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EnquêteClimat

Tout savoir sur le changement climatique en France

La France vue de l'espace, à l'hiver 2015.

Comment le changement climatique se manifeste-t-il en France ? Qu’a-t-il déjà changé ? Quelle quantité de gaz à effet de serre émet la France, et comment ? Reporterre détaille à l’échelle nationale le phénomène de notre époque.

Cliquez pour aller directement à l’un des thèmes :

1. Quels sont les indicateurs du réchauffement ?

2. Comment nous, Français, sommes déjà affectés ?

3. Combien la France émet-elle de gaz à effet de serre ?

4. Quels sont les principaux secteurs émetteurs ?



1. Quels sont les indicateurs du réchauffement ?

🔸 Les hivers s’estompent et les vagues de chaleur sont plus fréquentes

Le rythme s’est accéléré depuis les années 1980. La température moyenne annuelle en métropole a atteint 14,1 °C en 2020, dépassant la normale de 2,3 °C (la « normale » étant fixée par rapport à la période de référence 1961-1990).

L’année 2020 s’est ainsi classée au premier rang des années les plus chaudes sur la période 1900-2020, devant 2018 (13,9 °C) et 2014 (13,8 °C).

© Stéphane Jungers / Reporterre
  • Depuis 1947, on compte le nombre de records quotidiens chauds ou froids par rapport aux années précédentes. Dans un climat stationnaire, le nombre de records chauds devrait égaler celui des records froids. Or ce n’est pas le cas : le nombre de journées chaudes (températures maximales supérieures à 25 °C) augmente, tandis que le nombre de jours de gel diminue. En toute logique, plus la série de mesures s’allonge, plus il devrait être difficile de battre des records. Ces dernières années ont montré que ce n’est pas non plus le cas. Les hivers ont tendance à s’estomper.
  • En France, lorsque des journées anormalement chaudes se succèdent pendant au moins trois jours, on parle de vague de chaleur [1]. Leur fréquence et leur intensité augmentent. Selon Météo France, sur les 41 vagues de chaleur mesurées entre 1947 et 2019, 9 ont eu lieu avant 1989, contre 32 entre 1989 et 20197.

Celles de l’été 2019, avec 46 °C dans le sud de la France et presque 43 °C sur la région parisienne, étaient une conséquence directe du changement climatique. Et en juin 2022, la France, l’Espagne et les pays du Maghreb ont connu en juin, « une vague de chaleur exceptionnelle par sa précocité », a relevé Météo France. En France comme ailleurs, le phénomène est voué à s’aggraver.

🔸 Le niveau de la mer monte

  • Dans son dernier rapport sur les bases physiques du réchauffement climatique [2], le GIEC souligne que le niveau des océans s’est élevé, en moyenne, de 20 cm entre 1901 et 2018 [3].

De tous les effets du réchauffement, c’est le plus inquiétant car il est irréversible (sauf à connaître une nouvelle ère de glaciaire de grande envergure, ce qui n’est pas prévu). Le rythme s’accélère : + 1,3 mm/an jusqu’en 1971, mais + 3,7 mm/an depuis 2006 [4]. Avec 7 000 km de côtes (dont 1 500 km outre-mer), la France est évidemment concernée. Les mesures par satellite, les plus récentes et les plus fiables, indiquent que le niveau de la mer le long des côtes françaises atlantiques et méditerranéennes s’est élevé un peu moins que la moyenne mondiale sur la période 1993-2013.

