Au salon de la tech, on rivalise d’inventions climaticides

Au salon VivaTech, à Paris. - © Maïwenn Lamy/Reporterre
Au salon VivaTech, à Paris. - © Maïwenn Lamy/Reporterre
Durée de lecture : 4 minutes
NumériqueVivaTech, grand salon dédié aux nouvelles technologies, se tient à Paris jusqu’au 18 juin. Reporterre a déniché trois start-up championnes du n’importe quoi sous prétexte de climat.
Paris, reportage
« Si le changement climatique est l’affaire de tous, qu’attendez-vous pour en faire votre bonne affaire ? » [1]. La banderole à l’entrée du salon Viva Technology, qui a lieu du mercredi 15 au samedi 18 juin, annonce la couleur. L’événement, qui se revendique comme le plus grand salon européen dédié à la « tech » et aux start-up, a même fait de la « course vers la neutralité carbone » l’une des thématiques phares de sa sixième édition. Tout est « green » (vert), cette année. Entre les stands de grands groupes connus pour leur activités climaticides [2], on aperçoit donc des murs végétalisés, des pots de lierre par dizaines et des sapins déracinés. Le parc des expositions de la porte de Versailles, à Paris, où se tient VivaTech, est envahi par les logos d’entreprise telles que LVMH, BNP Paribas ou TotalÉnergies.

Si quelques bonnes idées se nichent au détour de certains stands, beaucoup d’exposants pratiquent l’écoblanchiment sans scrupule. Reporterre vous propose une sélection des pires idées découvertes sur le salon.
1 — La garde-robe numérique « qui réduit votre empreinte carbone »
« Ne faites pas moins de shopping, achetez des vêtements digitaux. » Acheter des vêtements pour nos avatars numériques consomme moins de ressources que de réels accessoires de mode, vante la start-up DressX. Elle vend des vêtements numériques que l’on peut superposer à nos photos, à la manière d’un filtre, pour gagner en élégance dans le monde numérique. L’entreprise propose même des tenues de luxe à porter dans le métavers — un univers virtuel.

Selon elle, la production d’habits digitaux émet 97 % de CO2 de moins que celle de leurs équivalents du monde réel. Elle propose d’ailleurs un comparatif des conséquences environnementales qu’induisent produits physiques et virtuels. Ces derniers « ne génèrent aucun déchet » et « leur production consomme moins d’eau ». Pour une robe de la collection haute couture, comptez une centaine d’euros.
2 — Un véhicule électrique volant… pour son yacht
Jetson, toute jeune entreprise, propose à ses clients des véhicules personnels électriques et volants. Son objectif ? « Rendre les villes plus agréables à vivre en déplaçant le trafic automobile dans le ciel », dit son fondateur, Tomasz Patan, à Reporterre. Le produit est « durable » puisque les véhicules ne consomment pas d’énergies fossiles, poursuit l’inventeur. Toutefois, il n’est pas encore parvenu à mettre « le ciel à la portée de tout le monde », comme il en a l’ambition. Les véhicules, proposés à la vente depuis quelques mois, coûtent près de 90 000 euros et les quelques centaines de clients n’ont pas encore l’autorisation de circuler dans l’espace public à bord de ces engins. « Pour le moment, ils les utilisent surtout pour décoller de leur yacht », concède M. Patan.
3 — Le banc public qui fait de la vidéosurveillance
Green social bench a conçu un banc public capable de recharger les téléphones portables. Ce « banc intelligent », haut de 1,2 mètre, est conçu pour être accolé aux infrastructures publiques existantes. Il recharge ses batteries la nuit, grâce à l’éclairage public, et propose ensuite un large panel de services : connexion wifi, charge de téléphones, appels d’urgence et… vidéosurveillance « 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7 ».
Pour s’opposer à ce « temple de la start-up nation sponsorisé par TotalÉnergies », des militants écologistes se sont invités au salon. Et ont dénoncé — en chanson — les agissements de la major pétrolière, et notamment le projet Eacop, un oléoduc chauffé de 1 443 kilomètres de long. Le groupe est dans le viseur de nombre d’activistes du climat. Alors que quatorze départements sont placés en vigilance rouge canicule, l’économiste Maxime Combes a appelé, dans un billet publié sur son blog Mediapart, à nommer cet épisode « canicule TotalÉnergies no 1 ». Le but : nommer les responsables des catastrophes climatiques que nous subissons.