Pomme, Jean-Luc Reichmann... 19 célébrités « malades du plastique »

Pomme, Jean-Luc Reichmann, Lucie Lucas, Frah de Shakaponk, Fanny Leeb, Tom Frager, Girl Go Green, Nathalie Gontard (scientifique), Lola Dubini, Baptiste Lorber, Luciole, Benjamin de Molliens, Lily Nambininsoa, Vivre moins con, Magali Payen, The Impact Story, Le coin d’Elodie, Jules Comme César, L’écureuil Curieux... Toutes ces célébrités, scientifiques et vidéastes ont découvert que leurs cheveux étaient largement contaminés par la pollution plastique. - © On est prêt
Pomme, Jean-Luc Reichmann, Lucie Lucas, Frah de Shakaponk, Fanny Leeb, Tom Frager, Girl Go Green, Nathalie Gontard (scientifique), Lola Dubini, Baptiste Lorber, Luciole, Benjamin de Molliens, Lily Nambininsoa, Vivre moins con, Magali Payen, The Impact Story, Le coin d’Elodie, Jules Comme César, L’écureuil Curieux... Toutes ces célébrités, scientifiques et vidéastes ont découvert que leurs cheveux étaient largement contaminés par la pollution plastique. - © On est prêt
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Dans une campagne pour réduire l’usage du plastique, dix-neuf célébrités ont fait tester leurs cheveux. Elles ont découvert qu’elles étaient contaminées par des perturbateurs endocriniens liés à cette omniprésente matière.
Le plastique imbibe tous les recoins de notre corps, suggèrent les résultats de tests capillaires menés par On est prêt, communiqués en exclusivité à Reporterre et au Parisien, et rendus publics mardi 14 novembre. Dans le cadre de sa campagne « Sick of plastic » (« Malades du plastique »), qui vise à alerter sur les dangers de cette matière pour la santé humaine, le mouvement a fait analyser les cheveux de dix-neuf personnalités françaises (la chanteuse Pomme, l’actrice Lucie Lucas, l’animateur Jean-Luc Reichmann, la scientifique Nathalie Gontard…).
Tous, sans exception, sont contaminés par des additifs utilisés dans le processus de fabrication du plastique. Des résultats « assez anxiogènes », selon la fondatrice d’On est prêt, Magali Payen, et « très révélateurs » de l’omniprésence de cette substance dans notre environnement proche.
C’est au laboratoire indépendant Kudzu Science qu’On est prêt a confié l’analyse des mèches de ses dix-neuf cobayes. Cette méthode permet d’évaluer l’exposition d’un corps aux polluants au cours des trois derniers mois, ces substances étant « expiées » par notre organisme en s’incorporant aux cheveux en train de pousser.
Douze perturbateurs endocriniens
Douze substances — neuf phtalates et trois bisphénols, dont le fameux bisphénol A — ont été étudiées. Toutes sont considérées comme des perturbateurs endocriniens, c’est-à-dire des substances capables de perturber le système hormonal ; cinq [1] sont toxiques pour la reproduction, et deux [2] sont suspectés d’être cancérogènes. On les retrouve dans des milliers d’objets du quotidien, des cosmétiques aux emballages en passant par les jouets, les colles, les peintures et les appareils électriques.
Les résultats obtenus ont de quoi inquiéter : toutes les personnes ayant participé à ce test ont des traces de six à dix additifs dans leurs cheveux, sur les douze substances testées. Même la chercheuse de l’Inrae (Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement) et experte en science des emballages Nathalie Gontard, qui explique à Reporterre avoir tout fait pour « déplastiquer sa vie » — du choix de ses vêtements aux matériaux utilisés pour isoler sa maison — est positive à six phtalates, dont deux à un niveau considéré comme « élevé » par rapport au reste de la population.
« Quand on a reçu les résultats, on n’avait plus envie de rigoler »
« On s’est tous pris un coup, raconte l’actrice Lucie Lucas, qui a découvert avec stupeur que ses cheveux contenaient des traces de huit phtalates. On trouvait ça ludique de faire cette expérience. Mais quand on a reçu les résultats, on n’avait plus du tout envie de rigoler. » L’actrice, connue pour son rôle dans la série télévisée Clem, explique éviter « au maximum le plastique » dans son quotidien : elle limite les emballages, utilise des produits d’entretien naturels, mange les légumes produits par son mari maraîcher…
Ces substances sont malgré tout parvenues à se frayer une place dans sa crinière. « Quelle que soit notre volonté de vivre le plus sainement possible, on est tous impactés, déplore-t-elle. Et on se sent impuissants vis-à-vis de ça. »
Quatre fois plus de plastique que d’animaux sur Terre
Selon Nathalie Gontard, ces résultats sont un « bon indicateur de notre exposition au plastique ». Cette substance est partout, insiste-t-elle : « Depuis qu’on a créé le plastique, on en a accumulé 9 milliards de tonnes sur Terre. La quantité totale de biomasse animale, elle, représente 2 milliards de tonnes. C’est-à-dire qu’il y a quatre à cinq fois plus de plastique sur Terre que d’animaux. C’est un danger que l’on lègue aux générations futures. »
Le plastique, rappelle-t-elle, « ne s’intègre pas dans les cycles biogéochimiques ». Nos corps, comme notre environnement, n’ont pas les moyens de le « digérer » et de s’en débarrasser naturellement. « Donc ces particules s’accumulent. Et comme tout corps étranger qui s’accumule dans un organisme, il perturbe son bon fonctionnement, ce qui entraîne des dysfonctionnements avec des maladies sur le long terme, des phénomènes inflammatoires, des déviations métaboliques… »
« On pourrait très, très, très facilement réduire de plus de la moitié notre utilisation »
Seule solution pour diminuer les risques, selon la chercheuse : réduire au maximum, en amont, notre utilisation de plastique. Miser uniquement sur le recyclage — option privilégiée par les pays pétroliers et les entreprises polluantes — lui semble un leurre : « 98 % de ce qu’on appelle le recyclage, c’est du décyclage, c’est-à-dire qu’on cherche un nouveau débouché pour stocker du plastique qui continue à se dégrader en micro et en nanoplastiques. C’est pire que tout : on tranquillise l’utilisateur, qui va donc continuer à consommer du plastique ; on crée de nouvelles filières, ce qui nous rend dépendant des déchets plastiques. »
« Et enfin, poursuit-elle, on fait disparaître des matériaux qui ne posaient pas de gros problèmes environnementaux, comme la laine, le bois ou la terre cuite, pour les remplacer par du plastique recyclé. » Nathalie Gontard se dit « réaliste » : « On ne pourra jamais se passer complètement du plastique. Mais on pourrait très très, très facilement réduire de plus de la moitié notre utilisation. »
Changer de voie
La scientifique espère que cette voie sera privilégiée par les décideurs politiques. Deux rendez-vous institutionnels, ce mois-ci, pourraient être une occasion de changer le cours des choses : le vote en plénière du règlement emballages de la Commission européenne, prévu le 21 novembre, et les négociations autour du futur Traité international contre la pollution plastique, qui se tiennent jusqu’au 19 novembre à Nairobi (Kenya).
Ces discussions parviendront-elles à stopper le tsunami plastique ? Afin d’inciter les gouvernements à être « les plus ambitieux possibles », le mouvement On est prêt a lancé une pétition, ainsi qu’une campagne d’interpellation des députés européens.