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Climat

Biden-Trump : quel avenir pour l’écologie ?

L’avenir de la protection de la nature aux États-Unis dépend beaucoup du résultat des élections qui se tiennent ce mardi 3 novembre. Depuis quatre ans, Donald Trump s’est employé à démanteler toutes les réglementations environnementales. En face de lui, Joe Biden se présente avec un plan de relance vert qu’il veut « ambitieux ».

Les États-Unis retiennent leur souffle. C’est aujourd’hui, mardi 3 novembre (dans la nuit de mardi à mercredi en France), que les citoyens étasuniens doivent élire leur président. Le candidat démocrate, Joe Biden, est pour l’instant donné favori dans les sondages face au président sortant républicain, Donald Trump. Mais les observateurs restent prudents ­— en 2016, tout le monde pensait (à tort) que la démocrate Hillary Clinton serait la grande gagnante de l’élection présidentielle.

Quel que soit le résultat des urnes, le mandat de Donald Trump s’achève aujourd’hui, et il est l’heure de tirer le bilan. Force est de constater que celui qui n’a jamais caché ses positions climatosceptiques a bel et bien utilisé ses quatre ans au pouvoir pour détricoter un grand nombre de lois, décrets et réglementations de protection de la nature. Face à lui, Joe Biden apparaît donc forcément comme un grand écolo. Mais quelles sont réellement les positions des deux candidats sur les différentes thématiques environnementales ? Reporterre en a sélectionné cinq pour faire le point.

1. L’accord de Paris sur le climat

C’est l’une des décisions les plus emblématiques de Donald Trump. Le 1er juin 2017, le président sortant a annoncé que les États-Unis se retiraient de l’accord de Paris sur le climat. Cet accord, adopté le 12 décembre 2015 par 195 pays, vise à contenir le réchauffement climatique « nettement en dessous de 2 °C par rapport aux niveaux préindustriels ». Dans cet objectif, les États-Unis s’étaient engagés à réduire de plus de 25 % leurs émissions de gaz à effet de serre (GES) sur leur territoire d’ici 2025.

Une promesse que Donald Trump a balayé dès le début de son mandat, estimant que cet accord (et l’écologie en général) était un frein pour l’économie. « Parce que je suis quelqu’un qui se soucie profondément de l’environnement, je ne peux pas, en bonne conscience, soutenir un accord qui punit les États-Unis, qui sont les leaders mondiaux de la protection de l’environnement », avait-il argué. L’administration Trump a officiellement engagé auprès de l’Organisation des Nations unies (ONU) le retrait des États-Unis de l’accord le 4 novembre 2019. Juridiquement, le retrait ne peut prendre effet qu’au bout d’un an, soit le 4 novembre 2020… Le lendemain de l’élection présidentielle, donc.

À l’inverse, Joe Biden, l’ancien vice-président de Barack Obama (qui avait poussé pour la signature et la ratification de l’accord de Paris), s’est engagé, s’il est élu, à revenir dans l’accord. « Sans nous, regardez ce qui est en train de passer. Tout s’effondre », a-t-il déclaré lors du premier débat présidentiel, le 29 septembre 2020.

2. Le pétrole et les pipelines

Aux États-Unis, deux gros projets de pipelines (oléoducs) ont été particulièrement controversés ces dernières années : Keystone XL et Dakota Access. Le premier doit permettre le transport quotidien de 830.000 barils de pétrole extraits des sables bitumineux de l’Alberta (une province du Canada) jusqu’aux raffineries de l’État du Texas. Il s’agit d’une traversée de 1.900 kilomètres, dont la construction a été lancée en pleine pandémie de Covid-19. Le second projet devait permettre le transport de milliers de barils de pétrole de schiste du Dakota du Nord jusque dans l’Illinois. Les deux pipelines avaient été rejetés par Barack Obama durant son mandat.

Mobilisation des tribus sioux du nord des États-Unis luttent contre le projet d’oléoduc Dakota Access, en 2016.

