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ReportageMonde

De la Russie à la Belgique, comment le changement climatique bouleverse leurs vies

Ils habitent en Russie, en Inde ou en Belgique. Leur point commun : ils subissent tous les effets du changement climatique. Reporterre a rencontré ces femmes et ces hommes aux quatre coins du monde. Ils racontent.

Angelina, Camillo, Marcela, Jean-Pierre, Elsa, Marianne. De Buenos Aires à Bombay, en passant par la France ou la Russie, elles et ils sont les habitants d’une terre déréglée, où des vies basculent à cause du changement climatique.

Tandis que le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec) publie, le 28 février, un nouveau rapport sur les conséquences du changement climatique, Reporterre est allé rencontrer sur tous les continents celles et ceux qui paient le prix fort des émissions de gaz à effet de serre. Ces portraits racontent notre vulnérabilité face aux détraquements du climat, particulièrement aiguë pour les plus pauvres d’entre nous, pourtant les moins responsables de ces émissions. Mais on y lit aussi nos capacités d’adaptation face à une crise qui se conjugue au présent.

© Gaëlle Sutton/Reporterre

Belgique : « On a eu des canicules, et là, cet été pourri »

Elsa Brusselaers. © Julie Bourdin / Reporterre

Anne-Dominique Correa, en Belgique

Quand le déluge s’est abattu sur la Belgique en juillet dernier, Elsa Brusselaers, maraîchère de 29 ans, n’a pas tout de suite mesuré la gravité de la situation. Sa maison de Chênée, dans la province de Liège, la plus touchée par les intempéries, n’a pas été inondée : « Heureusement, je vis un peu en hauteur, mais j’étais bloquée chez moi. »

Ses collègues de Vent de Terre, une petite coopérative de maraîchage dans laquelle elle travaille depuis 2018, lui ont annoncé la nouvelle par WhatsApp : leurs cultures dans le village de Tilff étaient complètement inondées. C’est en voyant les photos qu’elle a enfin réalisé : « Je n’aurais jamais imaginé que Tilff serait dans cet état. Je ne pouvais rien faire d’autre qu’attendre. »

Le terrain de 6 000 m2 était couvert de plus d’1,40 mètre d’eau. Toute la pluie qui tombe normalement en deux mois avait versé en seulement trois jours, faisant déborder la rivière de l’Ourthe. Aubergines, concombres et tomates, qui venaient d’être taillés, avaient disparu sous l’eau. « Tout a été détruit alors que c’était la pleine saison. On avait bossé pour rien », déplore Elsa. Il a fallu dix jours pour pomper l’eau, et un mois pour que la terre sèche.

Les pluies ont emporté 40 % du chiffre d’affaires du terrain de Tilff. Et pour pallier ces pertes, la coopérative a dû puiser dans ses caisses : il n’existe pas d’aide adaptée à des projets agroécologiques, qui consiste à cultiver une grande diversité de fruits et légumes sur de petites parcelles. Les assurances, prévues pour des monocultures de grande surface, sont inaccessibles. Quant au fonds de calamité agricole saisi, la coopérative ne se fait pas trop d’illusions : il y a deux ans, un autre site de maraîchage n’avait reçu que quelques centaines d’euros suite à un épisode de sécheresse.

Dès que les routes ont été débloquées, Elsa a retrouvé ses collègues sur le deuxième terrain de Vent de Terre, à Mehagne, épargné par les inondations, car situé sur une zone plus élevée. « On a tous pris une claque », se souvient-elle. Elsa s’est reconvertie au maraîchage en 2018 après s’être aventurée dans le graphisme et la régie de spectacles. « Le maraîchage me correspondait mieux, c’est un métier qui a du sens : on nourrit des gens », dit-elle alors qu’elle pique, à genoux, une ligne de navets sous une serre. Elle ne s’attendait toutefois pas à autant de difficultés. Avec le changement climatique, la météo est de plus en plus imprévisible. « Depuis que j’ai commencé, il n’y a pas eu une seule saison normale. On a eu des canicules, et là, cet été pourri », constate-t-elle.

