Les jeunes mobilisés pour le climat ne supportent plus la publicité

Grève pour le climat à Paris, le 25 septembre 2022. - © Léa Guedj/Reporterre
Grève pour le climat à Paris, le 25 septembre 2022. - © Léa Guedj/Reporterre
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LuttesAprès l’arrêt dû à la pandémie, les jeunes grévistes ont retrouvé le chemin de la rue, le 25 septembre, pour réclamer une politique à la hauteur des enjeux climatiques. Avec une stratégie mûrie et un sentiment d’urgence plus intense.
Paris, reportage
Entre 2 000 et 2 500 personnes selon les organisateurs, pour la plupart élèves de collèges, lycées et établissements supérieurs de la capitale ou en région parisienne, ont défilé dimanche 25 septembre dans le cortège parisien allant de la place du Panthéon au ministère de l’Économie et des Finances. Un après-midi de manifestation pour clôturer trois jours de mobilisations dans toute la France, dans le cadre des grèves pour le climat organisées par Youth for Climate, l’antenne française du mouvement international Fridays for Future.
Trois journées de rassemblements devant les mairies dans plusieurs villes de France, de marches et d’actions ciblées, telles que les blocages des locaux de Total Marketing à Lyon par des militants de Youth for Climate, du « quai des milliardaires » à Antibes, où sont amarrés les yachts géants, par Attac, ou encore du terminal d’affaires de l’aéroport du Bourget par des activistes d’Extinction Rebellion.
« C’est le moment de mobiliser »
L’initiative des grèves du vendredi a été lancée par la Suédoise Greta Thunberg en août 2018. Plusieurs vendredis d’affilée, des milliers d’écoliers et étudiants s’étaient alors joints à de grandes marches, jusqu’au coup d’arrêt provoqué par la pandémie. Aujourd’hui, l’objectif est de relancer la dynamique, afin d’exiger des politiques à la hauteur de l’urgence climatique.

« C’est le moment de mobiliser ; on est en début d’année et les jeunes veulent s’engager, dit Noah, lycéen de 18 ans et membre de Youth for Climate. Beaucoup de nouveaux arrivants participent déjà à l’organisation de la manifestation. Ça permet de les former à d’autres types d’actions dans le futur. »
Fanny fait partie des nouvelles recrues. Elle participe à sa toute première manifestation pour le climat. « Cet été, j’ai été choquée de voir les effets du changement climatique si près de chez moi et ailleurs, comme au Pakistan avec les inondations », raconte l’élève de terminale qui a bien l’intention de poursuivre son engagement, jusqu’à s’impliquer dans des actions de désobéissance civile.
Contre la publicité dans l’espace public
Tout au long du cortège, des militants d’Extinction Rebellion se sont lancés sur les panneaux publicitaires ponctuant le trajet. En quelques secondes, les vitres des panneaux ont été ouvertes, les affiches faisant la promotion de marques ont été arrachées et remplacées par des slogans antipubs.
Cette année, les manifestants parisiens ont choisi un mot d’ordre : la fin de la publicité dans l’espace public. Plus localement, « nous voulons empêcher la mairie de Paris de renouveler son contrat publicitaire pour la période 2023-2024 avec les entreprises de publicité urbaine JCDecaux et Clear Channel », explique Ink, 17 ans.

« On a choisi la publicité en raison de cette actualité, mais aussi parce que c’est un vecteur de la propagande capitaliste, détaille le lycéen. Par ces affichages, on propage des stéréotypes sexistes, classistes, racistes et grossophobes. On cherche à nous maintenir dans un rôle de consommateurs, et en encourageant la surconsommation, on encourage la surproduction et la surexploitation des ressources, à l’origine de la crise climatique. »
Renouveau stratégique
Dans les haut-parleurs, les slogans étaient familiers : « On est plus chauds que le climat ! » ; « Et 1 et 2 et 3 °C, c’est un crime contre l’humanité ! ». Mais le discours, lui, s’est étoffé, accompagnant une conviction plus profonde encore de l’urgence d’agir face à l’inertie politique. Sur les banderoles et les pancartes, le ton est désormais moins celui de jeunes écoanxieux que d’une génération en colère : « Politiques meurtriers, jeunes en colère » ; « Bac +3 °C = Zéro débouché » ; « Portrait de la jeunesse en feu » ; « 2018-2022 : on a grandi, notre colère aussi ».
Les militants revendiquent aussi une stratégie « plus efficace ». À Paris, il s’agit de surfer sur les avancées obtenues en juin dans d’autres villes de l’Hexagone. À Bègles (Gironde), où la municipalité a annoncé « la fin de la publicité » sur ses panneaux d’affichage en centre-ville, ainsi qu’à Lyon, où la métropole a voté un nouveau projet de règlement local de la publicité qui prévoit, entre autres, l’interdiction des écrans numériques publicitaires.
Pour obtenir une nouvelle victoire locale à Paris, ils misent sur la « diversification des modes d’action et une sensibilisation à des enjeux précis qui parlent aux gens dans leur quotidien », explique Tiago, 19 ans, étudiant en licence et membre de Youth for Climate. Plusieurs échéances sont désormais en ligne de mire des jeunes grévistes dans les prochains mois, notamment la Coupe du monde au Qatar et la COP27 des Nations unies en novembre.