Des projets de surf parks coulent grâce aux luttes écologiques

Un surf park est une piscine à vagues artificielles. - Pxhere/CC0 1.0
Un surf park est une piscine à vagues artificielles. - Pxhere/CC0 1.0
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Luttes Grands projets inutilesVictoire pour la lutte contre les surf parks : deux projets ont été abandonnés consécutivement en Seine-Saint-Denis et Loire-Atlantique. Ces projets de piscines à vagues artificielles sont combattus en raison de leur coût environnemental.
Décriés pour leur consommation en eau, leur contribution à l’artificialisation de terres agricoles et leur coût d’accès, des projets de surf parks recueillent de moins en moins de soutien. Ces piscines à vagues artificielles très peu écologiques peinent à s’implanter en France. Deux projets viennent d’être abandonnés en quelques semaines, en Seine-Saint-Denis et en Loire-Atlantique.
À Saint-Père-en-Retz, le projet Bergerie Surf Camp, un bassin à vagues sur huit hectares de terres agricoles, à dix kilomètres de l’océan, faisait face à une opposition d’habitants et de collectifs écologistes depuis 2018. Après avoir remodelé plusieurs fois leur concept pour tenter de le rendre plus vert, les porteurs du projet ont finalement renoncé à s’installer dans cette commune, a fait savoir le 10 juin le maire Jean-Pierre Audelin.
« C’est la preuve que la lutte paye », dit Yoann Morice, membre du collectif Terres communes et fer de lance de la mobilisation contre ce surf park. Il regrette néanmoins que le collectif continue de « payer les conséquences » de son engagement. Fin avril, des opposants au surf park ont en effet été condamnés à 1 000 euros d’amende pour « occupation illicite de terrain d’autrui en vue d’y habiter, ce même de manière temporaire », pour l’organisation d’un festival de résistance sur place, fin juillet 2019. Un membre de Terres communes a également été arrêté violemment et placé en garde à vue début juin lors d’une manifestation contre l’artificialisation de terres au Carnet, un autre projet local contesté.
Le collectif dit rester vigilant, le maire de Saint-Père-en-Retz ayant indiqué qu’il ne souhaitait pas que le terrain prévu pour le surf park retrouve sa vocation agricole. Une dérogation avait été votée en 2018 pour transformer ces terres agricoles en terrain de loisirs. « S’il est déterminé à bétonner ces terres, il nous trouvera en travers de sa route », annonce Yoann Morice.
À Sevran, un projet d’aménagement remodelé
À Sevran, en Seine-Saint-Denis, le projet Terre d’eaux et de culture porté par Linkcity, filiale de Bouygues, vient de perdre ses vagues. Après avoir organisé une concertation citoyenne mêlant habitants et associations, le conseil municipal mené par le maire Stéphane Blanchet (divers gauche), qui commençait depuis quelques mois à exprimer ses doutes sur le surf park, a voté à l’unanimité le 27 mai 2021 de nouvelles orientations pour Terre d’eaux et de culture, dont l’abandon de la piscine à vagues.
Dans le cadre d’une vaste opération immobilière mêlant logements, loisirs et commerces sur 32 hectares de friches agricoles, les promoteurs souhaitaient installer sur plusieurs hectares un surf park au milieu d’un parc de loisirs fermé. « Un Disneyland au milieu de Sevran », résume Francis Redon, président d’Environnement 93. Son collectif avait dénoncé l’impact écologique d’un tel projet, notamment la « consommation de 608 millions de litres d’eau par an, soit 243 piscines olympiques » et le « remplissage du bassin avec la nappe d’eau souterraine ». Sevran a caressé un temps l’idée d’accueillir les épreuves de surf des Jeux olympiques 2024, mais ses espoirs ont été douchés quand les organisateurs ont fait savoir durant l’été 2019 qu’ils préféreraient un site naturel.
[#SalonSIMI] Avec @SurfinSevran vivez des expériences inspirées de la culture #surf Développé par @LinkCity et réalisé par nos #InnovativeBuilders à @Sevranville le projet transforme un quartier avec #terrasses, #commerces, espaces publics et #logements @GrandParisMGP pic.twitter.com/B2XFjoqbiP
— BouyguesBatiment IDF (@Bouygues_BatIDF) December 11, 2019
Lors du conseil municipal de mai dernier, il a également été décidé d’accorder une place plus importante à l’agriculture urbaine dans le projet immobilier, et de s’assurer la pérennité des continuités écologiques entre les parcs Natura 2000 du Sausset et de la Poudrerie.
Les jeunes franciliens pourront tout de même s’essayer à la glisse, puisqu’un autre projet de vagues artificielles doit voir le jour sur l’Île de loisirs de Vaires-Torcy, à une vingtaine de kilomètres de Sevran. Un projet qui « n’a rien à voir » avec celui de Sevran, selon Francis Redon, et qui est a priori « beaucoup plus soutenable d’un point de vue environnemental ».
« Ni ici ni ailleurs »
Ces projets ne font pourtant pas l’unanimité auprès de certains passionnés et professionnels du surf. Ces derniers mois, la Fédération française de surf et le Syndicat des professionnels du surf ont fait savoir qu’ils n’étaient pas favorables au projet de piscine à vagues de Sevran. Elles ont toutes les deux indiqué qu’elles ne soutiendraient pas les projets de surf park qui mettraient en péril l’environnement, notamment la ressource en eau et la biodiversité. Compte tenu des dernières prévisions sur la sécheresse en France, les promoteurs de piscines à vagues vont avoir du mal à convaincre. Mais certains n’en restent pas moins déterminés.
Après l’abandon de son projet de surf park à Saint-Jean-de-Luz (Pyrénées-Atlantiques) fin 2020, l’entreprise Wavegarden souhaite désormais s’implanter à Saint-Sébastien, en Espagne, selon la fondation Surfrider Europe. En avril, la mairie de Saint-Sébastien a modifié le Plan local d’urbanisme (PLU) du mont Antondegi, à cinq kilomètres de l’océan, afin d’artificialiser neuf hectares de terres naturelles et agricoles, rapporte l’organisation, qui soutient également le collectif local Antondegi Berdea-Olatuak Itsasoan qui lutte contre ce projet.
De leur côté, les porteurs du projet Bergerie Surf Camp en Loire-Atlantique, originaires de la région nantaise, ont fait savoir qu’ils souhaitaient s’installer dans un autre département. « Ni ici ni ailleurs », prévient le collectif Terres communes.