🔸 Les épisodes méditerranéens se multiplient

  • Trois à six fois par an, en automne, de violents orages frappent le sud-est du pays. L’équivalent de plusieurs mois de pluies tombe en seulement quelques heures ou quelques jours : on parle d’épisodes méditerranéens. Le relief, les sols souvent secs, leur artificialisation expliquent pourquoi des crues éclair, dévastatrices, se produisent. Signe d’un changement climatique sur l’arc méditerranéen, la fréquence des épisodes les plus violents, durant lesquels plus de 20 cm d’eau tombent en 24 heures, a été multipliée en France par 2,7 entre 1961 et 2015.
© Stéphane Jungers / Reporterre

🔸 L’enneigement baisse et les glaciers fondent

  • En montagne, l’augmentation moyenne des températures est plus forte qu’en plaine. La pluie remplace la neige, et cette dernière fond plus vite : la durée et l’épaisseur de l’enneigement diminuent. De combien ? Les mesures fiables sur des périodes longues manquent, en particulier en altitude (>2 200 m). Néanmoins, 60 ans de recul au col de Porte permettent de constater qu’à 1 325 m d’altitude, dans le massif de la Chartreuse (Alpes), l’enneigement a perdu près de 40 cm d’épaisseur de neige hivernale moyenne entre les périodes 1960-1990 et 1990-2019.

La température hivernale, elle, y a augmenté de plus de 0,9 °C. Plus globalement, en dessous de 2 000 m d’altitude, la période durant laquelle il y a de la neige au sol l’hiver est passée de 34 à 22 jours dans les Alpes entre 1971 et 2019.

  • De tous les milieux naturels, les glaciers sont les plus sensibles aux variations de température. Entre 1550 et 1850, le climat a été favorable à la croissance des glaciers des Pyrénées et des Alpes (on parle de « Petit Âge glaciaire »). Depuis, selon l’Observatoire national des effets du réchauffement climatique, un retrait généralisé est constaté. En prolongeant la courbe de tendance, on peut craindre l’extinction des glaciers pyrénéens aux alentours de 2050.

🔸 Les êtres vivants s’adaptent

  • La chenille processionnaire gagne du terrain. Connue pour ravager le feuillage des pins sans causer leur mort, cette larve d’un papillon de nuit est sensible aux gelées et à une forte pluviosité. Ses faiblesses ont longtemps contenu sa présence dans le sud de la France. Mais son aire de répartition s’étend désormais au nord jusqu’en Île-de-France, en Bourgogne et en Haute-Normandie, voire en altitude jusqu’à 2 100 m. S’il n’est pas le seul moteur de l’expansion de cette chenille, le changement climatique en est un des principaux.
  • Au printemps, les oiseaux migrateurs reviennent nidifier en France de plus en plus tôt. Les observations sont conduites à la pointe de Grave, à l’extrémité nord de la pointe du Médoc, où se concentre un flux important de ces volatiles. Seize espèces font l’objet d’un suivi visuel (busard cendré, milan noir, hirondelle de fenêtre, etc.), et toutes ne répondent pas de la même manière au réchauffement climatique. Le décalage temporel atteint presque dix-sept jours pour le balbuzard pêcheur pour moins de un jour pour le martinet noir. Cependant, tous ces migrateurs sont de retour, en moyenne, 6,5 jours plus tôt qu’en 1987.
  • En moyenne, les vendanges ont lieu 18 jours plus tôt qu’il y a 40 ans. Cette précocité est un marqueur robuste de la réaction de la végétation au réchauffement. Entre 1950 et 2019, le cépage riesling en Alsace a même vu le début des vendanges s’avancer de presque un mois. Sur la même période, pour les appellations Tavel et Châteauneuf-du-Pape, le début de la vendange passe de la deuxième quinzaine de septembre à la deuxième quinzaine d’août. Moins médiatisée, la date de pleine floraison, indépendante de toute action humaine, est encore plus fiable. En Alsace, elle a avancé d’environ 15 jours.
© Stéphane Jungers / Reporterre

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2. Comment nous, Français, sommes-nous déjà affectés ?

🔸 Le littoral prend l’eau

La côte sableuse d’Aquitaine perd 1 à 3 m/an en moyenne, et jusqu’à 20 m par endroits lors d’une forte tempête. Les falaises crayeuses de Seine-Maritime reculent d’environ 20 cm/an, mais des effondrements font perdre 10 à 15 m en quelques secondes.

