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Climat : de COP en COP

Climat : Trump sort les Etats-Unis de l’accord de Paris

Le président des États-Unis a annoncé jeudi 1 juin que les Etats-Unis se retiraient de l’accord de Paris sur le climat.

-  Actualisation - Jeudi 1 juin, 23h40 - Le président Donald Trump a annoncé jeudi une sortie des Etats-Unis de l’accord de Paris sur le climat.

« Afin de remplir mon devoir solennel de protection de l’Amérique et de ses citoyens, les Etats-Unis se retireront de l’accord de Paris sur le climat », a annoncé Donald Trump depuis la roseraie de la Maison Blanche, sous les applaudissements.

« J’ai été élu pour représenter les citoyens de Pittsburgh, pas ceux de Paris », a-t-il dit.

Il a martelé qu’il ne « voulait rien qui puisse se mettre en travers » de son action pour redresser l’économie de la première puissance mondiale.

Le président républicain a aussi assuré que son pays était prêt à négocier un nouvel accord climat.

Voir la video du discours de M. Trump, en anglais



Adopté le 12 décembre 2015 par 195 pays dans le cadre de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (Ccnucc), l’accord de Paris sur le climat vise à contenir le réchauffement climatique « nettement en dessous de 2 °C par rapport aux niveaux préindustriels » (article 2). Remportant son bras de fer avec un Congrès à majorité républicaine et climatosceptique, l’ancien président des États-Unis Barack Obama était parvenu à signer l’accord de Paris le 22 avril 2016 et à ce qu’il soit ratifié le 3 septembre 2016. Par ailleurs, l’Accord de Paris prévoit que chaque pays détaille des objectifs ambitieux de réduction d’émissions de gaz à effet de serre ainsi que la politique qu’il entend mener pour y parvenir dans une « contribution déterminée au niveau national ». Dévoilée le 31 mars 2015, la feuille de route des États-Unis les engage à une baisse de 26 à 28 % des émissions d’ici à 2025 par rapport à 2005.

Mais depuis son investiture à la présidence des États-Unis, le 20 janvier 2017, M. Trump cherche à détricoter les mesures de lutte contre le changement climatique adoptées par son prédécesseur. Le 24 janvier, le nouveau chef d’État, ouvertement climatosceptique, relançait deux projets d’oléoducs bloqués par l’administration Obama. Le 28 mars, il signait un « décret sur l’indépendance énergétique » remettant en cause le « Clean Power Plan » (plan pour une énergie propre) de M. Obama, lequel imposait notamment la fermeture des centrales à charbon les plus anciennes et les plus polluantes.

Jean-Claude Juncker, le président de la Commission européenne, Donald Trump, celui des États-Unis, et Donald Tusk, celui du Conseil européen, le 25 mai, à Bruxelles.

M. Trump a aussi pesé de tout son poids pour éviter ou minimiser les références au changement climatique dans les déclarations issues du G7 énergie le 10 avril et du G20, du Fonds monétaire international (FMI) et de la Banque mondiale le 22 avril, au motif que les États-Unis n’avaient pas encore « révisé leur position ». Même posture attentiste lors de la session de négociations intermédiaire sur le climat, du 8 au 18 mai à Bonn. Au G7, les 26 et 27 mai à Taormine, les États-Unis ont une nouvelle fois indiqué qu’ils étaient « en train de réévaluer leur politique sur le changement climatique et [n’étaient] donc pas en mesure de rejoindre le consensus sur ce sujet ».

Retrait idéologique ou maintien pragmatique ?

Si des rumeurs persistantes tablent sur une sortie imminente de l’accord, il reste difficile d’anticiper quelle sera la décision de M. Trump. « Les seules raisons pour lesquelles il pourrait sortir de l’accord sont idéologiques, estime David Levaï, directeur du programme climat à l’Institut pour le développement durable et les relations internationales (Iddri). Il s’agirait de respecter une promesse de campagne et de satisfaire ses soutiens et ses électeurs qui ne croient pas au système onusien, rejettent le multilatéralisme et trouvent les exigences de l’Accord de Paris trop élevées. Mais de nombreuses voix s’élèvent, notamment du secteur privé, pour défendre un point de vue plus pragmatique. Elles craignent les conséquences d’un retrait de l’accord : manque de compétitivité dans le secteur des énergies renouvelables, perte de parts de marché, rétorsions et sanctions commerciales. C’est le cas de Darren Woods, le directeur général du pétrolier Exxon Mobil, qui a plaidé pour que Donald Trump reste dans l’accord dans le Financial Timesdu 26 mai. »

Cette division se retrouve jusque dans son entourage. Ainsi, Rex Tillerson, ministre des Affaires étrangères, Rick Perry, secrétaire à l’Énergie, Ivanka Trump, la fille de Donald Trump, et son mari, Jared Kushner, tous deux conseillers du président, seraient favorables à un maintien dans l’Accord de Paris assorti d’une renégociation. Mais son conseiller Steve Bannon et Scott Pruitt, qui va jusqu’à nier le rôle des émissions de dioxyde de carbone dans le changement climatique, y sont opposés.

