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Sainte-Soline : Darmanin déroule sa com’ devant les parlementaires

Gérald Darmanin à l'Assemblée nationale, le 4 avril 2023.

Rendez-vous à 9 heures devant la commission des lois de l’Assemblée nationale, 11 heures devant celle du Sénat. Le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin a enchaîné les auditions mercredi 5 avril. Il a déroulé devant les parlementaires la même présentation à deux heures d’intervalle. Une opération de communication qui lui a permis de marteler son idée-force : les violences en manifestations, qu’elles soient contre les retraites ou les mégabassines, sont liées à une « infiltration de l’ultragauche ».

« Ce qui pose problème, ce ne sont pas les manifestations en tant que telles, a déclaré le ministre devant les députés. Ni le maintien de l’ordre en tant que tel. Ce qui pose problème, c’est [...] la présence extrêmement forte de ce que les services de renseignement appellent l’ultragauche qui a souhaité infiltrer le mouvement social, en prendre la direction, je dirais le prendre en otage. »

Ainsi, selon le ministre, les manifestations contre la réforme des retraites auraient pris un tournant violent à partir du moment où cette « ultragauche » aurait décidé de s’en mêler à partir du 16 mars. Et la lutte contre les mégabassines se serait radicalisée à leur contact.

Le ministre a une nouvelle fois déroulé son discours sur les événements à Sainte-Soline (Deux-Sèvres) : la manifestation contre les mégabassines était interdite ; les autorités ont saisi de nombreuses « armes » dans les jours qui ont précédé lors de contrôles routiers ; les organisateurs de la manifestation — « je mets des guillemets à “organisateurs” », a précisé le ministre — ont refusé de s’organiser avec la préfecture ; les services de l’État s’étaient très bien préparés, y compris par une réunion présidée par la Première ministre. Les forces de police n’auraient fait que se préparer à un déferlement de militants violents. « Personne n’a respecté l’État de droit », a insisté le ministre. Il a également montré un tract diffusé par les organisateurs aux manifestants pour se prémunir contre la répression, montrant « une préméditation de la violence », selon lui.

Le fait que les secours aient pu être ralentis par les forces de police est une « fake news », a-t-il insisté, ignorant et contestant donc les témoignages et informations recueillis par Reporterre, Mediapart ou Le Monde. M. Darmanin a aussi martelé que les organisateurs de tout événement sont « les responsables des secours », et que des moyens importants avaient été déployés par la préfecture.

Un discours fortement contesté par Les Soulèvements de la Terre, qui déjà la veille de l’intervention du ministre anticipaient les éléments de langage. Sur Twitter, le mouvement coorganisateur de la manifestation de Sainte-Soline a estimé que l’État avait multiplié les provocations avant l’événement, et avait préparé les esprits aux violences et à un possible mort parmi les manifestants. Pour rappel, les organisateurs de la manifestation ont recensé plus de 200 blessés, dont 40 graves, et une personne entre la vie et la mort.

Ce discours sur la radicalisation de l’ultragauche n’est pas prêt de s’arrêter. Le ministre a aussi brossé un historique de son retour « sur le devant de la scène », depuis la mobilisation contre le contrat première embauche (CPE) en 2006 jusqu’aux Gilets jaunes et le mouvement contre la réforme des retraites, en passant par Sivens, Notre-Dame-des-Landes ou la contestation de la loi Travail. « Si, quand l’ultragauche est arrivée à Notre-Dame-des-Landes, le gouvernement de l’époque avait eu la même réaction que ce gouvernement-ci, il n’y aurait pas eu Notre-Dame-des-Landes, il n’y aurait pas eu de contre-société et ce désastre pour l’autorité de l’État », a-t-il jugé.

Il a aussi cité les zad de Lützerath en Allemagne ou Atlanta aux États-Unis pour montrer la dimension internationale du phénomène. Il est enfin revenu sur la cartographie de 42 projets contestés en France, dont 17 « à risque de radicalisation », annonçant déjà que le prochain rendez-vous étroitement surveillé serait celui contre l’autoroute Toulouse-Castres prévu fin avril. Comme pour une nouvelle fois préparer les esprits aux violences.

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