Que réserve 2022 ? Face au risque de nouvelles inondations, l’équipe a songé à abandonner le terrain de Tilff : « Je voulais le laisser tomber », confie Elsa. Mais cela aurait rendu la coopérative entièrement dépendante des cultures de Mehagne, davantage exposées aux sécheresses. Vent de Terre a finalement décidé de concéder « une dernière année test pour le terrain Tilff » en le transformant en un site d’autocueillette pour épargner l’équipe, épuisée par les inondations ; elle n’aura plus à s’occuper des récoltes. « J’ai toujours des craintes, reconnaît Elsa. C’est comme quand on tombe et que qu’on se blesse, il y a toujours une petite peur qui est là. »



Russie : « Il est impossible d’arrêter le processus »

Angelina Gavrilieva, directrice d’école en Russie. © Antoine Boureau/Reporterre

Estelle Levresse, en Iakoutie (Sibérie centrale, Russie)

Dans le petit village de Berdigestiakh, en Iakoutie (Sibérie centrale, Russie), le bâtiment de l’école Osipov s’élève sur trois étages. À l’intérieur, dans le hall du rez-de-chaussée, le mur s’est désolidarisé du sol, laissant apparaître un espace entre la plinthe et le carrelage. Par endroits, les joints des carreaux ont sauté et les plaques au sol ont commencé à se soulever. Dans les angles des murs, des fissures se sont formées.

Les premières dégradations sont apparues il y a quatre ans, se souvient Angelina Gavrilieva, directrice de l’école qui compte 620 élèves : « C’était en 2018, sans doute en août, au moment du pic du dégel du pergélisol », dont la couche supérieure dégèle toujours en été. 

Le bâtiment n’est pourtant pas vieux, il date de 2009, et en Iakoutie, on a l’habitude de construire sur le sous-sol gelé, en enfonçant des pilotis jusqu’à la couche souterraine du pergélisol qui est censée rester gelée en permanence.

Effet direct du réchauffement climatique, la couche souterraine s’est mise à fondre également et a endommagé les constructions. Résultat : les maisons s’enfoncent dans le sol, les murs se fissurent, les fondations se soulèvent... causant de graves problèmes aux édifices et l’angoisse des habitants.

« L’instabilité des pilotis est très dangereuse. À terme, je crains que l’ensemble du bâtiment soit détruit. On voit beaucoup de maisons en bois s’enfoncer dans le sol à cause de ce phénomène, s’inquiète Angelina Gavrilieva, qui travaille dans cette école depuis douze ans. Bien sûr, on peut combler les fissures et les trous, mais selon les experts, il est impossible d’arrêter le processus, car le dégel du pergélisol et des eaux souterraines couvre toute la région. Si le processus continue, je pense que malheureusement nous ne pourrons pas éviter de gros dégâts dans le futur. »

Le pergélisol représente un quart des terres émergées de l’hémisphère Nord et couvre plus de 60 % du territoire russe. Selon une étude récente du ministère du Développement de l’Extrême-Orient et de l’Arctique, les dommages causés sur les bâtiments et les infrastructures en Russie par la fonte du pergélisol pourraient atteindre 9 000 milliards de roubles (106 milliards d’euros) au cours des trente ans prochaines années.

La Iakoutie, région habitée la plus froide du monde en hiver, est en première ligne du réchauffement climatique. Ces dernières années, les étés très chauds et très secs y ont provoqué de terribles feux de forêt détruisant la taïga. Or, les arbres font partie de l’écosystème local et protègent le pergélisol. « Les processus de dégradation risquent encore de s’accélérer, déplore Angelica Gavrilieva. Je suis très inquiète du monde dans lequel nos enfants vont vivre. »



Sénégal : « Sans la mangrove qui retient l’eau, nos habitations disparaîtront »

Marianne Ndong met en oeuvre une méthode de culture d’huîtres qui protège la mangrove. © Théa Ollivier/Reporterre

Théa Ollivier, à Dassilamé Sérère

Chaque année depuis dix ans, Marianne Ndong, 39 ans, participe au reboisement de la mangrove autour de son village de Dassilamé Sérère, dans le delta du Sine Saloum au sud du Sénégal. « Sans la mangrove qui retient l’eau, nos habitations disparaîtront », s’inquiète la mère de six enfants, une poignée de propagules à replanter à la main. Au Sénégal, 40 % de la superficie de cette forêt amphibie a disparu depuis 1970 à cause des sécheresses liées au changement climatique.