En bord de Méditerranée, la Camargue est lentement submergée. L’élévation irréversible du niveau des mers va-t-elle amplifier le phénomène ? On peut le penser, mais quantifier l’effet spécifique du réchauffement sur l’érosion des côtes sableuses est aujourd’hui un défi scientifique sans réponse claire.

  • En revanche, lors des tempêtes, l’élévation du niveau marin crée ou aggrave les risques de submersion. Le niveau moyen de l’eau augmente alors, au risque de déborder les ouvrages de protection ; et des paquets de mer peuvent les franchir, voire les briser. Les submersions temporaires, qui atteignent des terres jugées à l’abri, sont les plus dangereuses (47 morts et plusieurs centaines de blessés lors de la tempête Xynthia en 2010) [5]. Pour les zones les plus exposées, d’ici 2100, des submersions exceptionnelles qui n’arrivaient qu’une fois par siècle surviendront au moins une fois par an.
  • Combien de biens sont-ils susceptibles d’être inondés au moins temporairement d’ici 2050 ? Selon la société Callendar, sur 16 millions de biens immobiliers vendus en France entre 2016 et 2021, environ 15 000 seront inondables avant le milieu du siècle, en particulier dans l’embouchure de la Seine et sur la côte Atlantique. Ces biens représentaient une valeur d’achat cumulée de 5 milliards d’euros.
© Gaëlle Sutton/Reporterre

🔸 Montagne : la fin de l’or blanc, et plus encore

  • Non seulement le réchauffement climatique réduit l’enneigement naturel, en durée comme en volume, mais il complique la production artificielle de neige dite « neige de culture ». Dans ces conditions, quel sera l’avenir de l’industrie du ski, l’un des poumons économiques des régions de montagne ?

D’après une modélisation d’une équipe Météo-France, CNRS et INRAE conduite sur 129 stations des Alpes françaises, si 45 % du domaine skiable est couvert en neige de culture, alors l’enneigement jusqu’en 2050 sera comparable à ce qu’il était dans les années 1986-2005. Pour ceux qui vivent du ski, la neige de culture est une planche de salut. Mais les besoins en eau seront énormes : en moyenne de l’ordre de 40 millions de m³. La multiplication de retenues d’eau pour alimenter les canons à neige en hiver est vivement débattue.

  • Le réchauffement de l’air fait fondre le pergélisol (souvent appelé de son nom anglais permafrost), mélange de terre et de glace qui assure, en altitude, la stabilité des massifs rocheux. De ce fait, depuis trois décennies, la cadence des éboulements s’accélère en été, et détruit faces de montagne, pics ou arêtes bien connues des alpinistes. En 2005, la chute du pilier Bonatti, dans le massif du Mont-Blanc, a été un choc dans la vallée de Chamonix.
  • Avec une évaporation de l’eau du sol et une transpiration des plantes accrues, la végétation manque d’eau. À Embrun (Hautes-Alpes), entre avril et septembre, ce déficit hydrique a augmenté de moitié entre les années 1970 et aujourd’hui. Cela peut aller jusqu’à la sécheresse. La quantité de fourrage disponible dans les alpages baisse, ce qui affecte l’alimentation du bétail transhumant et donc le poids des animaux. Le rythme de développement des plantes s’accélère : la pousse de l’herbe s’amorce dès le printemps, si bien qu’au moment de la montée des troupeaux, elle peut manquer.

