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Pesticides

Chartes voisins-agriculteurs sur les pesticides : « Tout est à revoir »

Épandage de pesticides (Allemagne, 2009), photo d'illustration.

L’association Générations futures est mécontente des nouvelles chartes, dites « de bon voisinage », qui encadrent localement l’utilisation des pesticides.

« Sommes-nous satisfaits ? La réponse est évidemment non. » Nadine Lauverjat n’est pas allée par quatre chemins pour décrire son mécontentement. Déléguée générale de l’association Générations futures, elle a dressé un état des lieux des chartes pesticides dites « de bon voisinage » lors d’une conférence de presse, le 15 septembre.

« Du contenu des chartes au processus d’élaboration et de concertation, en passant par la consultation publique, tout est à revoir », a-t-elle déclaré. Dès le 20 septembre, Générations futures, UFC-Que Choisir et un collectif de victimes des pesticides déposeront donc des recours contre ces textes.

Le Conseil d’État avait, à l’été 2021, demandé au gouvernement de renforcer la réglementation encadrant l’épandage des pesticides. Des chartes existaient déjà depuis 2020 mais grâce à la mobilisation d’écologistes, leur ambition avait été rehaussée. Quatre nouveaux aspects ont été ajoutés à ce dispositif : la soumission à consultation publique par le préfet de ces documents, l’intégration d’une information préalable aux riverains, l’élargissement des zones de non traitement (ZNT) [1] aux lieux accueillant des travailleurs présents de façon régulière, et enfin le renforcement des distances de sécurité pour les produits suspectés d’être cancérogènes mutagènes reprotoxiques (CMR2).

Lire aussi : Le gouvernement s’obstine sur les pesticides, le Conseil d’État le sanctionne

Problème : « les chartes sont à l’initiative des utilisateurs de pesticides »

Près de neuf mois plus tard, toutes les chartes « de bon voisinage » ont-elles été révisées ? Sont-elles conformes aux nouvelles exigences ? Pour répondre à ces questions, les militants de Générations futures ont inspecté tous les sites des préfectures de France au début du mois de septembre. « À l’issue de cet état des lieux, force est de constater que plusieurs points sont contestables dans le processus d’élaboration et le contenu des chartes », a résumé Hermine Baron, avocate de l’association.

Au regard des investigations menées, des consultations publiques ont été recensées dans seulement 74 départements sur 100. Ensemble, elles ont rassemblé un mince total de 701 participations. Sur ces 74 consultations, seules 49 chartes ont ensuite été validées par les préfets et toutes n’ont pas été rendues libre d’accès sur les sites respectifs des préfectures, une mise à disposition pourtant obligatoire.

Quant au fond des chartes, l’obligation d’inclure dans les chartes une information préalable des personnes vivant à proximité des parcelles est loin d’être respectée, selon Nadine Lauverjat. Si « une page généraliste vantant les bonnes raisons d’utiliser des pesticides » apparaît dans les textes en question, « nous sommes loin des nécessaires informations vraiment utiles et indispensables », dénonce la direction de l’association. Notamment, à quoi précisément les habitants vont être exposés et quand.

Enfin, sur les questions de l’élargissement des ZNT, les réponses apportées dans les nouvelles chartes correspondent bel et bien aux attentes du Conseil d’État. L’association relève toutefois qu’« aucune ambition supérieure » n’a été proposée et dénonce l’ajout de mentions dérogatoires lui paraissant « contraires à la réglementation ».

Alors « comment croire à la mise en œuvre de véritables mesures de protection des populations riveraines alors même que les chartes sont à l’initiative des utilisateurs de pesticides et que le cadre national manque cruellement d’ambition ? », a conclu François Veillerette, porte-parole de l’association. Dénonçant les propos de la présidente de la FNSEA, le syndicat agricole majoritaire, Christiane Lambert, selon lesquels ces produits toxiques ne dériveraient pas au-delà des parcelles traitées, il a enfin réaffirmé la détermination de Générations futures à mener des actions juridiques « aussi longtemps que nécessaire » pour lutter contre ces dangers sanitaires.

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