La hausse des températures et le déficit hydrique augmentent le niveau d’évaporation dans cette zone humide où la concentration de sel augmente, tuant les palétuviers qui composent la mangrove et dont les racines en échasse sont directement plantées dans l’eau saumâtre. Avec l’épuisement des nappes phréatiques, la baisse de la pluviométrie et donc d’un apport en eau douce, l’érosion du littoral et l’ensablement des chenaux (appelés bolongs), l’écosystème fragile se dégrade petit à petit.

« Quand j’étais petite, nous avions des arbres et des fruits que nous ne trouvons plus aujourd’hui », constate Marianne Ndong, qui accuse la salinisation des terres. Elle rappelle l’importance de la mangrove, cette zone tampon entre l’océan et le continent qui a un impact sur la qualité du sol et donc sur la sécurité alimentaire. « Cet espace est vital pour nous, il nous protège et nous nourrit », plaide-t-elle, coiffée d’un foulard de wax bleu et jaune.

Dans sa commune, 97 hectares ont été replantés sur un rayon de 15 kilomètres. Mais reboiser et surveiller les jeunes pousses qui ont un taux de survie de 87 % n’est pas suffisant. Marianne Ndong a donc rejoint le groupement des femmes qui ont décidé de changer leur comportement, afin de s’adapter pour survivre. Les pieds enfoncés dans la vase à marée basse, elle installe un rideau de guirlandes de coquilles d’huîtres, soutenu par des poteaux plantés aux abords des palétuviers. C’est une nouvelle technique pour capter les larves d’huîtres qui flottent dans l’eau à marée haute. Six mois plus tard, les 200 femmes de ces villages sépareront les grappes qui se seront formées et placeront les coques dans des pochons flottant dans l’eau saumâtre pour les faire grossir, avant de les désengorger dans un bassin récemment acquis et de les vendre.

Marianne Ndong est fière d’avoir désormais une pratique plus moderne et durable. « Traditionnellement, mes parents et grands-parents coupaient les racines des palétuviers pour récolter les huîtres sauvages, mais cela participait à la disparition de la mangrove », note-t-elle, se réjouissant d’avoir aussi pu augmenter sa productivité. « Ma vie a beaucoup changé, je peux maintenant payer les études de mes enfants, témoigne l’ostréicultrice, qui travaille aussi dans le maraîchage biologique et l’apiculture. Je n’utilise pas d’engrais ni de pesticides chimiques, je préfère utiliser du compost. Je tiens à ce travail, que j’espère léguer en héritage à mes descendants. » Ses enfants commencent déjà à mettre la main à la boue, en participant eux aussi aux opérations de replantation de la mangrove.



France : « Nous sommes, en quelque sorte, devenus des migrants climatiques »

Jean-Pierre Cavallo, éleveur de brebis. © Alexandre-Reza Kokabi/Reporterre

Alexandre-Reza Kokabi, dans la vallée de la Roya

« Jamais de la vie je ne pensais traverser un événement pareil : en une nuit le paysage était bouleversé comme une zone de guerre. » Jean-Pierre Cavallo, éleveur ovin, n’oubliera jamais la nuit du 2 au 3 octobre 2020, quand la tempête Alex a dévasté la vallée de la Roya, dans le Parc national du Mercantour (Alpes-Maritimes).