🔸 Les villes, vulnérables aux vagues de chaleur

  • En ville, le changement climatique tue déjà : 35 % des morts liées à la chaleur durant l’été lui sont imputables entre 1991 et 2018. En valeur absolue, cela concerne 215 décès par an dans 18 villes françaises. Si les vagues de chaleur ne sont pas spécifiquement urbaines, leurs effets sont majorés en ville. La raison ? L’effet « îlot de chaleur urbain » qui se traduit par un excès des températures de l’air observées, près du sol, dans les zones urbaines en comparaison avec les zones rurales avoisinantes. L’écart peut aller de 2 °C pour une ville de 1 000 habitants jusqu’à 12 °C pour une métropole de plusieurs millions d’habitants.
  • Toutefois, l’impact des vagues de chaleur varie fortement selon les caractéristiques architecturales (étendue, densité et hauteur des bâtiments, etc.). À Paris, lors de la canicule de 2003, les températures et humidités équivalaient à celles de Séville lors d’un été moyen, alors que dans la cité andalouse, les conséquences sanitaires ne sont jamais aussi graves car le bâti y est plus adapté aux fortes températures, tout comme les habitudes de la population. L’intensité est en général plus forte la nuit que le jour car les zones très construites se refroidissent moins vite.
  • Et à l’avenir ? Quel que soit le scénario d’émission de gaz à effet de serre envisagé, la fréquence des vagues de chaleur devrait doubler d’ici à 2050. En fin de siècle, elles pourraient être bien plus sévères et plus longues, avec un étalement entre fin mai et début octobre. Ce sera d’ailleurs le cas partout dans le monde.

🔸 Moustiques, pollens, pollutions : des risques sanitaires au plus haut

  • Les risques sanitaires directs que fait courir le réchauffement climatique sont les plus certains, et sans doute les plus graves. Les vagues de chaleur en été verront la mortalité grimper, surtout chez les plus âgés. À chaque fois que survient un événement météo extrême lié au réchauffement (sécheresse, inondation, etc.), il peut y avoir des pertes humaines, des blessés, des malades, immédiatement mais aussi après-coup avec la dégradation de l’eau et les coupures d’approvisionnement. De façon moins évidente, le réchauffement détériore la qualité du sommeil, en causant des insomnies, des problèmes respiratoires par dégradation de la qualité de l’air, ou simplement en rendant les nuits trop chaudes : or un mauvais sommeil peut avoir de lourdes conséquences sur la santé.

Aujourd’hui, une épidémie de dengue en France métropolitaine ne saurait être exclue (cette maladie circule déjà dans les départements et régions d’outre-mer et collectivités d’outre-mer). La réémergence du paludisme, maladie transmise par d’autres espèces de moustiques, semble très peu probable, mais elle n’est pas totalement écartée dans les régions humides. D’autres périls sont portés par les moustiques : la leishmaniose (maladie parasitaire dont le chien constitue le réservoir principal), ou encore le virus du Nil occidental, avec quelques cas dans le Sud-Est français. Avec le réchauffement, la France pourrait ressembler bientôt à la Grèce et l’Italie, aux prises avec de vraies épidémies de ce virus.

  • En favorisant l’expansion des espèces allergisantes et leur floraison plus précoce, le réchauffement climatique accroît la quantité de pollens dans l’air : il a donc un effet sur la fréquence de certaines allergies causées par les pollens, en particulier ceux du bouleau et de l’ambroisie. Ces allergies sont déjà en recrudescence, avec des symptômes plus sévères et plus persistants que jamais.
  • La hausse des températures a d’autres effets indirects, à travers la hausse des risques liés à la pollution de l’air, notamment à la pollution à l’ozone, ou encore la prolifération de certaines algues (comme les cyanobactéries) avec des risques de contamination de l’eau potable, des eaux récréatives, des poissons et fruits de mer.

🔸 Eau : le ciel de plus en plus capricieux

  • Avec le réchauffement climatique, les régions sèches vont l’être davantage, les régions arrosées le seront encore plus. Un casse-tête pour l’agriculture ! Côté trop-plein, 38 inondations ont eu lieu en France entre 1964 et 1990, contre 103 entre 1991 et 2015. Les précipitations intenses engorgent les sols et favorisent les champignons parasites, ce qui affecte les rendements des cultures. En 2016, le rendement du blé a diminué d’un tiers par rapport à 2015 en raison des fortes précipitations de printemps.
  • À l’inverse, les sécheresses historiques entre 1964 et 2015 ont réduit les rendements céréaliers en Europe de 9 % en moyenne. Lors de l’épisode de 2019, jusqu’à 94 des 96 départements métropolitains ont été concernés en août par des mesures de restriction de l’usage de l’eau et de l’irrigation. En 2050, le déficit français en eau pourrait être de 2 milliards de m³ par an, et toucherait autant l’industrie (en particulier le refroidissement estival des centrales nucléaires implantées en bord de cours d’eau) que l’agriculture et l’alimentation en eau potable. Les régions les plus touchées seraient celles qui sont déjà déficitaires aujourd’hui.
  • Les sécheresses privent aussi les troupeaux de fourrages, de grains, et d’eau pour s’abreuver, en particulier dans les alpages de montagne. Les éleveurs de ruminants sont particulièrement touchés. Par ailleurs, les vagues de chaleur entraînent une baisse de production du bétail, voire une surmortalité.
© Stéphane Jungers / Reporterre