Sortie ou maintien ? Dans quelles conditions ?

Trois options sont sur la table. Première possibilité, les États-Unis quittent l’Accord de Paris. Reste à savoir comment. « Il n’est pas possible de sortir de l’accord dans les trois années qui suivent son entrée en vigueur et la procédure de sortie dure un an. Il pourrait ne rien se passer jusqu’à la fin du premier mandat de Donald Trump, souligne David Levaï. Ou alors, plus rapide, l’administration pourrait présenter l’Accord de Paris au Congrès pour que ce dernier refuse de le ratifier. Trump pourrait aussi carrément décider d’une sortie de la Ccnucc, ce qui ne prendrait qu’un an. Ce serait terrible, puisque cela exclurait les États-Unis de toute discussion multilatérale sur le climat et le pays ne serait plus contraint de mesurer ses émissions de gaz à effet de serre ni de les communiquer aux autres pays. »

Deuxième possibilité, les États-Unis se maintiennent dans l’accord, mais cherchent à renégocier leur contribution avec des objectifs en baisse. Pour Célia Gautier, du Réseau action climat (Rac), cette option n’est pas souhaitable. « Le fait de reconnaître la possibilité d’annoncer une contribution à la baisse est une ligne rouge. Cela laisse entendre que d’autres pays pourraient faire la même chose et va à l’encontre du principe de hausse de l’ambition inscrit dans le texte. » Troisième possibilité, ils restent dans l’accord, ne renégocient pas leur contribution, mais ne respectent pas leurs engagements.

« Il faut avancer sans les attendre »

Quoi qu’il en soit, « on sait que les États-Unis ne seront pas un pays aidant, conclut Célia Gautier. Il faut avancer sans les attendre. » Le Japon, l’Allemagne, la France, le Royaume-Uni, l’Italie et le Canada « ainsi que la Commission européenne [ont réaffirmé] leur engagement à rapidement mettre en œuvre l’Accord de Paris », peut-on lire dans le communiqué du G7.

Ce qui se dessine est un isolement croissant de Donald Trump sur les questions climatiques et l’émergence de nouveaux leaderships, notamment de la Chine et de l’Union européenne. Jeudi 1er juin au soir et vendredi 2 juin, le président du Conseil européen, Donald Tusk, le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, et le Premier ministre chinois, Li Keqiang, doivent se réunir pour discuter du climat et de leurs relations commerciales. À l’issue de cette rencontre, la Chine, premier émetteur mondial de gaz à effet de serre, et l’Union européenne pourraient, selon le Financial Times du 31 mai, présenter un communiqué commun disant que la transition est « irréversible » et qualifiant l’Accord de Paris d’« accord historique ». Les deux parties se disent « déterminées à aller de l’avant » en prenant des mesures en vue « d’être leaders de la transition » vers une économie mondiale bas carbone, indique le quotidien.

L’ex-président états-unien Barack Obama, le président chinois Xi Jinping et Ban Ki-Moon, l’ancien secrétaire général des Nations-Unies à l’issue d’une conférence sur le changement climatique tenue en Chine, en septembre 2016.

« Le couple sino-américain, qui a été un moteur important des négociations avant la COP21, a été mis en pièce, analyse David Levaï. Il existe aujourd’hui un écart très important entre la dynamique américaine et la dynamique chinoise qui s’accélère. La Chine montre qu’elle a pris à bras-le-corps la transition profonde de l’économie et des modes de vie. Elle va poursuivre dans cette voie, mais n’envisage pas forcément son rôle comme celui d’un leader politique. D’où les regards qui se tournent vers l’Union européenne. » Pour que ce nouvel attelage fonctionne, l’Union européenne a intérêt à présenter des garanties de respect de ses engagements, estime Célia Gautier : « Pour l’instant, la Chine avance plus vite que prévu dans la réalisation de ses engagements. Mais elle n’a pas du tout confiance dans le fait que l’Allemagne va bientôt sortir du charbon ou que la France va investir dans les énergies renouvelables. Elle a d’ailleurs posé des questions à ces sujets lors d’une session d’évaluations multilatérales des engagements, à Bonn. » À l’Union européenne de se montrer déterminée, alors que la commission environnement du Parlement européen devait voter mardi 30 mai le plan de partage des efforts de réduction des émissions de gaz à effet de serre entre les États-membres.

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