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Loi Sécurité globale

Demi-victoire au Conseil constitutionnel contre la loi Sécurité globale

Une partie de la loi Sécurité globale a été censurée jeudi 20 par le Conseil constitutionnel. Une victoire pour la coordination Stop loi Sécurité globale, qui considérait ce texte comme « liberticide ».

C’est une petite victoire pour les libertés publiques. La très controversée loi Sécurité globale, qui avait suscité un vif mouvement de protestation depuis plusieurs mois, a été en partie censurée par le Conseil constitutionnel.

Le très critiqué article 24 (devenu l’article 52) disparaît, car jugé « contraire à la Constitution ». Il visait à pénaliser la diffusion « malveillante » d’images des forces de l’ordre en opération et créait un délit de « provocation à l’identification » d’un agent ou de sa famille, puni de cinq ans d’emprisonnement et de 75 000 euros d’amende. Largement soutenu par les syndicats de police, cette atteinte au droit d’informer avait suscité l’indignation des associations de défense des libertés et des organisations de journalistes.

L’article 1er, qui autorisait les agents de police municipale et les gardes champêtres à exercer des attributions de police judiciaire en matière de délits, a également été censuré. Son premier paragraphe inquiétait beaucoup certaines associations. Il s’agissait d’étendre le délit d’introduction et de maintien dans le domicile d’autrui à tout « local professionnel, commercial, agricole ou industriel ». Et les peines étaient multipliées par trois, passant à trois ans de prison et 45 000 euros d’amende. L’association de défense des animaux L214 et la Maison des lanceurs d’Alerte avaient déposé une « porte étroite » (une observation juridique qui vise à éclairer le Conseil constitutionnel sur des aspects problématiques d’un texte) contre cette disposition devant le Conseil constitutionnel. Ils ont été entendus. « C’était une tentative d’intimidation des ONG qui se mobilisent pour apporter une critique constructive de l’élevage intensif et agriculture industrielle, » dit à Reporterre Brigitte Gothière, cofondatrice de L214.

Cette disposition inquiétait également les associations de droit au logement qui craignaient une criminalisation du squat et de la pauvreté.

Autre camouflet de taille : la censure d’une large partie de l’article 47 sur les drones, qui organisait leur utilisation des drones par les forces de l’ordre, notamment lors de manifestations. Le Conseil constitutionnel a estimé qu’il était contraire au principe du respect de la vie privée.

Enfin, cinq articles (26, 57, 63, 68 et 69) ont été supprimés du texte, car considérés comme des cavaliers législatifs.

Une victoire pour les opposants

Pour la coordination Stop loi sécurité globale,, la décision du Conseil constitutionnel est une victoire encourageante. "Nous sommes contents car nous nous attendions à moins de la part du Conseil", dit Emmanuel Vire, secrétaire général du SNJ-CGT lors d’une émission organisée par Reporterre et Radio Parleur. « C’est une victoire remportée grâce à la mobilisation menée depuis près de sept mois par de nombreux collectifs, notamment en province. » Plusieurs milliers de personnes ont en effet défilé à Paris et dans 150 villes lors de différents rassemblements organisés par la coordination depuis la première le 14 novembre 2020 devant l’Assemblée nationale.

« Il n’y avait pas seulement les ’gauchistes’ habituels qui dénonçaient cette loi. Un grand nombre d’associations et de collectifs se sont rassemblés d’origine très diverses. Il y avait même la société des journalistes du Figaro ! Cela montre qu’il faut trouver de nouvelles formes de coalitions pour se mobiliser. Qu’il faut faire converger tout un tas de secteur du mouvement social pour gagner la bataille culturelle », explique Nicolas Krameyer, militant des droits humains qui a milité chez Amnesty.

Si la coordination se réjouit de cette victoire, beaucoup préfèrent rester prudents. En effet, le Conseil constitutionnel a conservé neuf articles du texte. « L’essentiel de la loi est validée, c’est-à-dire la logique de surveillance totale et globale (...) c’est une validation de l’escalade sécuritaire », estime le collectif Stop loi Sécurité globale de Montpellier.

Pour l’association de défense des libertés La Quadrature du net, « la défaite symbolique est extrêmement lourde pour la police et le gouvernement mais le Conseil constitutionnel leur laisse de larges marges d’action pour réintroduire ces mesures dans une future loi ». Il pointe notamment l’extension à la police municipale de pouvoirs de vidéosurveillance (et à la SNCF et RATP), la surveillance des halls d’immeubles, la transmission en temps-réel des images des caméras-piétons ou leur usage pour les gardes-champêtres.

La coordination et les associations de défense des libertés veulent donc rester vigilantes. D’autant que le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin, a annoncé vouloir proposer au Premier ministre « d’améliorer les dispositions qui connaissent des réserves du Conseil constitutionnel ».

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