Le sexagénaire, cigarette roulée au bout de ses lèvres, surplombées par une moustache grise, reste stupéfait par ce qu’il a découvert, ce jour-là, quand les premiers rayons du soleil sont apparus. Ses bergeries en ruine, ensevelies sous 4 mètres de gravats. Son matériel et un 4x4 emporté par la Roya et ses affluents, mués en torrents de boue. Le choc et le goût amer de l’anéantissement, si soudain, « d’une vie de labeur ». « Quand tu vois ça, tu es en état de choc, ça te met les genoux à terre », explique-t-il, l’air hagard. Et puis, il se reprend : « Dans notre malheur, nous avons eu de la chance. Nos 800 brebis étaient en train de pâturer à 2 000 mètres d’altitude sur des alpages surveillés par mon fils, et la maison n’a pas été touchée. Il y a eu l’entraide, aussi, avec d’autres habitants de la vallée et les bénévoles des régions voisines. »

Faute de pouvoir continuer à travailler chez lui, l’éleveur a été contraint à une transhumance forcée pendant deux hivers consécutifs. Ses brebis ont descendu la route départementale et sont montées dans des camions-remorques en direction d’Istres, en Crau, sur les terres d’un agriculteur. « Nous sommes, en quelque sorte, devenus des migrants climatiques, dit Jean-Pierre. Cette année, nous avons installé un bungalow, mais la première fois nous étions dans une caravane. Et quand t’es pas chez toi, t’es pas chez toi... »

Les brebis, elles, « se sont bien habituées, et je les soupçonne même d’avoir préféré ces prairies, sourit-il. Elles n’ont pas à crapahuter comme sur nos montagnes, là elles n’ont qu’à ouvrir la bouche et manger, alors elles abordent le printemps en étant moins fatiguées, plus vigoureuses ». Un an et demi après la catastrophe, tout juste rentré chez lui, Jean-Pierre se réjouit « d’avoir relevé la tête », ragaillardi par les travaux d’une nouvelle bergerie, flambant neuve, qui touchent à leur fin.

Mais l’ensemble de la vallée de la Roya reste profondément balafrée. Des immeubles menacent de s’effondrer, des commerces et les hôtels sont désespérément fermés et des familles définitivement parties. « Quand tout se meurt, ça plombe... », soupire l’éleveur, qui aimerait que les élus et les habitants « créent des choses, ensemble, pour faire revenir du monde dans la vallée ». Parmi les souhaits de certains citoyens : la naissance d’une vallée verte, moins bétonnée, moins tournée vers la voiture. « En tout cas, il faut redonner du souffle. Je crains plus le manque d’idées qu’une nouvelle tempête Alex », glisse-t-il avant de retourner auprès de ses brebis.



Bombay : « C’est un arrêt de mort pour nous, pêcheurs »

Camillo Quinny devant l’autoroute maritime en construction qui menace la navigation des pécheurs de Bombay. © Côme Bastin / Reporterre

Côme Bastin, en Inde

Lunettes de soleil, chemise ouverte, il fonce à bord de son zodiac depuis les docks. Puis Camillo Quinny ralentit pour longer d’immenses piliers. Vue du large, l’autoroute en construction ressemble à un porte-avions. « C’est devenu très dangereux de sortir en mer, explique ce pêcheur. Quelqu’un qui n’est pas habitué se tuerait ici. Et pourtant ils ajoutent de nouveaux piliers. »

Depuis un an, Camillo, 64 ans, est un des leaders de la révolte contre le [projet de Coastal Road, une voie express posée sur les flots. Elle longe sur près de 30 kilomètres la péninsule de Bombay, où s’entassent 22 millions d’habitants. « C’est un arrêt de mort pour nous, les premiers habitants de la ville, dit Camillo. Avant que Bombay ne devienne la capitale financière indienne et avant même l’Empire britannique, il y avait les pêcheurs ! »

Héritières de ces premières communautés de Bombay, les ruelles colorées du Worli Koliwada, un des villages de pêcheurs qui subsiste au pied des gratte-ciels. Mais pour combien de temps ? Fils de pêcheurs, eux-mêmes enfants de pêcheurs, Camillo s’inquiète : « Avec le réchauffement climatique, il faut aller de plus en plus loin pour trouver de moins en moins de poissons. » La mer menace aussi dangereusement le port de Worli : « Au fil du temps, les inondations se multiplient lors des moussons et on a vu les vagues dépasser même la future autoroute. »

