atteints au-dessus de 1 000 mètres dans les prochains jours. Le 19 juin fut aussi la journée des records dans la péninsule coréenne : « Les plus importants records de chaleur de l’histoire climatique du mois de juin ont été établis à Chunggang en Corée du Nord avec 36,6 °C et à Jeogeup en Corée du Sud avec 34,9 °C. » En Chine, dans la province de Xinjiang, on a approché les 45 °C. « L’air chaud devrait atteindre la capitale, Pékin, où les températures devraient grimper jusqu’à 40 °C », anticipe Maximiliano Herrera.
Les vagues de chaleur en plein été ne sont pas inhabituelles en Chine, en particulier dans l’ouest et le sud du pays, mais cette année, la chaleur est plus précoce. Et fait surtout suite à plusieurs épisodes extrêmes. En janvier, un record de froid de -53 °C avait été battu à Mohe, à la frontière avec la Russie. En Russie justement, le thermomètre grimpe dangereusement aussi. La Sibérie a ainsi vécu ses heures les plus chaudes au début du mois de juin. Le 7 juin, on relevait par exemple plus de 40,1 °C à Kljuci, une ville du Kamtchatka ou encore 39,5 °C à Rubcovsk, dans l’Altaï.
Des milliers d’oiseaux morts de faim sur les côtes du Pacifique
Plus près de chez nous, l’Algérie suffoque depuis le week-end dernier. Dans certaines régions de l’est et du centre du pays, les températures ont atteint 44 °C. En mai, ces mêmes régions ont connu des pluies torrentielles. Dans la partie sud de l’Afrique, le 18 juin, la station météo de Pamandzi, à Mayotte, a battu son record mensuel pour un mois de juin avec 31,7 °C, relève le prévisionniste de Météo France Étienne Kapikian.
De l’autre côté de l’océan Atlantique, la situation est tout aussi critique. Au nord, le Canada est frappé par les pires mégafeux de son histoire, tandis qu’en Amérique latine, Mexico étouffe sous l’effet de la chaleur et de la pollution. C’est le troisième épisode caniculaire que subit le Mexique depuis le début de l’année. Huit personnes sont mortes. La faune est aussi touchée.

Des milliers d’oiseaux, notamment des puffins fuligineux, ont échoué sur les côtes du pays. Le même phénomène a été constaté au Pérou et au Chili, début juin. Les autorités mexicaines expliquent que ces morts massives sont très probablement la conséquence d’un réchauffement des eaux de l’océan Pacifique à cause d’El Niño. Selon elles, les eaux de surface étant plus chaudes, les poissons descendent plus profondément, ce qui prive les oiseaux de nourriture.
Une « canicule marine » extrême autour de l’Écosse
Si le Pacifique est en surchauffe, l’Atlantique Nord n’est pas en reste. Le 18 juin, il atteignait la température de 23,05 °C, soit 1,22 °C de plus que les normales, détaille l’agroclimatologue Serge Zaka. « Il n’y a aucun précédent en juin. De très loin », souligne-t-il dans un tweet, graphique à l’appui. On parle de « canicule marine ». La NOAA l’a classée en catégorie extrême (catégorie 5) autour de l’Écosse.
Les scientifiques redoutent que les records ne continuent à être dépassés au cours des prochains mois. « D’ici l’automne, avec l’installation de El Niño, la température moyenne terrestre devrait peu à peu s’éloigner de la norme, estime Serge Zaka. Si bien que les modèles saisonniers proposent des cartes lunaires où il n’y a plus aucune compensation : 90 % de la Terre est au-dessus des normes ! »