🔸 Les forêts prises entre deux feux

  • L’augmentation du taux de CO₂ dans l’air due au réchauffement climatique a des effets positifs sur la croissance des arbres ; mais l’assèchement des sols et la perturbation de certains cycles naturels (comme le cycle de l’azote) ont l’effet inverse. Isoler la part du réchauffement dans l’évolution des forêts sur le long terme est difficile ; néanmoins, les sécheresses répétées et la prolifération d’insectes ravageurs (comme les scolytes, des coléoptères) et de pathogènes (comme l’oïdium du chêne, un champignon) peuvent lui être attribués.

En métropole, depuis 2018, plus de 3 000 km² de forêts publiques en France (soit 30 fois la superficie de Paris) ont subi un taux de mortalité inédit. En Guyane, la plus grande forêt nationale est également menacée par la sécheresse et la déforestation liée aux activités minières et à l’élevage. D’ici 50 ans, la moitié de la forêt française pourrait avoir changé de visage.

  • En parallèle, les récoltes de bois ont fortement augmenté depuis 2015. Combinée à la surmortalité des arbres, cela explique que les forêts françaises n’aient capté que les trois quarts du CO₂ prévu par la stratégie nationale de décarbonation entre 2015 et 2019. Un résultat inquiétant car l’effet « puits de carbone » de la végétation est l’une des armes efficaces pour atténuer l’effet de serre.

🔸 Phénomènes extrêmes : les assureurs n’assurent plus

  • En cas d’événement extrême, le coût des dommages est considérable. En 2015, plus de 500 millions pour les inondations après orage sur la Côte d’Azur. En 2016, plus d’un milliard d’euros pour la crue de la Seine. En 2017, année hors norme, plus de 2 milliards d’euros avec le passage des cyclones de Irma et Maria sur les îles de Saint-Martin et Saint-Barthélemy. Les sécheresses de 2018 et 2020 furent à peine moins coûteuses.

Les assureurs sont de plus en plus sollicités. Pour eux, les inondations sont le premier pôle d’indemnisation au titre du régime des catastrophes naturelles avec 21,6 milliards d’euros d’indemnisation cumulée entre 1982 et 2020. Entre 1989 et 2020, le coût cumulé de la sécheresse s’élève, lui, à près de 15,2 milliards d’euros, en grande partie pour indemniser des propriétaires dont les biens ont été endommagés en raison du tassement des sols argileux sous l’effet de la chaleur.

Dans l’avenir, inondations et sécheresse se feront plus fréquentes et plus intenses. Quant aux tempêtes, en métropole, les prévisions scientifiques n’indiquent aucune tendance significative à la hausse sur leur nombre et leur violence. Pour ce qui concerne l’outremer, de grandes incertitudes subsistent sur le futur des cyclones tropicaux.

  • L’augmentation du risque que fait peser le réchauffement climatique se traduit donc par une augmentation des cotisations d’assurance, voire par la non-assurabilité de certains risques et de certains territoires. Pour le Haut Conseil sur le climat, « la question se pose donc de savoir quels territoires devront être absolument protégés, quels espaces seront abandonnés ou occupés de façon temporaire, quelles populations et activités devront être relocalisées et à quelle échéance ».