Quelques jours seulement après son investiture, en janvier 2017, Donald Trump a signé des décrets relançant ces deux projets d’oléoducs. Au mois de mars 2017, le milliardaire a donné son feu vert à l’opérateur TransCanada pour construire Keystone XL, prétendant alors qu’il s’agissait d’un « grand jour » pour l’emploi et l’indépendance énergétique. S’il est élu, Joe Biden a promis de revenir sur l’autorisation de cet oléoduc Keystone XL. Quant à celui de Dakota Access, un juge du district de Columbia a finalement ordonné en juillet 2020 qu’il cesse ses activités au plus tard le 5 août.

3. Le charbon et la fin du « Clean Power Act »

En 2016, Donald Trump avait promis que le charbon resterait « roi » dans le pays. Il avait fait campagne en arborant parfois un casque de mineur sur le crâne, et en assurant qu’il allait « remettre [les] mineurs au travail ».

Voulant joindre les actes à la parole, peu de temps après son arrivée à la Maison-Blanche le milliardaire a mis fin au « Clean Power Act ». Il s’agissait d’un plan mis en place par Barack Obama pour pousser les producteurs d’électricité à réduire leurs émissions et à se tourner vers une énergie plus « propre » (et donc à se détourner du charbon). Ne cessant jamais de croire en cette énergie fossile, Donald Trump a préféré remplacer ce plan par une loi nommée « Affordable Clean Energy Rule » — bien moins contraignante pour les producteurs.

Le président a fait plusieurs autres cadeaux au secteur, en nommant par exemple en 2018 un ex-lobbyiste du charbon, Andrew Wheeler, à la tête de l’Agence étasunienne de protection de l’environnement (EPA) ; ou en autorisant les producteurs de charbon à déverser leurs rebuts dans les cours d’eau.

« Personne ne va construire une nouvelle centrale à charbon », a au contraire répété Joe Biden lors du premier débat présidentiel. Le démocrate se présente comme un fervent opposant de cette énergie émettant énormément de CO2. « Le charbon n’est pas compétitif aujourd’hui, analyse pour Reporterre Sophie Méritet, maître de conférences à l’université Paris Dauphine PSL. Trump voulait relancer le charbon mais économiquement, il s’est totalement trompé. Biden dit qu’il ne veut plus de centrale de charbon mais cela ne l’engage à rien, puisque de toute façon le marché ne permettra pas la construction de nouvelles centrales. »

4. Les énergies renouvelables

Donald Trump n’a visiblement jamais réellement cru dans les énergies renouvelables. « Il a fait une erreur au début de son mandat, résume Sophie Méritet. En laissant faire le marché et en arrêtant les subventions, il pensait tuer les énergies renouvelables. Mais il s’est trompé, les énergies renouvelables étaient déjà compétitives et bien ancrées aux États-Unis, donc elles n’avaient déjà plus besoin de subventions. »

Joe Biden pense tout l’inverse du président sortant. Le candidat démocrate veut investir 2.000 milliards sur quatre ans dans une relance verte. Celui qui, il y a encore un an, restait très timide au sujet du changement climatique, annonce aujourd’hui un changement radical avec un plan extrêmement ambitieux.

L’ancien sénateur du Delaware veut « une électricité 100 % décarbonée » d’ici 2035, en encourageant l’installation de panneaux solaires et d’éoliennes, et en rebouchant les puits de pétrole et de gaz naturel abandonnés, qui rejettent chaque année des millions de tonnes de méthane. Joe Biden souhaite aussi financer la rénovation énergétique de six millions de bâtiments notamment dans les quartiers défavorisés, ainsi que la construction de plus d’un million de bâtiments efficients énergétiquement.

L’ancien vice-président de Barack Obama a également affirmé qu’il voulait interdire la fracturation hydraulique (technique utilisée pour extraire le gaz de schiste), mais uniquement sur les terres publiques.

5. La protection de la biodiversité

Le candidat Joe Biden a fait de la protection de la biodiversité un axe important de sa campagne. Il souhaite classer 30 % du territoire et des aires marines en espaces protégés d’ici 2030, et interdire les forages dans le refuge national de la faune arctique, en Alaska.

Dans le Parc national et réserve de Denali, en Alaska.

Une réponse à Donald Trump, qui a autorisé l’abattage de grands prédateurs protégés en Alaska, et ouvert à l’exploitation pétrolière une zone protégée de cette même région.

Et sinon, depuis 2016, Donald Trump a aussi :

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