Il subsiste une dizaine de villages de pêcheurs dans Bombay et avec d’autres, Camillo tente de les fédérer pour survivre. « Le problème est qu’au lieu de nous soutenir face aux aléas climatiques, la municipalité aimerait qu’on disparaisse, pour transformer nos maisons au bord de l’eau en villas pour les nouveaux riches. » Même si les manifestations de pêcheurs se multiplient, Camillo est pessimiste : « Mes enfants sont allés travailler dans de grandes entreprises. Demain, seuls les chalutiers géants pourront encore trouver du poisson dans la mer. »



Argentine : « La multiplication des cyanobactéries toxiques est très préoccupante »

Marcela Kurlat et sa fille Suri sur le ponton de leur maison, dans le Tigre. © Fabien Palem/Reporterre

Fabien Palem, à Tigre (Buenos Aires)

Le regard déterminé, Marcela Kurlat nous accueille sur le « péron » de sa maison : un ponton en bois, par lequel nous gagnons la terre ferme. Cette Argentine est reliée au monde par le ruisseau Esperita, l’un des 350 cours d’eau qui composent le delta de Tigre. Situé aux abords de la ville éponyme, dans la banlieue nord de Buenos Aires, le delta s’est formé au fil des millénaires par l’accumulation de sédiments déversés par le fleuve Paraná, le deuxième plus long d’Amérique du Sud, dans son parcours vers le fleuve de la Plata.

Très prisé par les touristes porteños, les habitants de l’immense Buenos Aires, qui tourne le dos au fleuve, Tigre est aussi une destination en vogue pour les néoruraux, prêts à s’engager dans une « vie amphibienne », comme Marcela. La défense des zones humides (humedal, en espagnol) telles que le delta de Tigre fait l’objet d’un projet de loi émanant de la société civile, alarmée par les incendies qui se sont multipliés avec le réchauffement climatique ou ont été provoqués par les secteurs agricole et immobilier.

« Vivre ici implique d’être en harmonie avec la nature, car on évolue au rythme du climat et des eaux. Quand la marée monte ou qu’il pleut, en général, on reste chez nous », explique Marcela. À 44 ans, cette enseignante-chercheuse de la Faculté de philosophie et lettres de l’université de Buenos Aires est fière de ce changement de vie et ne passe jamais plus de deux jours par semaine sur le continent, depuis qu’elle a posé ses valises ici en 2017.

Cette mère de famille insiste : « La pollution du delta contribue à contaminer l’ensemble des mers du globe. » Mais les insulaires vivent les conséquences du changement climatique à la première personne. En novembre 2020, une floraison excessive de cyanobactéries s’est faite remarquer pour la première fois dans les eaux de la zone. Le contact avec ces cyanobactéries toxiques a des conséquences sur la santé, à court et moyen terme : urticaires, vomissements, éruptions cutanées, indigestions, etc. Le phénomène s’est répété durant les chaleurs de l’été austral en cours. À chaque fois, l’eau prend une couleur verte fluorescente des plus inquiétantes.

« C’est la conséquence de l’énorme sécheresse dont souffre le fleuve Paraná et de l’augmentation des températures. La multiplication des cyanobactéries toxiques est très préoccupante, car tout porte à croire que le phénomène va se répéter », résume Luciano Iribarren, biologiste résidant dans le delta. Parmi les causes énumérées : les bas niveaux des fleuves, les sécheresses à répétition, mais aussi le déversement du glyphosate dans les eaux, ainsi que les défrichements. Rendu vulnérable par sa position d’entonnoir, le delta est témoin du changement climatique en cours.

Le quotidien de Marcela et de sa fille Suri, bientôt 2 ans, se trouve bouleversé lors de la prolifération de cyanobactéries. « Ici, on utilise l’eau du fleuve pour tout. Se doucher, cuisiner ; certains la filtrent et la boivent... Sans oublier l’usage récréatif », énumère Marcela. Mais dès que les cyanobactéries apparaissent, utiliser l’eau du fleuve devient strictement interdit et les habitants n’ont d’autres choix que de remplir leurs barques de bidons d’eau minérale, achetés sur le continent.

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