Plus de la moitié des Français seront directement touchés par le réchauffement climatique
Au total, du fait des avalanches, cyclones et tempêtes, feux de forêt, inondations…, les experts estiment que 62 % de la population est exposée de manière forte ou très forte aux risques climatiques.

© Stéphane Jungers / Reporterre

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3. Combien la France émet-elle de gaz à effet de serre ?

🔸 Il faut distinguer émissions sur le territoire ET émissions importées

  • Combien une famille produit-elle de CO₂ lors de ses déplacements en voiture ? Combien un élevage de bovins relâche-t-il de méthane ? Savoir répondre à ces questions permet de comptabiliser l’ensemble des émissions de gaz à effet de serre à l’intérieur des frontières du pays. En 2019, cet inventaire s’est élevé en France à 436 millions de tonnes d’équivalent CO (ou Mt éqCO₂), ce qui représente 6,5 t éqCO₂ par habitant.
  • Mais il faut y ajouter les émissions associées aux échanges internationaux aériens et maritimes, ainsi que les émissions associées à nos importations (ordinateurs fabriqués en Chine, voitures fabriquées en Slovaquie, etc.). Lorsqu’on prend en compte la totalité de ces émissions, on obtient l’empreinte carbone de la France, qui s’est élevée en 2016 [6] à 666 Mt éqCO₂, soit 10 t éqCO₂ par habitant. Cet indicateur exprime le vrai poids planétaire de notre population en matière de gaz à effet de serre ; pour la France, il est donc supérieur de plus de 50 % au seul inventaire national.
© Stéphane Jungers / Reporterre
  • Ces émissions sont en partie compensées par la capacité des sols à absorber le CO₂. En effet, les arbres, les végétaux et même les microalgues du sous-sol absorbent une partie du CO₂ atmosphérique. Ce stockage rentre dans la catégorie au nom barbare d’UTCATF (Utilisation des Terres, Changements d’Affectation des Terres et Forêt). Une fois cet effet déduit, les émissions territoriales de la France étaient d’environ 405 Mt éqCO₂ en 2019.

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4. Quels sont les principaux secteurs émetteurs ?

Tous les grands secteurs connaissent désormais une baisse de leurs émissions. Transports, industrie, agriculture, bâtiments : ce quatuor totalise presque 90 % des émissions territoriales. Sans surprise, le principal gaz émis (75 %) est le dioxyde de carbone, ou CO₂, suivi par le méthane (13 %), le protoxyde d’azote (9 %) et les gaz industriels fluorés (3 %).

  • Pour davantage de précisions sur ces différents gaz, voir : Qu’est-ce que le réchauffement climatique.
    Chaque région française, en fonction de son histoire, a un profil d’émissions qui lui est propre. En Provence-Alpes-Côte d’Azur et Hauts-de-France, l’industrie occupe une place importante (38 à 42 %). En Île-de-France, la forte densité de population et d’activités tertiaires explique la part importante du bâtiment dans les émissions régionales (47 %). En Bretagne, la part du secteur agricole, tourné vers l’exportation et à forte composante élevage, est notablement élevée (40 %). Outre-mer, l’électricité est surtout fournie par des centrales thermiques, d’où les émissions importantes du secteur de l’énergie (29 % à 54 %).

Les émissions de gaz à effet de serre en France par secteur

  • Transports : 30 %
    Ils sont clairement la première source d’émissions de gaz à effet de serre en France. La voiture individuelle en représente plus de la moitié des émissions. Alors que la baisse est bien établie et structurelle dans les secteurs des bâtiments, de l’industrie et de l’énergie, elle est récente et reste à confirmer dans les transports. La croissance de la circulation routière et l’insuffisance de l’offre de trains freinent en grande partie les réductions.
© Stéphane Jungers / Reporterre

  • Industrie : 19 %
    Chimie, matériaux de construction (en particulier le très énergivore béton) et métallurgie ont des poids sensiblement comparables et pèsent environ les trois quarts des émissions de l’industrie. Ces dernières ont diminué de 41 % depuis 1990, avec un rythme réduit sur la dernière décennie, en partie grâce à des gains d’efficacité énergétique dans les procédés de fabrication et à la décarbonation de l’énergie, mais aussi du fait de la délocalisation d’usines vers d’autres pays.
© Stéphane Jungers / Reporterre

