Nouveaux OGM : la Commission européenne veut assouplir les règles

Les nouveaux OGM (ici un champ de colza), un pas de plus vers la généralisation d’espèces standardisées. - Pxhere/CC0
Les nouveaux OGM (ici un champ de colza), un pas de plus vers la généralisation d’espèces standardisées. - Pxhere/CC0
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AgricultureLa Commission européenne a proposé, mercredi 5 juillet, une révision de la directive européenne sur les OGM. L’objectif serait de permettre aux plantes modifiées à l’aide des nouvelles technologies génomiques (dites NGT, pour New genomic techniques ou NBT pour New breeding techniques) d’échapper à la réglementation actuelle encadrant les organismes génétiquement modifiés.
Ces NGT, qualifiés de « nouveaux OGM » par leurs détracteurs, sont obtenus par édition directe du génome : grâce à de nouveaux outils moléculaires à la précision inédite, dont le plus connu et performant sont les « ciseaux moléculaires » CRISPR-Cas9, on peut désactiver, supprimer ou ajouter un gène directement au sein de l’ADN d’une cellule.
Comme Reporterre l’écrivait dans cet article « De la mutagenèse aux “ciseaux génétiques”, une petite histoire des OGM », les « nouveaux OGM » ne sont pas des OGM classiques, obtenus par transgenèse, au sens où aucun gène étranger n’est introduit dans la cellule. « En réalité, nuançait Emmanuel Guiderdoni, chercheur au Cirad, un organisme français de recherche agronomique, c’est un peu plus compliqué : on passe par une étape avec un transgène lorsqu’on met en œuvre cette technique. Mais ensuite ce transgène est éliminé – et donc la plante “éditée” ne contient plus de gène étranger à l’arrivée. »
Certains experts s’inquiètent de la persistance d’un risque de « contamination » par de l’ADN d’organismes tiers, utilisés lors d’étapes intermédiaires dans le processus d’édition génique.
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Or, la réglementation actuelle, datant de 2001, impose à cette nouvelle méthode non traditionnelle de modification génétique les mêmes procédures et régulations que pour les OGM classiques, avec un processus d’autorisation, de traçabilité et d’étiquetage spécifique. La Commission veut permettre aux NGT d’être considérés de la même manière que les sélections variétales classiques, arguant que la manipulation serait comparable à une variation génétique se produisant dans la nature, puisqu’il n’y a plus d’échange de gène interespèces.
Deux catégories de NGT
La Commission suggère de séparer les NGT en deux catégories. Ceux qui ne comportent pas beaucoup de modifications génétiques et « qui pourraient apparaître naturellement ou être produits par la sélection conventionnelle », qui pourraient ainsi être considérés comme « équivalents aux produits conventionnels », tandis que les autres resteraient soumis à une législation similaire aux OGM. Les NGT qui auraient pour caractéristiques d’être rendus « tolérants aux herbicides » resteraient également soumis à une régulation OGM.
C’est une des craintes des ONG environnementales qui s’opposent à la dérégulation des NGT : que les multinationales de l’agro-industrie multiplient les brevetages sur les semences issues de cette technique et les utilisent, à l’instar des OGM, en synergie avec leurs pesticides. Dans une lettre adressée en 2021 à la Commission, une coalition d’ONG et d’organisations agricoles s’inquiétait également des risques d’effets incontrôlés « hors cible », c’est-à-dire perturbant l’organisme en dehors des gènes volontairement modifiés. Cela remet en cause les arguments de l’industrie, qui promet que ces NGT serviront à adapter l’agriculture au changement climatique tout en réduisant l’usage d’intrants chimiques, ce qui n’a de fait pas été le cas avec les OGM.
La proposition de la Commission devra encore être étudiée par les États membres, qui devront trouver une position commune, ainsi que par le Parlement européen, dans les mois à venir.