  • Agriculture : 19%
    Elle émet surtout du méthane via la fermentation des végétaux dans le système digestif des ruminants et l’épandage de lisier dans les champs. Une réduction récente est constatée, due à la diminution de la taille du cheptel et à l’utilisation des effluents d’élevage dans des fermenteurs, mais elle est faible par rapport aux autres secteurs émetteurs (- 9 % seulement depuis 1990).

La France a d’ailleurs moins réduit ses émissions agricoles que ses voisins européens. Par ailleurs, la forêt et les prairies françaises tendent à stocker moins de carbone du fait de l’artificialisation rapide d’une partie des surfaces agricoles (construction de lotissements, de parkings, etc.). Les importations de soja pour l’alimentation animale et d’huile de palme pour le biodiesel contribuent aussi à la déforestation en zone tropicale, et donc à un affaiblissement des puits de carbone dans ces pays.

© Stéphane Jungers / Reporterre

  • Bâtiment : 18 %
    Dans ce secteur, où le résidentiel (les logements des particuliers) cohabite avec le tertiaire (bureaux), les combustibles fossiles servent surtout au chauffage. Dans le résidentiel, deux tiers des bâtiments sont chauffés au gaz, loin devant le fioul (28 %). Selon les conditions météo, la consommation varie beaucoup. Les hivers globalement cléments entre les années 1990 et 2019 ont permis de réduire les émissions de COde 29 % dans le résidentiel et 19 % dans le tertiaire.
© Stéphane Jungers / Reporterre

  • Transformation d’énergie : 10 %
    Pour près de la moitié, les émissions de ce secteur sont liées à la production d’électricité à partir de gaz, fioul et charbon. Par rapport à des pays comparables, c’est notoirement peu, et cela s’explique par la place écrasante du nucléaire dans la production électrique en métropole (69 % en 2021). Depuis 1990, ces émissions ont diminué de 46 %.
© Stéphane Jungers / Reporterre

  • Déchets : 4 %
    Une fois enfouis en décharge, nos déchets organiques tels que les résidus agricoles, les graisses d’abattoir ou les restes de cantines se décomposent en émettant du méthane. En France, ces émissions sont en baisse depuis le milieu des années 2000.
© Stéphane Jungers / Reporterre

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• Pour aller + loin

-  Les dossiers de Reporterre : Climat, Climat : de COP en COP, Agriculture et climat.
-  Rapport du Giec Climate change 2021 : the physical science basis, Résumé pour les décideurs (en anglais) ; analyse résumée par Reporterre.
-  Rapport du Giec Climate change 2022 : Impacts, Adaptation and Vulnerability, Résumé pour les décideurs (en anglais) ; analyse résumée par Reporterre.
-  Présentation en vidéo des principaux éléments du rapport Climate Change 2021 : the physical science basis du Giec par sa coprésidente Valérie Masson-Delmotte.
-  Rapport de synthèse du Giec, Changements climatiques 2014 (en français).
-  Data Lab 2022, chiffres clés du climat, ministère de la Transition écologique, pp.32-33.
-  World Energy Outlook 2021, Agence internationale de l’énergie (en anglais).
-  Rapport d’Oxfam, Combattre les inégalités des émissions de CO₂ (résumé) ; analysé résumée par Reporterre.
-  Article de l’université de Cambridge, The unequal distribution of household carbon footprints in Europe and its link to sustainability (en anglais).
-  Lucas Chancel, Paris School of Economics : Climate change & the global inequality of carbon emissions (en anglais).
-  Vidéo Science étonnante sur l’effet de serre
-  Global Carbon Project
-  Global Carbon Atlas.
-  GHG emissions of all world, rapport 2021 du Joint Research Center de la Commission européenne.
-  Le climat en questions, site pédagogique du CNRS sur le climat.

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